M. Bayrou réalise un grand objectif : les jeunes vont sortir de plus en plus tôt de l’école. Les pieds devant. Merci Bayrou !
Tout part d’un constat : les jeunes de 20 à 29 ans représentant 27,50 % des cas de sida. En tenant compte de l’espérance de vie moyenne d’un séropositif, on peut établir que près d’un tiers des personnes atteintes en France ont contracté le VIH alors qu’elles étaient en âge d’être au lycée ou à l’université ; chaque année, la proportion des jeunes de moins de 20 ans touchés par le sida augmente. Au-delà de ce constat, il y a une demande : 27 % des appels reçus par Sida Info Service sont émis par des jeunes de moins de 20 ans. 84 % des élèves veulent recevoir une information sur le sida et 68 % sur le corps et les relations sexuelles. Enfin 70 % des adultes ayant des enfants en âge scolaire se déclarant favorables à de la prévention sida avant le secondaire (enquête de JP Moatti, 1992). Selon une circulaire de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (30-11-1993), « la prévention dans les établissements scolaires doit être une priorité pour tous les pays », l’OMS ajoute que « faire de la prévention sida et parler de la sexualité n’abaisse pas l’âge des premiers rapports sexuels, au contraire ».
À ce qui précède, Bayrou apporte une réponse et une seule : « L’ampleur du problème, son amplification inexorable à ce jour en font une question majeure et urgente de santé publique. Elle justifie en soi la nécessité d’intervenir ». Une jolie déclaration d’intention non suivie d’effets. S’il existe des initiatives (isolées) en matière de prévention sida à l’école, cela reste subordonné au bon vouloir de volontaires motivés, recevant l’accord préalable du chef d’établissement. Il n’existe aucune circulaire du ministère de l’Education nationale instituant un minimum d’heures d’information et de prévention.
Chut… on y pense.
Il n’existe pas non plus d’obligation pour les lycées et les collèges de France d’installer des distributeurs de préservatifs. Et ne parlons même pas des distributeurs de lubrifiant et de carré de latex. Ils sont inexistants. En 1995, il faut toujours rappeler que la mise à disposition du matériel de prévention dans les établissements scolaires est une étape indispensable dans la lutte contre le sida. Est importante la visibilité du matériel comme est importante l’éducation sexuelle dans cette lutte. Et peu importe le coût, peu importent les résistances des parents d’élèves ou des chefs d’établissements. Il faut une circulaire signée par Bayrou obligeant l’installation des distributeurs dans les collèges et les lycées.
Mais chut… ce n’est pas urgent !
Il existe certaines personne de bonne volonté au ministère de l’Education nationale. Mais pas au cabinet du ministre. Après deux rentrées scolaires, après 10 mois de tergiversations et de réflexions, la circulaire 73.299 sur l’éducation sexuelle n’a toujours pas été révisée. Bizarrement, le dossier reste bloqué sur le bureau de Bayrou. Ce ministre doit être très sensible aux arguments de l’association Travail-Famille-Propriété qui réalise un lobbying très actif anti-préservatif et anti-sexualité. L’éducation sexuelle est le deuxième pas à franchir dans la lutte conter le sida dans les établissements scolaires.
Chut … n’en parlons plus, Bayrou y est farouchement opposé.
Mais le ministère a des projets : un film, Temps d’Amour, était prévu depuis plus d’un an. Seulement voilà, Bayrou n’est un pas un ponte de la Warner Bros. Il a d’énormes problèmes de productions. Ce serait de la faute du ministère de la Santé qui n’aurait pas donné l’argent à temps. À la Santé, on dément formellement.
Mais chut, l’épidémie ne fait pas de bruit, on voit si peu quand on ne fait rein.
Aux dernières nouvelles, le film serait prêt. Il est juste bloqué pour que Bayrou puisse le présenter à la presse. Enfin, le ministère reconnaît le besoin de formation des professeurs et lance un programme qui va toucher 250 profs… sur 700 000 enseignants ! Et puis il n’est pas sûr que cette formation se mette en place car l’Education nationale dit ne pas avoir l’argent. Elle pense que c’est à la Santé de payer.