Entre le médicament et la drogue, où est la frontière ? Entre le thérapeutique et le plaisir, où est la frontière ? Dans les deux cas, ils font appel au fonctionnement fondamental de notre organisme. Parlons en.
Définitions
Le mot drogue, en anglais “drug” est à l’origine la matière première de médicaments vendus ou préparés en officine. C’est aussi une substance dotée de propriétés pharmacodynamiques, utilisables en thérapeutique, mais dont il peut être fait un usage abusif dans des buts non médicaux. Ceci peut conduire à la toxicomanie, état de dépendance physique et/ou psychique à l’égard de la substance ainsi consommée.
A partir du XIXème siècle ce mot désigne une substance naturelle ou synthétique dont la consommation provoque un état modifié de la conscience. Suivant leur effet psychique dominant ces substances se répartissent en 3 grandes catégories.
– les stimulants : cocaïne, amphétamines, nicotine.
– les sédatifs : opiacés (morphine, héroïne), benzodiazépines.
– les hallucinogènes : LSD, cannabis.
Certaines substances ont un effet mixte : l’alcool, d’abord excitant puis sédatif ; la MDMA, à la fois stimulante et hallucinogène.
Dans certains pays, l’alcool et le tabac sont considérés comme des drogues, pouvant provoquer des comportements d’abus et de troubles de santé.
Historique
3.000 ans avant notre ère, des tablettes sumériennes font mention du pavot à opium ! La chimie moderne a permis l’extraction des principes actifs à partir de plantes dont on avait découvert les effets thérapeutiques. En 1808 on extrait la morphine de l’opium, c’est le plus puissant principe psycho-actif de l’opium. En 1859 la cocaïne est extraite après de multiples manipulations de la feuille de coca. En 1898, l’héroïne (opiacé semi-synthétique dérivé de la morphine) commence à être utilisée en médecine. En 1903 apparaissent les barbituriques, ils sont purement synthétiques. A partir de l’éphédra, utilisé en Asie, on isole les amphétamines par modification du principe actif. Pendant la guerre de 1870, la morphine soulage la douleur des blessés. Pendant la première guerre mondiale, la cocaïne aide les pilote de chasse à lutter contre la peur et la fatigue. La deuxième guerre mondiale voit l’utilisation de la cocaïne se généraliser chez les militaires. En 1950, on commercialise les premières benzodiazépines pour un usage médical. En 1960-1970, on extrait de la marijuana le principe actif : le THC.
Pour beaucoup de ces substances, la démarche originelle était la recherche de substances médicamenteuses, mais la recherche à des fins militaires a permis d’en découvrir un certain nombre (méthadone, héroïne, etc.), l’histoire nous montre que leur destination première s’est confortée mais que l’homme s’en est aussi emparé à d’autres fins.
Action sur le cerveau et sur notre comportement
Elles interfèrent avec des mécanismes fondamentaux de transmission de l’information d’un neurone à l’autre, en particulier lorsque ceux-ci utilisent des messagers chimiques : neurotransmetteurs ou neuromédiateurs. Nombre d’entre elles provoquent la libération de la dopamine. Ce mécanisme semble avoir un rôle fondamental dans leur action.
Le mode de consommation et donc la modification de l’absorption du produit dans son métabolisme joue sur l’intensité des effets. Le réseau des neurones en étant stimulé provoque des « effets ressentis » (ce n’est pas forcément la jouissance, cela peut être l’euphorie, l’irritation, la détente, la modification de l’espace temps, etc.) d’autant plus intense et rapide que la substance est fumée ou injectée. Par contre dans le cas d’une substance calmante, telle que l’héroïne celle-ci agit en se fixant sur certains récepteurs comme une clé. Ces récepteurs sont normalement occupés par des neuromédiateurs produits par le système nerveux lui-même. L’héroïne vient mimer l’action de ceux-ci. Ces messagers chimiques internes sont appelés des endorphines (ou morphines endogènes). Leur rôle est de diminuer l’intensité des messages douloureux. Ainsi, dans le cas de l’héroïne, à l’arrêt de sa consommation, si elle est régulière, l’organisme ayant cessé de produire des endorphines, le syndrome de sevrage se traduira par des douleurs intenses et une immense anxiété. Ce mécanisme est démontré également pour les benzodiazépines (utilisés contre l’anxiété ou pour induire le sommeil) et le cannabis. Dans le cas de substances excitantes telles que la cocaïne ou les amphétamines, la libération accrue d’un neuromédiateur appelé noradrénaline stimule les fonctions d’éveil du système nerveux. Quant aux hallucinogènes ils agissent principalement sur le réseau des neurones dont le neuromédiateur est la sérotonine qui joue un rôle très important dans la gestion des informations sensorielles, d’où les effets spectaculaires que ces substances peuvent provoquer.
