Il était temps que la vapeur s’inverse : les enjeux de santé, et donc les intérêts des malades viennent de prendre le pas sur les interêts commerciaux des multinationales. Désormais, le dogme du monopole des compagnies privées sur les produits vitaux que sont les médicaments ne fait plus force de loi.
Les gouvernements sont à présent libres de produire et d’importer des versions génériques des médicaments sous brevets dont ils ont besoin. En déclarant que «chaque membre [de l’OMC] a le droit d’accorder des licences obligatoires et la liberté de déterminer les motifs pour lesquels de telles licences peuvent être accordées», les 142 Etats membres ont établis sans ambiguïté la primauté de la santé sur le profit, indépendamment même de situations d’urgence nationale.
A Doha, les pays en développement ont prouvé leur détermination. Menée par les pays africains, une coalition de plus de 80 pays en développement a contraint les pays riches à des concessions clefs, en dépit des pressions ou des manipulations exercées par les Etats-unis, la commission Européenne, le Japon et la Suisse pour diviser leur groupe.
Désormais, les pays qui appliqueraient des pressions ouvertes ou des sanctions bilatérales contre des pays pauvres cherchant à améliorer l’accès aux médicaments s’exposeront à la condamnation des Membres de l’OMC.
Cependant, la victoire n’est pas totale : toutes les dispositions prévues par les accords TRIPS n’ont pas été clarifiées à Doha. L’indispensable reconnaissance pour les pays producteurs de médicaments sous licence obligatoire de la possibilité d’exporter vers les pays les plus pauvres qui ne dispose pas de capacité de production a été refusé par les pays développés.
La majorité des malades du sida, et la majorité des malades en général, vivent dans des pays qui ne sont pas en mesure de produire eux-même les médicaments dont ils ont besoin. L’exportation à partir des pays émergeants est donc une nécessité. Or, si la Déclaration des Ministres du Commerce reconnaît l’existence du problème, les pays riches ont cependant entravé une prise de position indispensable. De fait, la déclaration de Doha ne lève pas cette barrière.
Contre la pression des pays riches et des compagnies pharmaceutiques le combat doit continuer afin de terminer le travail inachevé lors de cette conférence – des millions de vies sont en jeu.
Act Up-Paris exige que l’OMC clarifie lors de la prochaine réunion du Conseil de TRIPS le fait que rien dans l’Accord sur la propriété intellectuelle ne doit entraver l’exportation de médicaments abordables.