Les femmes sont aujourd’hui en première ligne face à l’infection à VIH. Un suivi gynécologique particulier est nécessaire.
épidémiologie
Les femmes vivant avec le VIH présentent fréquemment des problèmes gynécologiques. Comme pour d’autres pathologies, l’arrivée des trithérapies a permis une régression de ces complications, même si pour la plupart d’entre elles les frottis cervico-vaginaux présentent des anomalies.
La prévalence, la gravité et la persistance des infections à papillomavirus est spécifique chez les femmes vivant avec le VIH. Elles se manifestent sous de multiples aspects, peuvent provoquer des tumeurs bénignes de la peau et de certaines muqueuses et pouvant aller jusqu’au cancer du col de l’utérus. Ce cancer est deux fois plus fréquent chez les femmes vivant avec le VIH. Leur incidence augmente avec la baisse de l’immunité et serait deux fois plus élevée chez les personnes dont les CD4 sont inférieurs à 200. Les condylomes
acuminés, qui sont des tumeurs bénignes semblables à des verrues, se développent au niveau vulvo-vaginal et périanal. Ces condylomes peuvent être soit plans et uniquement visibles par coloration, soit se développer sous forme d’excroissances (acuminés) : ce sont alors des « crête de coq ». 10 % des femmes séropositives présentent ces condylomes ano-génitaux.
prévention
La muqueuse du col utérin (endomètre) est la première barrière de l’organisme féminin. Elle est fragile et constitue une porte d’entrée pour de multiples germes. Les foyers infectieux étant localisés dans le col utérin et dans les trompes, le diagnostic est plus difficile à établir. La prévention des complications passe donc par un dépistage attentif et régulier.
Les infections les plus fréquentes sont dues aux candidoses génitales, du type Candida albicans. Localisées au niveau du vagin, de la vulve et de la région périanale, leur fréquence est directement liée à la sévérité du déficit immunitaire. L’inflammation des trompes, appelée salpingite, est en général plus sévère chez les femmes séropositives, mais provoque des lésions identiques à celles des femmes non infectées par le VIH. Les lésions dues à l’herpès génital sont des ulcérations de la vulve et du périnée. Chez les femmes vivant avec le VIH, l’herpès est récidivant et très difficile à soigner, il est aussi directement lié au déficit immunitaire.
Les infections à papillomavirus humains se manifestent sous de multiples aspects et sont le plus souvent non-apparentes, latentes et très répandues. Ces virus, difficiles à soigner et récidivants, doivent être dépistés régulièrement pour éviter qu’ils n’entraînent un cancer du col de l’utérus. Chez les femmes séropositives, le dépistage de ce cancer est essentiel (examen gynécologique complet annuel avec frottis cervical et colposcopie si nécessaire) quels que soient l’âge et la prise ou non d’antirétroviraux.
causes
L’infection elle-même peut être la cause de dysménorrhées (troubles des règles) en provoquant des saignements plus abondants ou douloureux et parfois même leur disparition (aménorrhées). Mais cette conséquence est plus généralement imputable à la cachexie ou aux problèmes psychologiques. La chute de l’immunité est évidemment un facteur essentiel pour le développement des infections gynécologiques. Enfin, certains antirétroviraux, comme le ritonavir, pourraient provoquer des hyperménorrhées (règles abondantes) induisant ainsi un risque élevé d’anémie.
prise en charge
La consultation gynécologique doit faire partie du bilan initial lors de la découverte de la séropositivité, mais aussi tout au long de la surveillance clinique des femmes vivant avec le VIH.Leur prise en charge gynécologique nécessite une vigilance accrue. Il est recommandé de faire un frottis annuel qui, en cas d’anomalies, doit être complété par une colposcopie et une biopsie. En cas de frottis anormal, une surveillance rapprochée tous les six mois avec colposcopie (endoscopie de l’utérus) est conseillée. Si la situation semble plus sérieuse, le/LA gynécologue proposera soit un traitement immédiat soit des consultations rapprochées.
Le traitement des candidoses génitales est difficile, car ces mycoses sont récidivantes. La prise en charge se fait par l’application répétée de traitements locaux qui, pour être efficaces sont souvent associés à du fluconazole (Béagyne®, Trifflucan®) par voie orale. La prise en charge de la salpingite est la même que pour les femmes séronégatives. Pour l’herpès vaginal, le traitement commence par l’administration d’aciclovir (Zovirax®) et, en cas de manque de résultat, le foscarnet (Foscavir®) peut prendre le relais. Les « crêtes de coq » sont des excroissances, toujours bénignes, qui disparaissent en général d’elles-mêmes.
En cas de dysplasie (organisation de cellules cancéreuses au sein de la muqueuse utérine), aucune méthode traditionnellement utilisée, que ce soit la simple observation, la cryoscopie (utilisation du froid) ou la conisation du col (prélèvement de forme conique d’un fragment de tissus) n’a fait la preuve de son efficacité pour éviter les persistances ou les rechutes. Au contraire, ces récidives fréquentes et les risques de complications empêchent la surveillance du col et la possibilité d’éventuelles grossesses. Les autres techniques utilisées sont la radiothérapie (mise en place d’une source radioactive dans la cavité utérine et le vagin, au contact direct de la tumeur), la cobaltothérapie, la chirurgie et la chimiothérapie dans certains cas. En cas d’échec de prise en charge, l’ablation de l’utérus (hystérectomie totale simple) sera réalisée. Dans des formes plus avancées, une chirurgie plus large est pratiquée et peut être associée à une radiothérapie externe du petit bassin.
Pour les femmes vivant avec le VIH se pose la question des risques et des traitements qu’elles auront à gérer au moment de la ménopause. Leur métabolisme réagit différemment face au virus et face aux traitements. De la même manière que les femmes ménopausées, les femmes vivant avec le VIH, à cause du dérèglement lipidique lié à la prise d’antirétroviraux, perdent leur protection naturelle face aux maladies cardiovasculaires. La question de la prise de traitements hormonaux substitutifs se pose avec d’autant plus d’importance (lire ostéo). Les traitements seraient alors les mêmes que pour les femmes séronégatives, mais prescrits par voie percutanée afin d’éviter les problèmes hépatiques, le foie étant déjà très « sollicité » par les multithérapies.