Lundi 22 septembre se tient à l’Assemblée Générale des Nations Unies à New York une session de bilan des engagements pris par les Etats il y a deux ans en matière de lutte internationale contre la pandémie du sida. La France est en rupture avec l’engagement principal pris à l’ONU le 27 juin 2001, qui était d’atteindre les 10 milliards de dollars de contribution des pays riches à la lutte contre le sida dans les pays pauvres. En effet, le gouvernement français n’y a consacré que 50 millions d’euros en 2003, et n’annonce que 150 millions pour 2004. Or, la France représentant 5% du PNB de l’OCDE, la juste part de la France dans ces 10 milliards est de 500 millions d’euros au minimum.
«Le Fonds mondial contre les pandémies devrait rapidement atteindre la masse critique de 10 milliards de dollars», déclarait Jacques Chirac le 22 juillet 2001 au sommet du G8 à Gênes, moins d’un mois après les engagements pris à l’ONU. Au sommet d’Evian qu’il présidait le 1er juin dernier, Jacques Chirac a néanmoins refusé de porter la contribution française à la lutte contre la pandémie au niveau des promesses de 2001, décidant de se contenter de tripler une contribution française au Fonds mondial déjà dix fois trop faible (50 millions annuels au lieu de 500).
Tous les experts de l’ONU, de l’OMS et même de l’Agence Française de Recherche sur le Sida sont pourtant unanimes : il n’est pas possible d’enrayer la progression accélérée de la pandémie moins de 10 milliards de dollars annuels de dépenses. Comme le reconnaissait le président le 16 juillet 2003, «le coût global de l’épidémie l’emporte de très loin sur le coût de l’administration des traitements. En dehors de la France, et d’abord en Afrique, c’est une tragédie décuplée, une lourde menace sur les efforts de développement.
Comment expliquer une telle contradiction entre les discours et les actes ? L’argument budgétaire ne tient pas, dans la mesure où le président affirmait lui-même le 16 juillet : «Nous avons les moyens médicaux et financiers de maîtriser l’épidémie. Nous devons aux victimes du sida et aux générations futures de faire preuve d’esprit de solidarité, afin que le cauchemar d’une maladie mortelle et massive soit enfin écarté. Aujourd’hui, je souhaite lancer un appel solennel aux gouvernements des pays donateurs pour qu’ils fassent preuve, malgré les difficultés budgétaires, de plus de générosité. Ce n’est pas un acte de charité, c’est un acte de responsabilité partagée, contre un fléau mondial». Par ailleurs, le déficit budgétaire de la France étant de près de 60 milliards d’euros en 2003 – principalement dû à l’explosion des dépenses de police et de défense et à certaines baisses d’impôts – on voit mal comment il serait budgétairement impossible à la France d’honorer sa promesses solennelle d’un demi-milliard.
«Aujourd’hui où l’ONU tire le bilan des engagements pris par les gouvernements il y a deux ans en matière de financement de la lutte contre le sida, force est de constater que la France n’a pas tenu ses promesses. Jacques Chirac a fait de beaux discours, mais son gouvernement n’a rempli qu’un dixième de ses engagements. Pour Jacques Chirac, la vie de 40 millions de personnes semble ne pas valoir 0,03% du PNB de la France» commente Khalil Elouardighi d’ACT UP-Paris. «Avec un ami comme le président français, les malades du sida et les pays Africains n’ont guère besoin d’ennemis…».