Depuis le début du mois de septembre 1988, AC!, Act Up-Paris, AIDES, le Génépi, le Groupe Multiprofessionel des Prisons et l’Observatoire International des Prisons se sont réunis pour former une plate-forme commune.
Cette plate-forme travaille à ce que les détenus puissent enfin bénéficier des minima sociaux disponibles à l’extérieur.
Dans le cadre du vote du budget de l’administration pénitentiaire qui se tiendra au parlement le 13 novembre ( et pendant lequel sera débattu la hauteur des lignes réservées aux détenus indigents), et à l’approche du 1er décembre 1998, qui célébrera les dix ans de la création du revenu minimum d’insertion. Nous vous invitons à la conférence de presse que nous organisons. Cette conférence présentera aux médias notre plate-forme et nous permettra de répondre à vos questions. Elle se tiendra à 11 heures le mardi 10 novembre, au Palais de Justice, dans la deuxième chambre civile (fléchage sur place). Un dossier de presse de 10 pages vous sera remis à l’entrée.
N’hésitez pas à nous contacter si vous aviez besoin d’informations complémentaires.
Texte de base de notre plate-forme :
Les minima sociaux, même en prison
Tout le monde le sait : ce sont surtout les pauvres qu’on met en prison. Ce que l’on sait moins, en revanche, c’est que l’univers carcéral accentue la précarité de ses » hôtes « , et produit son indigence propre. Aujourd’hui, faute de revenus, 60% des détenus vivent en France en dessous du seuil de pauvreté carcéral; ceux qui travaillent ne perçoivent qu’un salaire dérisoire; la plupart sont contraints à l’inactivité; beaucoup sont exclus des prestations sociales courantes, et tributaires d’aides extérieures extrêmement inégales. Cette précarité propre aux prisons achève de rendre la vie carcérale dégradante, injuste et dangereuse : elle menace la santé et l’intégrité physique des détenus; elle crée et renforce des injustices judiciaires et sociales; elle fragilise sa famille et ses proches.
1. Dommages sanitaires. Sans revenus, les détenus ne peuvent ni renouveler les produits d’hygiène élémentaire que l’administration pénitentiaire est censée leur procurer, ni compléter l’alimentation de base qu’elle fournit. A ce titre, la précarité carcérale constitue un risque sanitaire : elle empêche les détenus de prendre soin d’eux-mêmes et aggrave les effets despathologies lourdes, particulièrement fréquentes en prison, comme le sida ou l’hépatite C.
2. Délinquance et insécurité. L’absence de revenus en prison est par ailleurs un facteur d’insécurité pour les détenus. Le manque de ressources entraîne trafics, rackets et prostitution. Les plus pauvres se trouvent par là même surexposés aux sanctions disciplinaires, aux violences physiques et aux pratiques à risques.
3. Inégalités judiciaires. La précarité propre à l’univers carcéral crée par ailleurs des inégalités judiciaires : l’absence de revenus rend plus difficile l’aménagement des peines, qui exigent des garanties d’emploi et de logement, et un effort actif d’indemnisation des victimes; ils sont en outre pénalisés pour assurer leur défense dans les meilleures conditions.
4. Désinsertion sociale. La précarité qui prévaut en prison contribue largement à l’exclusion des détenus et contredit l’objectif de réinsertion affiché par l’administration pénitentiaire : incapables, pendant la détention, de faire face à leurs charges extérieures (emprunts, loyers), ils ne peuvent plus dès lors soutenir leurs proches, sanctionnés et pénalisés à leur tour, et risquent de se retrouver sans ressources à leur libération. Il ne faut donc pas s’étonner que le taux de récidive culmine dans les mois qui suivent la sortie de prison.
5. Cherté de la vie carcérale. Il faut se défaire du mythe d’un détenu » nourri, logé et blanchi « , dont les besoins seraient couverts gracieusement par l’administration pénitentiaire. Pour être plus supportable, la vie carcérale coûte cher : le prix des marchandises y est parfois deux fois plus élevé qu’à l’extérieur, et le développement en cours des prisons privées accusera davantage ce phénomène.
Le système actuel doit être remis en question : rares et inégalitaires, le travail carcéral et les aides extérieures ne peuvent plus être les seules ressources en prison. C’est pourquoi nous demandons que toute personne incarcérée ait droit, du premier au dernier jour de son incarcération, à un minimum de ressources personnelles, ce minimum étant constitué soit par le maintien de ses droits (minima sociaux, notamment RMI), soit par l’ouverture pendant l’incarcération des droits sociaux auxquels elle aurait pu prétendre avant l’incarcération, soit par des prestations particulières lui donnant droit aux mêmes minima pendant toute la durée de son incarcération et l’articulation de sa sortie.