Le sida touche plus de 40 millions de personnes dans le monde. 95% d’entre elles n’ont accès à aucun traitement et sont condamnées à mort. L’impact de l’épidémie représente une catastrophe sans précédent dans les pays en développement : effondrement de l’espérance de vie, délitement des structures familiales, dégradation des terres agricoles et aggravation de la malnutrition, détérioration des systèmes d’éducation et des systèmes sanitaires. Elle touche en priorité les populations les plus vulnérables, et particulièrement les femmes. Ses répercussions économiques et sociales appauvrissent et fragilisent l’ensemble des secteurs publics et privés.
L’ampleur de cette catastrophe révèle l’échec et l’inadéquation des politiques de développement imposées par les pays riches, ainsi que leur responsabilité dans cette évolution. Explosion de la dette extérieure, politiques d’ajustement structurel du FMI et de la Banque Mondiale, privatisation massive de la santé et de l’éducation ont fait le lit de la propagation de l’épidémie. C’est cette logique économique qui a présidé pendant près de 20 ans au refus de soutenir l’accès aux médicaments contre le sida dans les pays pauvres. C’est encore cette logique qui accroît l’incapacité des systèmes de santé à prendre en charge les pathologies chroniques (cancers, diabète, maladies cardio-vasculaires, hépatites, etc.) qui se développent actuellement, et qui sont pourtant souvent mortelles en l’absence de traitements accessibles. Malgré les récurrentes prises de position médiatiques des leaders politiques internationaux et nationaux, le décalage entre les intentions affichées et les politiques menées en matière de lutte contre le sida comme en matière de développement est effrayant : le seuil de 0,7% du PIB consacré à l’aide publique au développement sur lequel se sont engagés les pays de l’OCDE en 1972 est loin d’être atteint, les 10 milliards de dollars annuels promis à la lutte contre le sida en 2001 ne sont toujours pas effectivement engagés. Ainsi, les contributions au Fonds mondial contre le sida, le paludisme et la tuberculose ne permettront la mise sous traitement que de 500 000 personnes d’ici 5 ans, quand 10 millions de séropositifs ont besoin dès maintenant de trithérapies. L’aide publique, limitée, repose d’abord sur le transfert de modèles des pays industrialisés vers les pays en développement et néglige les besoins et l’implication des populations concernées. Ces logiques doivent être inversées, à travers l’instauration de politiques d’aide à long terme, en démultipliant les fonds consacrés à des politiques de développement définies et menées en concertation avec les différents acteurs nationaux. Aujourd’hui, lutter contre l’épidémie de sida, en y consacrant les moyens adaptés, en laissant les États mettre en ?uvre les mesures les plus efficaces localement pour protéger leurs populations, en permettant aux communautés d’exiger le respect de leurs droits et d’obtenir de leurs gouvernements la mise en place de politiques adaptées, est non seulement une nécessité sanitaire mais doit également poser les bases de relations nouvelles entre pays riches et pays pauvres. Dès cette année, Jacques Chirac doit s’engager à respecter le seuil de 0,7 % du PIB pour l’aide publique au développement qu’il s’est fixé à Johannesburg en août dernier, et, compte tenu des moyens à disposition de la France et des engagements pris lors de la réunion des pays membres du G8 à Gênes en 2001, contribuer à la lutte contre l’épidémie de sida dans les pays pauvres à hauteur de 1 milliard d’euros par an. Dès maintenant, le président français doit demander aux États membres du G8 qui se réuniront sous sa présidence en juin qu’ils s’engagent à : – permettre l’accès dans chaque pays à l’ensemble des traitements nécessaires et des outils de prévention ; – promouvoir le principe de gratuité des médicaments pour les pathologies chroniques ; – rendre accessibles aux populations des pays pauvres les innovations thérapeutiques ; – permettre la production, l’exportation, l’importation de produits de santé génériques dans les pays en développement. Parce que le sida impose une autre politique de solidarité internationale, la France ainsi que les autres Etats membres du G8 doivent radicalement changer leurs pratiques.15 avril 2003 : un site internet, www.sida-urgenceG8.org, qui relaie cette campagne a été ouvert. Vous y trouverez le dossier complet d’information.