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Indépendamment d’un pourcentage qui l’accompagnerait (et qu’il est impossible de déterminer à l’heure actuelle) un risque reste un risque. Le risque d’être contaminé par le VIH est un risque vital.

Quand on suce une bite sans préservatif, on prend un risque. Quand on lèche une chatte sans digue dentaire aussi. Que ces risques soient minimes ne change rien à l’affaire. Ils existent, et le seul moyen de les éviter est d’utiliser une capote ou une digue dentaire. Il n’y a pas de vaccin, pas d’autres moyens de se protéger.

Les contraintes de la prévention nous sont imposées par la réalité des modes de transmission du virus, et l’absence d’autres outils efficaces que ceux qui sont disponibles actuellement : la capote (utilisée avec du gel pour les sodomies), le fémidom, les digues dentaires ou les carrés de latex pour les cunilingus, les gants pour les fists. En fonction de nos pratiques, nous n’avons pas d’autre choix que d’utiliser ces outils, et d’assumer leurs contraintes, si nous voulons nous protéger et protéger nos partenairEs.

Ces évidences sont aujourd’hui remises en cause. Par les barebackers bien sûr, prônant la prise de risque, comme Guillaume Dustan, qui continue à répandre ses positions nauséeuses et criminelles. Mais Dustan s’est aujourd’hui trouvé un allié objectif auprès de certains acteurs de prévention de… Aides. Au cours des Etats Généraux que l’association a organisés avec Sida Info Service, elle a en effet présenté une série de flyers scandaleux. Au recto, des accroches comme «Sans capotes, plus il y a de mecs, plus il y a de risques», ou «Sans capotes, mieux vaut se retirer avant d’éjaculer». Au verso des «argumentaires» incitant les personnes non pas à se protéger, mais à «réduire les risques» de contamination. Ainsi «Si vous êtes séronégatif et qu’un homme éjacule en vous, vous risquez d’être contaminé par le VIH. S’il se retire avant d’éjaculer, cela réduit le risque de contamination (mais le risque existe quand même !)».

Aides abandonnerait-elle la prévention ? Parce qu’ici, il ne s’agit plus de prévention mais d’information sur des probabilités de contamination : «ceci est moins risqué que cela». Et le postulat de départ est une pratique contaminante («Sans capote…»). Aides aurait voulu les cautionner, elle ne s’y serait pas prise autrement. La capote est évoquée, en petit, au dos, mais elle est intégrée dans cette échelle de risques : «Le préservatif reste le meilleur moyen de se protéger». Or, ce n’est pas le «meilleur» moyen, c’est le seul.

L’ambition de ces documents est donc de nous expliquer comment prendre moins de risques d’être contaminé en baisant sans capote. Comment croire que l’on peut arrêter la reprise des contaminations en diffusant ce genre de message ? Cela revient à donner des arguments à tous ceux qui prétendent que la capote n’est pas fiable. Et jusqu’à nouvel ordre, telle n’est pas la mission des associations de lutte contre le sida.

Par ailleurs, ces flyers participent d’une confusion des genres. On y mélange risques réels de contamination et risques statistiques en affirmant «Sans capote, plus il y a de mecs, plus il y a de risques». Et surtout, on mélange ce qui relève de la prévention sur le terrain, pendant laquelle il est possible d’aborder tous les aspects des contaminations, et la prévention faite avec des brochures ou des flyers. Il est totalement inconscient de délivrer un message type «réduction des risques» sans le moindre discours d’accompagnement.

Nous avons envoyé une lettre à Christian Saout, président de Aides, pour qu’il abandonne ce projet. De sa réponse, et des campagnes de Aides à venir, peut découler un nouveau rapport de force entre Aides et Act Up : si Aides persistait dans cette voie, nous la considèrerions désormais, sur le plan de la prévention, comme un ennemi. On ne peut pas, d’un côté, signer une charte de responsabilité avec les établissements gays, et se comporter en irresponsable dans ses propres campagnes de prévention.