A l’occasion de la sortie du livre Médecin chef à la prison de la Santé de la docteur Vasseur, l’administration pénitentiaire s’est empressée d’organiser une journée » portes ouvertes » où elle a convié la presse à filmer en toute liberté la prison de la Santé (mais non les détenus). Act Up-Paris ne peut que se réjouir qu’enfin une médecin rompe le silence qui entoure le système de soins et les conditions de détention dans les prisons françaises.
Act Up-Paris n’a jamais eu de cesse de dénoncer les conditions d’accès aux soins des détenus séropositifs ou malades du sida. Si ce qui est dit par Madame Vasseur est valable pour la Maison d’arrêt de la Santé, il serait souhaitable que d’autres médecins, surveillants, intervenants extérieurs, disent également ce qui se passe dans d’autres prisons.
Qui parle des détenus séropositifs dont l’état de santé est incompatible avec la détention ?
Qui dénonce l’incompatibilité des trithérapies avec les horaires des repas et de travail, pour ceux qui peuvent travailler pour quelques francs ?
Sans parler de la qualité de la nourriture, de la cherté des compléments nutritionnels ou de l’achat de produits frais dont les séropositifs ont besoin.
Sans oublier les produits d’hygiène de première nécessité renouvelés au bon gré de l’administration pénitentiaire, les 3 douches par semaine réglementaires qui ne sont pas appliquées dans tous les établissements pénitentiaires.
Comment peut-on vivre sa maladie dignement dans la promiscuité des cellules lorsque l’on a des diarrhées et que l’on doit faire ses besoins au vu de ses codétenus ?
Qui parle de l’Hôpital carcéral de Fresnes où les pratiques médicales et pénitentiaires se confondent au détriment des détenus hospitalisés ?
Qui parle de la réforme nécessaire des grâces médicales pour les personnes en fin de vie ou atteintes de pathologies graves ?
Qui parle des problèmes des usagers de drogues qui reçoivent un traitement de substitution selon le bon vouloir du médecin ?
Aujourd’hui, l’administration pénitentiaire assure mettre tout en œuvre pour une amélioration des conditions de vies de détenus.
Pourtant, nous savons qu’au quotidien les améliorations sont inexistantes. Aujourd’hui encore, la confidentialité des dossiers médicaux est bafouée par les membres de l’administration ; de nombreux détenus séropositifs sont stigmatisés ; les violences et brimades sont courantes. La loi de 1994 a certes amélioré la dispensation des soins en prison. Elle n’a pourtant pas permis de changer profondément les conditions de détention.
La docteur Vasseur a dénoncé des conditions de vie indignes et pourtant réelles. L’Administration Pénitentiaire a beau jeu de réfuter ce témoignage, sa gêne laisse entrevoir la réalité des faits.
La docteur Vasseur parle, et d’autres parleront peut-être. Mais quand les détenus pourront-ils eux-mêmes témoigner et surtout être entendus ?