Le Collectif Europe & Médicament, dont Act Up-Paris fait partie, rassemble des associations de maladEs, des revues médicales indépendantes, des associations de défense des consommateurs, et s’est créé pour dénoncer le projet de réforme de la directive européenne sur la publicité et l’information relatives aux médicaments.
Ce projet consiste à assouplir les interdictions de publicité sur les médicaments, permettant ainsi à l’industrie pharmaceutique de faire la promotion de leurs molécules, et donc d’optimiser leurs profits. Le lobby de l’industrie pharmaceutique s’est ainsi appuyé sur Erkki Likkanen, commissaire européen en charge des entreprises et de la société de l’information, pour bâtir un projet sur mesure.
Il s’agit entre autres :
– d’admettre la publicité grand public pour les médicaments soumis à prescription (notamment pour les pathologies de diabète, asthme et sida), en autorisant «l’information» des firmes pharmaceutiques auprès des patientEs. En fait, il s’agit de permettre une information promotionnelle auprès des maladEs, qui sera à l’image de ce qui se fait déjà aux Etats Unis, souvent incomplète, évitant soigneusement de mentionner les effets secondaires des traitements.
– d’accélérer le processus d’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM). En soi, on pourrait s’en féliciter, espérant ainsi obtenir plus rapidement les molécules dont nous avons besoin. Dans les faits, il s’agit de réduire de 210 à 150 jours le délai d’examen des dossiers de demande d’AMM, ce qui pourrait conduire à bâcler l’évaluation des produits, cette dernière se faisant dans un temps incompressible. Il faut maintenir le délai de 210 jours, et réserver la procédure accélérée aux situations exceptionnelles, c’est-à-dire aux médicaments constituant un progrès thérapeutique significatif attendu et demandé par des maladEs n’ayant pas d’autres alternatives thérapeutiques disponibles.
– de supprimer le renouvellement quinquennal des AMM. Actuellement, une AMM n’est délivrée que pour une période de 5 ans renouvelable. Or, les agences du médicament ont souvent transformé ce qui devrait être un nouvel examen du médicament et de son usage en simple formalité administrative. L’industrie pharmaceutique réclame donc l’annulation de cette formalité. Pourtant, la réévaluation des effets indésirables en fonction de données nouvelles et d’usage à long terme des traitements est une indispensable garantie de santé publique et de sécurité pour les patientEs.
– de renforcer le processus de reconnaissance mutuelle des AMM européennes. En bref, ce système permettrait à un médicament d’obtenir une AMM dans l’ensemble des pays de l’Union Européenne, dès lors que l’agence nationale du médicament d’un des pays de l’Union, en charge de valider les données scientifiques des produits, donne son autorisation de mise sur le marché. Cette procédure, très intéressante en théorie, est pourtant peu satisfaisante, du fait d’expertises nationales très hétérogènes, et de procédures très opaques pour l’instant. Le risque est que la délivrance de l’AMM soit faite au rabais, au détriment des malades.
En clair, le projet de directive et de réglement européen émanant de la DGE est une offensive massive contre la santé publique et les maladEs, au profit des industries pharmaceutiques. Il est d’ailleurs étonnant que les organismes européens chargés du médicament soient rattachés à la Direction Générale Entreprises de la Commission Européenne, et non à celle de la Santé : c’est faire primer les intérêts commerciaux sur ceux de la santé publique.
Pour résister, nous avons rédigé une soixantaine d’amendements, soumis aux parlementaires européens, pour qu’ils les défendent devant le Parlement : la première lecture de la directive aura lieu les 9 et 10 juillet prochains.