L’infection au VIH accélère et aggrave les infections VHB et VHC. Et les effets secondaires des deux traitements s’additionnent parfois.
Epidémiologie
Les hépatites virales sont fréquemment associées au VIH. On estime à 30 % les porteurSEs du VHC chez les séropositifVEs au VIH. Ces chiffres varient beaucoup d’une étude à l’autre et selon la population : de 4 à 8 % chez les homosexuels et les bisexuels, de 70 à 90 % chez les usagerEs de drogues injectables. Cette épidémie, annoncée depuis 1995, devrait atteindre son pic le plus haut en 2005. Les progrès enregistrés dans le traitement antirétroviral du VIH et l’allongement de l’espérance de vie des séropositifVEs au VIH rendent encore plus visibles les effets des hépatites. On estime à 50 000 le nombre de personnes coinfectées par le VIH et le VHC. Quant au VHB, 70 % des séropositifVEs VIH ont été en contact avec ce virus, et environ 20 % (voire plus) développent une hépatite chronique, soit environ 30 000 personnes en France.
Le VIH accélère et aggrave l’évolution des infections par le VHC et le VHB.
Pour le VHB, en augmentant considérablement le risque de passage à l’hépatite chronique : de 5 % des cas à 20 %. Certaines études montrent que ce taux peut atteindre 50 % chez les personnes vivant avec le VIH ayant moins de 200 CD4. Le risque individuel est alors 4 à 10 fois plus élevé. Il est arrivé aussi que le virus se réactive chez des personnes « immunisées », les anticorps anti-HBs et anti HBc perdant leur pouvoir de protection avec la chute de l’immunité.
Pour le VHC, en augmentant le risque de passage à la cirrhose dans un délai réduit de moitié. Ce passage se fait dans une fourchette de 7 à 25 ans au lieu de 20 à 40 ans pour une personne mono infectée au VHC et séronégative au VIH.
Prévention et dépistage
L’hépatite C (VHC) se transmet par le sang, c’est pour cette raison que la coinfection VIH-VHC est fréquente chez les usagerEs (ou ancienNEs usagerEs) de drogues injectables. L’hépatite B (VHB) se transmet par le sperme, par la salive, elle est fréquemment rencontrée chez les homosexuels, les professionnelLEs de santé. 10 % des séropositifVEs sont porteurEs de l’antigène HBs, 70 % ont des anticorps. L’hépatite A (VHA) n’est grave que dans un cas pour mille (hépatite fulminante) et ne devient jamais chronique, sa guérison se fait spontanément. Le virus delta (VHD) ne se réplique qu’en présence du virus de l’hépatite B : la coinfection VIH-VHB-VHD se rencontre chez les usagerEs de drogues par voie intraveineuse (3 % environ) . Le pronostic est sévère.
Il existe un vaccin efficace contre l’hépatite A (il faut vérifier qu’il s’agit d’un vaccin inactivé, surtout si le nombre de CD4 est inférieur à 200). Il est sans danger et recommandé chez les personnes non immunisées, coinfectées ou non par le VIH, le VHC ou le VHB, pour le personnel de santé et en cas de voyage en zone d’endémie.
De même, il existe un vaccin efficace contre l’hépatite B, toutes les personnes ayant potentiellement des pratiques à risque et non immunisées doivent être vaccinées, y compris les personnes vivant avec le VIH et les coinfectés VIH-VHC.
Toutes les règles de prévention efficaces pour lutter contre le VIH sont valables pour les hépatites B, C et D et il convient de les réaffirmer.
Prise en charge
Comme toutes les infections virales, les hépatites ont une primo-infection, qui peut être symptomatique (apparition de l’ictère ou jaunisse) et se définit comme hépatite aiguë (ABC). Contrairement au VIH, pour les hépatites virales, la primo-infection peut être curative et ne pas devenir chronique. Si le virus est toujours présent et répliquant 6 mois après la contamination, on entre dans la phase de portage chronique (séropositivité long terme) plus ou moins silencieuse, plus ou moins symptomatique. La phase chronique peut à long terme favoriser l’apparition de maladies opportunistes dans le cas du VIH, et de manifestations extra-hépatiques dans le cas des hépatites virales. Aujourd’hui, les traitements disponibles, antirétroviraux pour le VIH, antiviraux pour les hépatites, en ont modifié le pronostic : les inhibiteurs de protéase, en boostant la restauration immunitaire, ont permis la réversibilité du stade sida, tout comme les interférons péguylés en améliorant la régénération du foie (effet anti-fibrosant) ont permis la réversibilité des cirrhoses. Ce qui autrefois s’appelait des « phases terminales », aujourd’hui, ne l’est plus systématiquement si on bénéficie d’un suivi et d’une prise en charge de pointe.
La prise en charge de la primo-infection nécessite un minimum de repos, voire le traitement d’une possible jaunisse (ictère). Avec l’évolution de l’infection, la fonction de regénération du foie se dégrade, créant des cicatrices « étanches » plutôt que du tissus hépatique « spongieux ». Si le foie continue de fonctionner, la cirrhose est définie comme compensée, et lorsque des complications surgissent, elle est qualifiée de décompensée. Le cancer du foie peut également se développer (lire cancers).
Chez les personnes atteintes d’une hépatite C, il est possible d’obtenir une « guérison », c’est-à-dire l’arrêt durable de la réplication du virus, pour près de 60 % des cas (variable en fonction du génotype du virus et des études). Chez les coinfectéEs VIH-VHC, ce résultat ne serait obtenu que pour 30 % des personnes, il ne s’agit donc plus d’un traitement qui permet d’éradiquer le VHC, mais de le contrôler. Le traitement de référence de l’hépatite C chronique est une association de Peg-interféron et de ribavirine pendant 6 à 12 mois. Les effets secondaires sont très importants pour la plupart des personnes et l’éventuelle nécessité d’un arrêt de travail, ou d’un mi-temps thérapeutique, doit être évoquée avant même d’entreprendre le traitement. Certaines personnes résistent mieux à ces effets et peuvent continuer de travailler, mais il est souvent préférable d’anticiper et d’envisager chaque hypothèse. De la même façon, un suivi psychologique peut être nécessaire.
Dans le cadre de l’hépatite B, il s’agit de contrôler la réplication du virus par un traitement antiviral. Le traitement par l’interféron se révélant décevant, on passe au traitement antiviral. La lamivudine est souvent proposée, mais des co-résistances peuvent se créer. Elle est ainsi souvent associée soit à l’adéfovir soit au ténofovir. Ces deux traitements ont également une action antirétrovirale sur le VIH, qui doit être prise en compte.
Les effets secondaires de ces traitements, parfois très pénibles à supporter, peuvent se cumuler et dans certains cas nécessiter l’arrêt ou la modification des prescriptions, imposant alors des priorités. Elles doivent être le fruit de discussions entre l’équipe médicale (infectiologue, hépatologue, virologue) et la personne vivant avec les virus, et porter sur la nécessité de poursuivre le traitement anti-VIH pour définir le traitement du virus hépatique et réciproquement. Si malgré les traitements, la cirrhose s’aggrave, il faut envisager une transplantation et consulter unE spécialiste.
Pour le diagnostic sérologique et virologique des hépatites, ainsi que le détail du score Métavir à la suite de la biopsie hépatique, se reporter au chapitre consacré aux bilans biologiques en début.