Le 6 mars, le journal Le Monde annonçait, par la voie de son correspondant aux Nations Unies, que l’ONU lançait une campagne en faveur des médicaments génériques.
«Le secrétaire général de l’ONU a décidé de lancer une campagne hautement politique en faveur de l’accès aux médicaments génériques contre le virus VIH-sida dans les pays du sud. Kofi Annan entend, selon ses proches, profiter de l’offre, faite en janvier, de la société pharmaceutique indienne CIPLA de fabriquer des médicaments génériques pour être distribués à des prix réduits aux personnes affectées par le VIH dont 90 % vivent dans des pays en voie de développement. Le secrétaire général veut accorder désormais une une priorité absolue à la question de l’accès aux médicaments et d’assumer le leadership politique et moral de cette lutte contre le sida.»
Un mois plus tard, après avoir rencontré six des principales compagnies pharmaceutiques mondiales, le Secrétaire Général des Nations Unies change de ton. Dans une déclaration publiée le 5 avril, Kofi Annan a précisé:
«L’industrie pharmaceutique joue un rôle crucial. Nous devons associer les encouragements à la recherche et l’accès aux médicaments pour les pauvres. La protection de la propriété intellectuelle est essentielle pour mettre au point les médicaments, vaccins et produits diagnostiques nouveaux qui sont nécessaires de toute urgence pour la santé des populations les plus pauvres du monde. L’ONU soutient pleinement l’accord sur les ADPIC – y compris les clauses de garantie qui y sont intégrées. Toutefois, la solution n’appartient pas exclusivement aux compagnies pharmaceutiques.»
Pour qui sait interpréter le langage diplomatique, il s’agit d’une pure volte-face. Comme la directrice de l’OMS — qui se rétractait il y a peu après avoir soutenu le camps de l’Afrique du Sud contre les 39 compagnies pharmaceutique qui l’attaquait devant le tribunal de Pretoria, Kofi Annan vient de retourner sa veste.
Dans le même temps, l’OMS et l’OMC se rencontrent en catimini a Oslo pour négocier avec les mêmes laboratoires quelques accords ponctuels de concession de licence volontaire, se préparant ainsi a mettre un point final aux remises en question des accords TRIPS.
Ces mêmes accords ont pourtant fait l’objet d’un rapport de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, qui s’interrogeaient sur leur compatibilité avec les droits de l’homme.
Act Up-Paris veut pourtant prendre Mr Kofi Annan a la lettre. Parce que nous voulons croire a son engagement en faveur de l’accès aux médicaments génériques, parce que nous espérons encore que le plus haut dignitaire des Nations Unies se place au dessus des pouvoirs financiers et de leurs intérêts commerciaux, parce que nous ne pouvons penser qu’il se soit si vite déleste du poids de l’appel de millions de personnes atteintes, nous l’invitons solennellement a venir infirmer nos craintes devant une assemblée représentative des personnes infectées d’Afrique engagées dans le même combat, en soutenant par sa participation hautement symbolique le Sommet pour l’accès aux génériques, organisé par les ONG à Ouagadougou.