Glossaire
Amphétamine : par voie buccale ou parentérale, elle a une action sur le système nerveux central. Elle augmente la mémoire, la volonté et l’idéation, elle diminue la fatigue, le sommeil et l’appétit, elle peut également donner lieu à une toxicomanie. Toute une série de molécules dont la structure est proche de l’amphétamine ont été synthétisées.
Analgésique : substance qui diminue ou supprime la douleur sans modification importante de la conscience.
Barbituriques : ensemble de médicaments hypnotiques dérivés de l’acide barbiturique ou malonylurée. En intraveineuse et en anesthésie ils ont une action brève et immédiate. Certains sont utilisés comme hypnotiques, sédatifs, ou comme anticonvulsivants selon l’intensité et la durée de leur action.
Benzodiazépines : groupe de substance dont l’action est essentiellement anxiolytique. A doses élevées elles sont utilisées comme hypnotiques et anticonvulsivants. Elles peuvent perturber la vigilance et la mémoire. Leur usage peut conduire à des actes automatiques et inconscients. La durée de leur prescription est limitée !
Cocaïne : principe actif de la plante Erythroxylon coca. Alcaloïde employé autrefois comme analgésique local. Peut donner lieu à une toxicomanie par voie orale, nasale ou sous-cutanée, peut induire aussi chez les personnes vulnérables des troubles psychotiques de type paranoïa transitoires mais très angoissants.
Dopa : précurseur des mélanines et de la dopamine. La L-dopa est utilisée dans la maladie de Parkinson.
Dopamine : métabolite de la dopa et précurseur de la noradrénaline et de l’adrénaline. Cette substance par voie intraveineuse sert à traiter les états de choc, elle augmente le débit cardiaque et le fonctionnement rénal. Les neuroleptiques agissent en bloquant les récepteurs dopaminergiques.
Endorphines (alpha, béta, gamma) : substances présentes dans le système nerveux central. Elles ont des propriétés semblables aux morphinomimétiques, elles seraient les médiateurs naturels de l’analgésie.
Hallucinogène : qui suscite une hallucination. Phénomène pathologique qui résulte d’une désorganisation psychique, accompagnée d’une « perception sans objet ». La conduite hallucinatoire est caractérisée par une « pseudo-perception » laquelle est perçue comme une réalité visuelle, auditive ou tactile.
Héroïne : chlorydrate de diacéthylmorphine, c’est un dérivé semi-synthétique de l’opium, ayant des propriétés analgésiques et euphorisantes très marquées. N’est plus utilisée en thérapeutique en raison de risque important de toxicomanie.
MDMA : méthylènedioxyméthamphétamine, principe actif de l’ecstasy.
Morphine : principe actif de l’opium (alcaloïde) c’est un analgésique narcotique efficace dans presque tous les types de douleurs.
Neuromédiateurs ou neurotransmetteurs : substances qui permettent la circulation de l’information entre les neurones.
Neurones : cellules nerveuses destinées à conduire ou à transmettre l’influx nerveux. C’est l’élément fondamental du système nerveux.
Noradrénaline : médiateur chimique libéré par la stimulation de fibres post-ganglionnaires sympathiques. Par voie intraveineuse, en perfusion lente, elle sert à traiter des états de choc. Elle peut être utilisée en injection intra-
cardiaque directe.
Sédatif : se dit de tout médicament capable de modifier une activité fonctionnelle exagérée d’un organisme ou d’un système (exemple : sédatif de la toux : antitussif), et de calmer les manifestations douloureuses (sédatif de la douleur : analgésique). On demande à un sédatif de diminuer surtout l’anxiété, la tension émotionnelle ou l’insomnie.
Sérotonine : présent dans la rate, le tube digestif et les plaquettes sanguines. Au niveau cérébral, c’est dans l’hypothalamus que son taux est le plus élevé. Son rôle physiologique serait au niveau des centres nerveux d’agir comme médiateur chimique. Elle est active sur l’appareil cardio-vasculaire. Des antagonistes de la sérotonine sont employés contre les migraines ou comme antidépresseurs.
Stimulant : (en latin stimulus : aiguillon) désigne tout ce qui est propre à déterminer une excitation dans un organisme vivant.
THC : tétrahydroxycannabinol. Hallucinogène, constituant principal du cannabis.