Les quinze millions d’habitants qui peuplent le Cameroun sont soumis depuis dix-sept années maintenant au très ferme président Paul Biya, ami notoire de Jacques Chirac. Depuis dix ans, la mauvaise gestion du pays, la dévaluation du franc CFA, et les programmes d’ajustement structurel, ont conduit le Cameroun à un appauvrissement catastrophique (les fonctionnaires ont, par exemple, perdu 75% de leur pouvoir d’achat) ; enfin la corruption déjà bien implantée n’a fait que s’accroître.
Le passage du régime totalitaire à une dictature « light », a conduit à l’édiction de la loi du 19 décembre 1990, qui reconnaît, enfin, le regroupement associatif, mais n’autorise toujours pas les ONG à recevoir dons ou subventions si elles ne sont pas reconnues d’utilité publique – seulement quatre associations sanitaires ont à ce jour reçu cet agrément. Ces structures sont, en effet, assimilées à un contre-pouvoir dangereux par les autorités. Les bailleurs de fonds ne peuvent donc pas soutenir les associations, exception faite de la coopération allemande (GTZ) qui dès 1993, pressentant la nécessité d’une action sanitaire, a souhaité malgré tout démarrer un projet « santé sexuelle des jeunes et des adolescents » avec les associations – dont l’association des frères et sœurs unis, AFSU, partenaire de Planet Africa.
Après quatre années de tractations avec le gouvernement, qui souhaitait que le contrôle du projet soit assuré par le Ministère de la santé publique, la GTZ s’est tournée vers les associations pour un appui direct (financement de loyers, équipements, conseils…), à l’insu des pouvoirs publics.
Au Cameroun, il y a deux ans, le Ministère déclarait n’avoir aucun cas de sida sur son territoire ; il y a un an, il ne reconnaissait pas la transmission materno-fœtale ; aujourd’hui la prévalence à VIH est de 5% selon l’ONUSIDA, 6,5% selon le CNLS, 9% selon le centre Pasteur, et 12% selon Médecins sans Frontières. Dans ce contexte de déni de la maladie, il n’est pas surprenant qu’aucune campagne de prévention efficace n’ait été menée. Ce ne sont pourtant pas les structures et le personnel qualifié médical qui font défaut. Malheureusement pour la très grande majorité des camerounais l’accès aux soins est payant, le coût des services, exorbitant, est basé sur le pouvoir d’achat d’il y a 10 ans (entrée des hôpitaux, « motivation du médecin », médicaments, chambre…) et ceux-ci en sont exclus.
Dans ce pays où l’on a démontré la transmission du virus du singe à l’homme et découvert des sous-types tels que le O ou le N, certaines vedettes françaises de nos hôpitaux mènent une course effrénée au prix Nobel : en échange d’une boîte de paracétamol, ils bénéficient pour leur recherche d’un véritable réservoir de malades précaires donc dociles. (cf. essai Presica dans le prochain numéro d’Action ou Conceptrol dans le prochain numéro de Protocoles). Act Up-Paris fera tout pour renforcer les soins et les droits des personnes atteintes inclues dans ces protocoles et dénonce le ministère de la santé publique camerounais pour son incompétence et son inaction depuis 1985.