Le conseil européen des ministres de la Santé se prononcera les 2 et 3 juin prochains sur le Règlement et la Directive concernant le médicament en Europe. Ces décisions valables pour dix ans vont changer nos vies. La présidence grecque de l’Union veut terminer l’examen des textes avant l’élargissement de l’Union en 2004.
Les articles présentés dans ce texte ont été élaborés par le Collectif Europe et médicaments et reprennent ceux du Règlement et de la Directive. Ils seront examinés par le Conseil des ministres de la Santé des 2 et 3 juin 2003, et seront également présentés aux commissaires européens en charge de l’Industrie et de la Santé. Le Collectif défend auprès des différents ministres européens et des CoRePer (Comité des Représentants Permanents des Etats membres) une position très simple : le médicament n’est pas un produit de consommation comme les autres, la logique marketing ne doit donc pas prendre le pas sur sa fonction première, c’est-à-dire thérapeutique.
Au début de l’élaboration de ces textes, il y a plus d’un an, la direction du Commerce, dont émanent le Règlement et la Directive, voulait libéraliser la publicité en direction du grand public pour trois pathologies : le diabète, l’asthme et le sida. La justification en était alors de permettre un «meilleur accès de l’information». Cette proposition, rejetée par le Parlement européen et par le Conseil des ministres de la Santé, ne devrait plus revenir hanter ce texte. L’idée de mieux nous informer n’est cependant pas idiote. C’est pourquoi le Collectif demande que l’ensemble des documents de l’Agence européenne du médicament (EMEA) soient accessibles dans des registres, conformément au règlement européen sur l’accès aux documents, et propose même un accès de ses données sur Internet, comme le fait l’AFFSaPS.
L’une des autres propositions du Collectif concerne les autorisations de mise sur le marché (AMM). Toute nouvelle substance médicamenteuse doit passer par la procédure centralisée, c’est-à-dire que les décisions de l’EMEA sont applicables à toutes les agences nationales. Or, le principe de reconnaissance mutuelle par les États membres est aujourd’hui relativement opaque ; après l’élargissement de l’Union, il concernera aussi des pays qui, à l’heure actuelle, n’ont pas d’agence du médicament. La fiabilité des essais et leur rigueur scientifique s’en retrouveraient tout simplement remises en cause, et derrière ces critères d’évaluation, on trouve les malades. Lorsque, déjà, des essais «rigoureux» montrent un certain nombre d’effets secondaires difficiles à supporter, qu’adviendra-t-il avec une molécule mal testée ?
Actuellement, il n’existe aucun cadre européen réglementant l’usage des médicaments en cours de développement, mais de nombreux pays de l’Union ont une législation propre en la matière, en particulier pour une mise à disposition des molécules avant l’AMM (appelé accès compassionnel), laquelle dépend de la volonté des laboratoires. Or, aucun cadre ne les y contraint : c’est selon leur bon-vouloir. Nous souhaitons introduire dans le Règlement des moyens plus fermes d’application, afin de garantir aux malades en impasse thérapeutique l’accès à des médicaments prometteurs dans leur situation.
Réévaluation quinquennale
Parmi les autres propositions du Collectif, il est un point qui nous paraît primordial à défendre et que nous soutenons très activement : la réévaluation quinquennale de l’AMM. Ce renouvellement ne doit pas être une simple formalité, elle doit prendre en compte toutes les données disponibles et pas seulement celles présentées par les laboratoires. Ce point est à rapprocher de l’article qui devrait permettre le signalement des effets indésirables par les malades auprès des agences responsables de la pharmaco-vigilance. Cela signifierait que les malades aient la possibilité de réclamer aux laboratoires la correction des effets indésirables de leurs molécules, et que leurs demandes soient prises en compte pour décider de la poursuite de la commercialisation des médicaments.Nous réclamons enfin la présence de membres de la société civile au Conseil d’administration de l’EMEA et la présence dans la commission d’AMM de deux représentants par Etat membre, s’exprimant d’une seule voix, comme cela se fait dans d’autres commissions. Nous pensons que cette pluralité entre politiques/représentants administratifs des agences ou experts scientifiques devrait permettre de réduire un tant soit peu l’influence du lobby des firmes pharmaceutiques.
Le collectif défend trois principes simples : des garanties de sécurité pour les citoyens, la transparence des institutions et l’accès à une information fiable. Pour notre part, nous défendons un aspect primordial : l’intérêt des malades.