Le dispositif de l’aide à domicile pour les séropositifs est totalement défaillant. Il menace même de disparaître si les malades et les associations ne se mobilisent pas pour défendre une prestation de qualité.
Depuis 1998, Act Up-Paris reçoit des plaintes toujours plus nombreuses de séropositifs. Les critères d’inclusion et de maintien dans le dispositif de l’aide à domicile se sont transformés sans qu’aucun texte officiel ne modifie légalement les conditions d’attribution de la prestation.
Ces nouvelles pratiquent visent à diminuer quantitativement et qualitativement les prestations sans aucune concertation avec les malades, sans tenir compte de leurs besoins. Pour aboutir à ces réductions, tous les moyens sont bons : transgression du secret médical et pressions diverses. Depuis deux ans, les responsables de la coordination parisienne – qui ne font pas partie du corps médical – se livrent ainsi à un interrogatoire auprès des malades afin de déterminer le nombre d’heures qui leur sera attribué dans le cadre de l’aide à domicile. Ils demandent aux malades de leur communiquer taux de CD4, de CD8, la charge virale, les traitements, les infections opportunistes, etc… Ces responsables outrepassent leur fonction et ne sont pas qualifiés pour se livrer à un tel interrogatoire. Ils n’ont aucune compétence pour juger de l’état de santé d’une personne. Par ailleurs, aucune garantie n’est donnée quant au stockage et à la confidentialité de ces données. De plus, les malades qui font valoir le respect du secret médical et qui refusent de répondre au questionnaire sont exclus du dispositif.
Outre ces interrogatoires, le malade et son entourage subissent des pressions de tout genre. Ainsi, à Paris un malade à été contraint de participer aux tâches accomplies par son aide à domicile sous peine d’exclusion. On a voulu forcer la mère d’un malade paraplégique, elle-même handicapée et âgée, à se substituer bénévolement à l’aide à domicile, afin de gagner quelques heures par semaine. Dans les Hauts-de-Seine, on signale à un malade militant à Act Up que, puisqu’il est capable de s’impliquer dans une association, il peut bien passer le balai chez lui.
La qualité de la prestation est de surcroît déplorable, ce dont attestent de nombreuses plaintes. La formation, les revenus et le statut des personnes chargés de l’aide à domicile sont insuffisants au regard de ce qu’exige une telle prestation. Ce sont très souvent les malades eux-mêmes qui doivent former les aides sur le sida et sur les problèmes spécifiques d’hygiène ou d’alimentation.
La situation est à ce point intolérable que les malades en viennent à renoncer l’aide à domicile. Ainsi, en laissant s’installer ces pratiques et en négligeant totalement la qualité du service rendu, les administrations sanitaires, DGS en tête, condamnent le dispositif de l’aide à domicile, pourtant indispensable aux malades.
La commission Droits Sociaux d’Act Up-Paris organise une réunion des responsables de toutes les associations et institutions concernées (associations de malades, associations prestataires et DGS). Il s’agit, dans l’urgence, de suspendre les pratiques actuelles et de redéfinir les bases d’un véritable dispositif d’aide à domicile. Les responsables des associations prestataires des Hauts-de-Seine et de Paris se sont engagés à suspendre les interrogatoires médicaux et à maintenir les volumes horaires des aides tant que cette réunion n’aura pas lieu.
Celle-ci doit s’organiser autour des principes suivants :
– L’aide à domicile s’adresse à toutes les personnes infectées par le VIH. La simple mention du 100% sur une carte de sécurité sociale suffit donc pour être inclus et maintenu dans le dispositif. La possibilité du recours à cette prestation doit être connue de toutes les personnes séropositives. Actuellement, la permanence Droits Sociaux d’Act Up-Paris informe chaque semaine de nombreuses personnes ignorante de l’existence de ce dispositif. Les pouvoirs publics doivent assurer une information massive auprès des intéresséEs.
– Les séropositifs et les malades doivent être représentés à tout les niveaux de décision : auprès des comités de coordination, auprès des DDASS, auprès des associations prestataires. Un cahier des charges précis doit être rédigé conjointement, afin de déterminer exactement ce qu’un malade est en droit d’attendre de ce dispositif.
– Le calcul du volume horaire de l’aide à domicile doit reposer sur les besoins réels des bénéficiaires, tels qu’ils les expriment, et non sur l’interprétation subjective d’un interrogatoire. Il faut donc établir une grille précise, que le malade remplirait avec le coordinateur.
– Enfin, une formation de qualité, spécifique au VIH, doit être mise en place pour les aide à domicile. Leur statut et leurs revenus doivent être revalorisés en conséquence.