Le 26 septembre lors d’une réunion des préfets, Nicolas Sarkozy a énoncé ses attentes en matière de «lutte contre la prostitution». Nous revenons sur quelques extraits de ce discours, leurs suites et leurs conséquences.
«Ces filles sont des victimes qu’il faut protéger. […] La loi pour la sécurité intérieure permet de les protéger.»
La prostitution est une activité imposable et légale. L’Etat ne saurait lutter contre elle. Quand bien même il s’agirait de lutter contre le proxénétisme, l’emprisonnement et l’expulsion des étrangèrEs ne saurait constituer une protection. Nicolas Sarkozy peut toujours arguer des titres de séjour pouvant être remis aux prostituéEs travaillant sous la contrainte, et qui accepteraient de témoigner contre leur proxénète : il s’agit là d’un chantage ignoble et en l’absence d’un réel système de protection, d’une hypocrisie totale.
«Il faut donc être décomplexé et agir beaucoup plus vigoureusement.»
Ses menaces se sont concrétisées et le harcèlement policier s’est durci. Des insultes aux abus de pouvoir, les exactions des forces de l’ordre sont de plus en plus fréquentes.
«Outre la procédure judiciaire, la loi ouvre une procédure administrative qui permet au préfet de retirer aux prostituées étrangères leur carte de séjour temporaire et de les reconduire à la frontière, et cela indépendamment des éventuelles poursuites judiciaires.»
Là encore, les conséquences ont été immédiates. Le nombre de personnes en rétention interpellées pour racolage a doublé en un mois dans certains centres. Dans une circulaire datée du 22 octobre 2003, «s’agissant du racolage, même dans l’hypothèse où il y aurait une procédure [judiciaire] en cours, [le ministre] demande [aux préfets] de poursuivre l’éloignement jusqu’à son terme», à l’exception de ceux et celles qui porteraient plainte.
On comprend qu’il s’agit ici de court-circuiter le système judiciaire, ce qui doit être analysé au regard des décisions de justice concernant les poursuites pour racolage. En effet, les affaires sont souvent classées sans suite à cause de la caractérisation subjective et imprécise du délit de racolage. Ainsi, le ministre exige donc ni plus ni moins l’expulsion d’étrangèrEs, en situation régulière ou non, au titre d’un délit imprécis et sur la base de l’unique appréciation de la police.
Nicolas Sarkozy connaît pourtant les conséquences sur le terrain de son article de loi contre le racolage, les associations ne cessent de les lui rappeler. Pour celles et ceux qui échappent aux mailles du filet policier, il ne reste que la clandestinité. Résultat : les associations de santé communautaires ne peuvent plus mettre à disposition du matériel de prévention. Les clients prennent un ascendant énorme, ce qui rend de plus en plus difficile la négociation du préservatif. Les tarifs sont divisés par deux ou par trois. Les prostituéEs sont précariséEs et leur santé passe désormais derrière les préoccupations de survie au jour le jour. La peur réelle dans laquelle ils et elles vivent alimente leur méfiance à l’égard des structures institutionnelles et les exclue de fait du système de soins. Sous le prétexte de protéger des victimes, Nicolas Sarkozy préconise l’invisibilisation des prostituéEs, une méthode brutale, absurde et démagogique, au mépris de toute logique de santé publique.
Act Up-Paris exige :
– que Nicolas Sarkozy quitte définitivement la vie politique ;
– la régularisation sans condition de touTEs les sans-papiers ;
– l’abrogation de la loi pour la sécurité intérieure ;
– l’arrêt immédiat des expulsions.