Guillaume Dustan va bientôt publier un nouveau livre. Il semble utile de préciser deux ou trois faits.
Quand Guillaume Dustan a publié Dans ma chambre, son premier roman d’autofiction, c’est une nouvelle voix qui est apparue, celle d’un séropo après l’arrivée des trithérapies. Dans le cadre de cette prise de parole de séropos, Dustan a pris un biais très particulier, celui du déni de la maladie, développé avec la fameuse théorie du bareback, c’est-à-dire l’incitation à la baise sans capote. Act Up-Paris se devait de réagir pour reprendre cette parole alors laissée à l’abandon.
Trois livres de Dustan plus tard, c’est chose faite. Son discours de barebacker a encore une influence. Nous ne le nions pas. Pourtant, nous avons le sentiment de passer trop de temps sur le cas Dustan. Et revenir une énième fois dessus reviendrait peut-être à réduire la visibilité de notre combat contre le relapse à une seule cible, Dustan. Alors que nous savons tous que les causes du relapse sont très loin de se limiter à la publication de ces livres.
L’activité de la commission Prévention d’Act Up-Paris l’a prouvé, agir dans le domaine de la prévention est bien plus complexe : faire pression sur la DGS, sur Jospin et le service d’information du gouvernement, mobiliser les associations de jeunes homos sur le sida, informer sur la syphilis, etc. La commission Prévention s’est créée et elle a travaillé. Nos affiches « irresponsables » ont largement été reprises par les médias « communautaires ». Notre texte dans Le Monde, co-signé avec des associations étudiantes prouve en outre que notre discours passe, bien que parfois au forceps, auprès des associations de jeunes. Et ce sont eux qui peuvent constituer un relais efficace de notre discours sur le terrain.
Nous sommes conscients qu’il ne faut pas relâcher la pression sur tous les discours révisionnistes du sida. Si l’on devait réinviter Dustan sur un plateau télé ou dans un journal pour parler du sida, alors, il faudrait lui répondre.
Dustan a réussi une chose : à mobiliser l’énergie d’Act Up-Paris, au détriment d’un travail de réflexion plus large. Pour certains militants d’Act Up-Paris, il semble plus urgent et peut-être plus important de poursuivre une réflexion sur la sexualité des séropos et leurs problèmes de prévention. Dans l’enquête presse gay 2001, ce sont les moins de 24 ans et les 35-44 ans qui se sont exposés le plus souvent au virus. La commission prévention d’Act Up-Paris a déjà beaucoup produit de discours et travaillé sur la question des moins de 24 ans, autrement dit «les jeunes». Mais qu’en est-il de leurs aînés ? Autrement dit, ceux qui ont l’âge de Dustan…