Le principe de rétrocession s’applique à tout médicament rendu disponible dans les officines de ville. Ce principe prévoit que la dispensation par les pharmacies d’hôpital cesse dès que le médicament devient accessible en ville. Jusqu’ici, seuls les médicaments VIH ont été exemptés de cette règle, en raison de la sévérité particulière de la maladie, et ont acquis la double-dispensation, situation exceptionnelle s’il en est.
L’un des traitements de référence contre l’hépatite C est une bithérapie Peg interféron/ribavirine. Or le Peg interféron est exclusivement disponible en pharmacie d’hôpital, et la ribavirine n’est dispensée qu’en officine de ville. Ces deux médicaments doivent être disponibles dans les mêmes circuits, à la fois en ville et à l’hôpital. Nous sommes bien sûr très favorables à la possibilité d’obtenir les médicaments en pharmacie de ville. Mais il faut défendre le libre choix entre la pharmacie de ville et la pharmacie hospitalière.
De très nombreux patients séropositifs prennent aussi un traitement contre les hépatites. Nous avons donc organisé un zap phone fax, le 17 mai 2002 contre la DGS pour exiger la mise en place de la double dispensation de l’interféron et des traitements contre les hépatites.
De trop nombreux patients connaissant l’exclusion sociale sont boutés hors des officines parce qu’ils ne présentent pas toutes les garanties de solvabilité que réclame le pharmacien. La délivrance hospitalière garantit aux personnes les plus vulnérables une réelle prise en charge ; le dossier du patient étant suivi par les structures d’assistance sociale de l’ hôpital. L’impératif commercial de l’officine de ville ne peut pas garantir ce suivi.
A l’exclusion sociale s’ajoute l’exclusion thérapeutique. Il faut penser, par exemple, à toutes les personnes qui s’inscrivent dans une politique de substitution des drogues, souffrant d’une hépatite, et pour qui la mise à disposition de la ribavirine en pharmacie d’hôpital est une absolue nécessité. Si elles ne présentent pas immédiatement au pharmacien de ville des garanties financières ou les documents administratifs justifiant leur prise en charge, elles ne pourront pas recevoir de traitement.
Le principe de rétrocession a un avantage : il n’autorise plus les laboratoires à dicter leurs prix directement aux hôpitaux ; ils devront se conformer aux règles d’achats des officines. Mais cette question devrait être réglée par un autre moyen que des mesures qui menacent la qualité des soins. C’est une médecine à deux vitesses intégrée à notre ordinaire que promet l’application du principe de rétrocession aux traitements contre l’hépatite. Du même coup, la fracture sociale, économique, thérapeutique sera accrue.
Un décret de modification de la dispensation des médicaments qui devrait aboutir prochainement nous laisse dans l’incertitude face à ces questions. Va-t-il répondre à nos exigences en admettant la double dispensation pour les traitements contre les hépatites, ou au contraire remettre en cause ce principe pour les médicaments VIH. S’il est remis en cause, nous assisterons à un nivellement par le bas de la qualité des soins. On devrait au contraire être en droit de solliciter la généralisation de la double dispensation à tous les médicaments, au titre de la qualité de vie du patient. On nous affirme que ce décret devrait plutôt nous servir, mais nous restons méfiants, ne sachant comment interpréter l’assertion de la DGS selon laquelle « toute situation est évolutive ».
Pour l’heure, le principe de rétrocession et de dispensation simple en officine de ville menace le patient dans ses droits. Il ne propose pas d’économie significative pour l’Etat, il ne fait que masquer les problèmes de gestion. Il ne les résout pas.
Nous sommes résolus à défendre, si besoin est, le maintien de la double dispensation pour tous les traitements VIH. Act Up-Paris exige la mise en place de la double dispensation pour tous les traitements contre les hépatites.