Six mois après notre article sur les testeurs de drogues (Action n°59), nous vous proposons de découvrir plus en détail d’autres outils de dépistage de produits stupéfiants.
Le testing, c’est quoi ?
Depuis longtemps, c’est un outil utilisé par des usagers de drogues avertis pour informer et dialoguer avec d’autres usagers, des risques qu’ils peuvent courir en consommant certains stupéfiants coupés avec n’importe quoi. Le testing consiste à effectuer un test rapide sur un prélèvement infime pour confirmer ou non la présence de principe actif de certaines familles de drogues. Le réactif s’appelle Test de Marquis, c’est un mélange de 90% d’acide sulfurique et de 10% de formol. Sa particularité est d’avoir une réaction colorée immédiate en présence de chacune des différentes molécules de la famille des amphétamines.
Réactions colorées du Test de Marquis :
– Pour l’ecstasy, métamphétamine, il réagit violet-pourpre immédiatement et vire en 1 à 2 secondes au noir.
– Pour le speed, amphétamine, il réagit jaune d’or immédiatement et vire en 1 à 2 secondes à l’orangé.
– Pour le 2CB, la seule amphétamine légèrement hallucinogène, il réagit vert. Pour certains opiacés il réagit par des traces rouges vifs.
Le testing ça sert à quoi ?
Il ne s’agit en aucun cas d’une analyse mais seulement d’un dépistage, nombre d’usagers l’on bien compris maintenant. Le testing peut seulement confirmer la présence de principes actifs connus pour leur qualité psychoactive, sans pouvoir se prononcer sur le dosage. Il ne permet en aucun cas de révéler de façon exhaustive la liste de tout les composants. On peut se demander à quoi ça sert de déceler une substance si l’on ne peut pas savoir dans quelle proportion elle est présente ? Après des années d’expériences, le véritable but et le coté novateur du testing, réside surtout dans la rapidité et la qualité avec laquelle s’instaure un dialogue permettant une éducation entre un usager et son pair.
Seule une analyse faite à la demande d’un tribunal ou sur prescription d’un médecin, effectuée dans un des 31 laboratoires de toxicologie agréés, permet d’établir scientifiquement et légalement la liste de toutes les molécules présentes dans un échantillon.
Le testing et la prohibition
C’est la connaissance de certains symptômes qui nous permet de dire à des amis » tu crois pas que tu devrais ralentir, tu y va trop fort ! « ; ce que l’épidémie de sida à démontré, en valorisant les pratiques de prévention primaires. En France, l’Etat a choisi d’interdire la libre parole sur les effets recherchés des drogues en terme neutres mais objectifs, et sur leurs risques encourus, les nouveaux usagers, inexpérimentés et pas encore admis dans des milieux plus informés, ont comme seul recours d’information la roulette russe : » tant pis j’essaie, on verra bien ce qui se passe ! « . C’est encore un effet pervers directement causé par la prohibition.
Le testing et les usagers de drogues
Sur un stand de Médecins du Monde, on informe simplement des risques encourus, sans jamais pouvoir indiquer à l’usager qu’un autre produit serait nettement plus approprié à sa recherche et surtout beaucoup moins dangereux ! A l’heure actuelle, le testing nous prouve à quel point de jeunes usagers ne sachant où s’informer sur les drogues et leurs effets et risques, sont prêts à prendre des risques non évalués. Personne n’a pu leur dire : » Si tu cherche tel effet, alors commence par essayer plutôt tel produit comme ça… fait attention à… ne fait surtout jamais… sinon tu risques de… bonne soirée!… tu peux revenir nous voir pour nous dire comment ça c’est passé avant de tout de suite aller chercher plus fort ! « .
Le testing et le savoir
Après trente ans de Loi 70, répressive et aveugle, c’est le savoir pratique et culturel des usagers qui ne peut pas être transmis. L’État semble voir dans la transmission de ce savoir d’usager un risque de surconsommation. Au contraire, les jeunes usagers éduqués, informés et guidés ont toutes les chances de ne pas reproduire ce genre de comportement.Tant que l’article L.630 réprimera des associations d’usagers ou autres partis politiques pour une incitation non-démontrée, de nombreux usagers continueront de prendre des risques incontrôlés.
Le testing et la loi
Depuis le mois de décembre, le dossier de la reconnaissance du testing comme outil de prévention est sur le bureau de Jospin. La première mouture a été faite essayant d’associer ce dossier à celui, tout aussi délicat, de la reconnaissance des Free-party. Le ministère de l’Intérieur et celui de la Justice ont alors refusé de signer. A l’heure actuelle tout les usagers de drogues, attendent un signe de reconnaissance pour un outil de réduction des risques innovant en France et qui a fait ses preuves depuis longtemps chez nos voisins.
Le testing et ses limites légales
En fait le procédé du testing est utilisé en France depuis longtemps par la brigade des stupéfiants et les douanes. Ils utilisent évidemment du matériel fabriqué par un laboratoire industriel de renommée internationale, le laboratoire Merck.
Merck est une firme très ancienne. Au lendemain de la Première Guerre Mondiale, peu de temps après avoir déposé le brevet de la molécule d’ecstasy, une scission s’est produite entre sa filiale française et allemande. La multinationale Merck a coupé depuis toutes relations avec cette filiale allemande, Merck KGaA basée à Darmstadt. Elle en parle comme des fabriquants de matériel peu recommandable. Or, justement c’est ce laboratoire qui fabrique la valise de tests pour stupéfiants utilisée par la brigade des stupéfiants et les douanes. Ce matériel sert donc à des fonctionnaire pour éventuellement mettre en garde-à-vue un usager de drogues.
L’Agence du Médicament – service des laboratoires et contrôles, département des réactifs – nous a indiquée après recherches, qu’aucune demande d’Autorisation de mise sur le marché ou d’agrément n’a jamais été déposé pour ce produit. Quel est donc la valeur des poursuites engagées à partir d’un contrôle effectué sur un matériel non-agréé par des inspecteurs non-agréés ?