Au mépris des protections et des pratiques en vigueur depuis près de dix ans, Dominique de Villepin rétablit l’expulsion des étrangers séropositifs.
[Communiqué de l’Observatoire du Droit à la Santé des Etrangers (ODSE] – Monsieur K., Tunisien résidant en France depuis l’âge de six ans, est séropositif au VIH et au VHC (virus de l’hépatite C). Le 11 janvier 1995, le ministère de l’intérieur a prononcé contre lui un arrêté ministériel d’expulsion. Du fait de son état de santé et des conséquences qu’entraînerait pour lui une telle mesure, le ministère de l’intérieur l’a assigné à résidence en septembre 2000, bloquant ainsi la mise en œuvre de son expulsion.
Pourtant, le 13 septembre 2004, Monsieur K., aujourd’hui incarcéré, reçoit une lettre de la préfecture de Meurthe et Moselle, l’informant que, «compte tenu de l’amélioration de [son] état de santé et du danger [qu’il peut] représenter pour [ses] proches», le ministère de l’intérieur envisage d’abroger son assignation à résidence, et qu’en ce cas il sera expulsé lundi à sa sortie de prison (voir ci-dessous la copie du courrier).
Nous ne voyons pas quelle amélioration de l’état de santé d’un étranger co-infecté par le VIH et le VHC pourrait rendre possible son renvoi dans son pays d’origine. En organisant ainsi son expulsion, le ministère de l’intérieur met la vie de Monsieur K. en danger.
Par ailleurs, Monsieur K. vit en France depuis l’âge de 6 ans : il appartient aux rares catégories de personnes devant bénéficier de la réforme de la double peine. Cet élément n’est pas non plus pris en compte par l’administration.
Le 15 juillet dernier, un séropositif Camerounais a déjà été expulsé (cf communiqué de presse de l’ODSE).
Depuis plusieurs mois, les tentatives d’éloignement du territoire français à l’encontre d’étrangers séropositifs se multiplient de façon alarmante.
Dans le respect de la loi, l’ODSE demande que l’assignation à résidence de Monsieur K. soit maintenue tant que le ministère de l’intérieur n’a pas abrogé son arrêté d’expulsion.
Texte de la lettre envoyée par la préfecture
PRÉFECTURE DE MEURTHE-ET-MOSELLE
DIRECTION DE LA REGLEMENTATION ET DES LIBERTES PUBLIQUES Bureau des étrangers, de l’Immigration et de la Nationalité
NANCY, le 07 SEP. 2004
Monsieur,
Par arrêté ministériel du 19 septembre 2000, vous avez été assigné à résidence dans le département du Val de Marne à votre sortie du centre de détention de Saint Mihiel.
Le 13 mars 2003, muni d’une convocation pour la préfecture du Val de Marne, vous vous êtes présenté dans mes services dans l’attente du transfert de votre assignation dans le département de Meurthe et Moselle. Le 16 avril 2003, j’ai saisi M. le ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, afin de connaître la suite réservée à votre demande.
Compte tenu de l’amélioration de votre état de santé et du danger que vous pouvez représenter pour vos proches, par lettre du 19 août 2004, M. le ministre de l’intérieur de la sécurité intérieure et des libertés locales m’a informé qu’il envisage d’abroger la mesure de bienveillance dont vous bénéficiez, en l’occurrence votre assignation à résidence.
Par conséquent, si cette décision d’assignation à résidence est abrogée, l’arrêté ministériel d’expulsion du 11 janvier 1995 dont vous faites l’objet reprendra tous ses effets. La mesure d’expulsion sera donc mise en œuvre à votre libération de la maison d’arrêt de Nancy.
En application de la réglementation en vigueur, je vous invite à me faire connaître vos observations en joignant tout justificatif utile, sous un délai de 8 jours à compter de la notification de la présente lettre.
Je vous prie d’agréer, Monsieur, mes salutations.
Le préfet