L’épidémie de sida touche de plus en plus les femmes. Elles représentent 55 % des personnes infectées dans le monde, soit plus que les hommes, et 30 % en France. Pourtant, nous sommes toujours aussi peu prises en compte, tant dans le domaine de la prévention que du médical ou des droits sociaux. Cette épidémie est pensée au masculin.
Il y a ainsi trop peu de campagnes de prévention à destination des femmes. Le fémidon, alternative au préservatif «classique», est toujours aussi cher et peu disponible. En ce qui concerne la recherche, les femmes sont quasiment absentes des essais de phase I ou II, à un stade où l’on teste la toxicité et l’efficacité d’un nouveau produit. Elles ne sont représentées, dans une proportion encore insuffisante, que dans les essais de phase III, à un stade plus avancé de la recherche. Très peu d’essais envisagent les différences hommes-femmes comme pertinentes. Résultat : une fois que leur distribution est autorisée, les traitements que l’on donne aux femmes n’ont pratiquement pas été testés sur elles. Qu’importent les différences de poids ou les effets secondaires spécifiques : les femmes auront à vivre avec, alors que des essais mieux pensés auraient permis de mettre à jour les problèmes et d’y chercher des solutions. Le monde de la recherche sida commence à peine à s’ouvrir aux problèmes féminins. Ainsi, l’Agence Nationale de Recherche contre le Sida (ANRS) vient d’ouvrir une cellule spécifique, où la commission femmes d’Act Up-Paris sera représentée. Mais le retard à rattraper est énorme Les inégalités se prolongent aussi dans le domaine social. Le système d’attribution des minima sociaux et des allocations, ainsi que celui de la Sécu restent patriarcaux et exposent les femmes à une perte totale de ressources ou de prise en charge sociale propres. Alors même que les problèmes spécifiquement féminins, tant médicaux que sociaux, s’accumulent, les réponses et les solutions restent trop peu nombreuses. Nous ne pourrons les envisager qu’en devenant visibles, en faisant valoir nos différences auprès de nos médecins, du milieu de la recherche, des institutions sociales, ou encore des milieux féministes traditionnels, qui ont trop longtemps négligé la lutte contre le sida. Ce que les hommes homosexuels ont pu conquérir, nous devons aussi l’obtenir, être conscientes que les femmes séropos sont doublement discriminées, mettre tout en oeuvre pour nous organiser et exiger nos droits. La suite de ce numéro d’Action = Vie : Inégalités hommes-femmes.