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Dépistage obligatoire, poursuites judiciaires contre de supposés auteurs de contaminations conscientes, fantasmes lepénistes de «sidatoriums», refoulement des personnes atteintes aux frontières de certains pays, allègement du secret médical en cas de séropositivité d’un membre d’un couple, etc. Les formes de criminalisation des personnes atteintes par le VIH sont nombreuses. Elles ne sont parfois que des idées défendues par des groupes de pression ; elles peuvent être des mesures effectivement appliquées, en France, mais aussi à l’étranger. Dans tous les cas, elles renvoient à l’image d’unE séropositifVE détenteurRICE d’un pouvoir de mort et souhaitant l’utiliser : une image aussi vieille que l’épidémie elle-même.
On pouvait penser que ce fantasme du/de la séropositifVE meurtrierE, encore très présent au début des années 90, avait perdu de son actualité et de sa vivacité. C’était sans compter les vieilles ganaches, toujours les mêmes, qui continuent à l’alimenter : l’extrême-droite, bien sûr, mais aussi l’Académie de médecine, en la personne notamment du professeur Roger Henrion. C’était sans compter l’irresponsabilité des médias, comme 20 ans qui trouve amusant d’écrire qu’il est «suicidaire» de coucher avec unE séropositifVE, ou qui se complaisent, comme Thierry Ardisson, à relayer les discours imbéciles des barebackers. C’était sans compter, enfin, l’arrivée de la droite au pouvoir renforçant l’arsenal répressif contre toutes les minorités et mettant en place une politique qui ne trouve que trois réponses à tous les problèmes de société : l’exclusion, la prison et la répression.
La seule «originalité» dont font preuve aujourd’hui les partisans de la criminalisation consiste à s’approprier abusivement les progrès thérapeutiques. Ils utilisent systématiquement les avancées en matière de dépistage, de traitements prophylactiques ou encore de tests génotypiques pour tenter de convaincre l’opinion publique, ou du moins les politiques, qu’il est absolument nécessaire de mettre en place des mesures spécifiques de contrôle, d’exclusion et d’enfermement des personnes atteintes. Ces progrès thérapeutiques sont le fruit de la lutte des malades et des associations. Nos ennemis utilisent donc nos victoires, non pas pour améliorer la prise en charge des personnes atteintes, mais pour renforcer leur discours de stigmatisation.
Mis à part les nouveautés thérapeutiques, les partisans de la criminalisation ressassent toujours les mêmes rengaines. Le contexte politique les rend pourtant aujourd’hui plus puissants. La preuve, un pas a été franchi en janvier dernier, avec l’article de loi imposant un dépistage obligatoire à toute personne suspectée de viol. Cela rend d’autant plus nécessaire une mise au point générale sur le sujet.