Après plus de dix ans d’application des lois sur la décentralisation, l’action des départements en matière d’aide sociale fait depuis quelque temps l’objet d’un certain nombre de dénonciations. Deux livres blancs, celui de l’Association des paralysés de France (APF) et de l’UNAPEI, viennent successivement de mettre en évidence les pratiques irrégulières de très nombreux conseils généraux, notamment concernant l’attribution et le contrôle de l’utilisation de l’allocation compensatrice. Selon l’enquête très complète et très argumentée de l’APF, près d’un département sur deux serait hors-la-loi.
C’est sans scrupule apparent que certains conseils généraux n’hésitent pas à justifier l’illégalité de leurs actions en mettant en avant l’importance des dépenses sociales engagées. S’y ajoutent souvent des raisons plus politiques. Nous avions déjà souligné combien l’accès à l’aide médicale, relevant d’une décision du conseil général, constitue un véritable parcours du combattant. Cette aide est d’ailleurs souvent refuséé sous de faux prétextes, plus particulièrement lorsqu’il s’agit de personnes en situation irrégulière qui légalement pourtant peuvent en bénéficier.
Si la gestion des prestations légales d’aide sociale relève de la compétence des départements, les règles d’application restent fixées par l’Etat et doivent donc être identiques pour tous, quel que soit le lieu de résidence. Or force est de constater que les préfets, représentants de l’Etat dans le département et à ce titre chargés du contrôle administratif et du respect des lois, ne jouent pas leur rôle. Il est scandaleux qu’actuellement la seule solution laissée aux bénéficiaires d’une allocation compensatrice, confrontés à des pratiques abusives pouvant entraîner la suspension de cette prestation, soit le recours devant les juridictions compétentes.
Faudrait-il d’ailleurs que ces bénéficiaires puissent être pleinement conscients de leurs droits ; le flou en matière de réglementation semblant volontairement entretenu par de nombreux départements.
Le ministère chargé de l’emploi et de la solidarité reconnait lui-même que cette situation porte « préjudice aux personnes handicapées » et a récemment décidé de mettre à l’étude « un formulaire type de notification des décisions rappelant la réglementation dont le respect s’impose à tous les départements » et qui « présentera l’avantage pour les usagers ainsi informés de mieux faire valoir leurs droits ». Il était temps.