Act Up-Paris invite les associations de défense des étrangers à résister.
Dans l’indifférence générale, la loi Chevènement a été votée mardi soir à l’Assemblée Nationale.
En première lecture, les députés avaient souhaité supprimer enfin le délit de solidarité. L’article 10 bis protégeait contre des poursuites les » associations à but non lucratif qui apportent aide et conseils à un étranger [ en situation irrégulière ], et en particulier les associations qui viennent en aide aux étrangers dont l’état de santé nécessite un traitement médical. »
Le Sénat a évidemment annulé cet article, comme la quasi-totalité du projet.
En seconde lecture, l’Assemblée a rétabli un à un la plupart des articles dans leur rédaction antérieure. Mais l’article 10 bis a fait l’objet d’un traitement particulier. A l’initiative de Julien Dray, le rapporteur Gérard Gouzes a soumis aux députés une version modifiée. Vidée de sa substance, la nouvelle rédaction ne permet aux associations d’apporter leur aide qu’à « un étranger entré régulièrement sur notre territoire ». Va-t-on poursuivre ceux qui aident des réfugiés, souvent entrés illégalement, à déposer leur dossier de demande d’asile ?
Mais il y a pire. A la demande de M. Chevènement, les députés ont, à la hâte et presque sans débat, adopté un amendement qui précise que ne seront protégées que les « associations à vocation humanitaire, dont la liste est fixée par arrêté du ministère de l’Intérieur, et les fondations. »
Cet amendement est inquiétant, parce qu’il est l’expression d’une pensée totalitaire : celle d’un pouvoir qui, non content de prétendre contrôler les allées et venues de tous les étrangers, voudrait aussi décider de qui peut leur venir en aide.
Cet amendement est pervers – la volonté du gouvernement est claire : sous couvert d’instaurer une protection légale des associations qui défendent les étrangers dans un but non lucratif – et qui jusqu’à présent n’avaient jamais été poursuivies – il pourra désormais attaquer celles qui lui déplaisent et n’ont pas les appuis politiques suffisants pour être défendues : petites associations, collectifs de sans papiers Puisqu’on ne veut pas revenir sur des lois qui produisent, et continueront de produire de la clandestinité, on préfère s’en prendre à ceux qui luttent, avec leurs moyens, contre les effets catastrophiques de ces textes.
Le gouvernement veut à tout prix maintenir dans la loi le délit de solidarité : Act Up-Paris espère que les associations sollicitées refuseront la complicité qu’on leur demande et n’accepteront pas de sacrifier leur indépendance en figurant sur la liste noire des bons serviteurs de l’Etat.