Les associations réclament que soit examiné avant Noël les capacités d’adaptation du dispositif «Grand Froid» afin de permettre l’intégration des usagers de drogues.
A la suite de l’action menée sur l’évacuation des deux récents squats de Saint Denis et de La Chapelle, et pour ne pas rester sur l’échec de la dernière évacuation, nos associations ont maintenu le front constitué autour de cette situation de crise. La MILDT (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie) a accepté de répondre à cette volonté en réunissant lundi dernier les protagonistes associatifs afin de construire des perspectives.
Didier Jayle, président de la MILDT, et les membres de son équipe ainsi que Marie-Annick Darmaillac, chef de projet toxicomanie à la Préfecture et à la Préfecture de Police de Paris, ont ouvert la discussion en rappelant trois points d’ores et déjà acquis :
– la mise en œuvre d’une étude générale (au cours de l’année 2005) pour mieux connaître la réalité et les besoins de la population des toxicomanes en errance du Nord-Est parisien ;
– La mise en œuvre d’une action recherche sur le crack, les pathologies associées et le soin ;
– La mission régionale confiée, à Mme Darmaillac auprès du Préfet de Région à la demande de la MILDT afin d’impulser et d’animer auprès des services de l’Etat et des collectivités locales un travail pour l’intégration des personnes sous addictions dans les dispositifs d’hébergement.
Ces trois mesures correspondent à des attentes des associations qui avaient été exprimées au cours de précédentes réunions. Le dispositif actuel souffre effectivement d’une connaissance parcellisée et incomplète des besoins et des éléments de réponse ainsi que d’une territorialité trop restrictive. Malheureusement, ces trois axes de travail à moyen et long terme, expurgés du reste des propositions sur la situation d’urgence, n’apportent par eux-mêmes aucune réponse concrète à ce qui constituait le socle de nos exigences.
Les associations ont dressé le bilan de la réalité de la dégradation de la situation :
– Il existe sur les territoires du nord est parisien une grande agitation liée à une errance accrue des usagers de drogues;
– Cette agitation se répercute par un surcroît de tension au sein de l’ensemble des lieux d’accueils pour les usagers;
– Ces phénomènes ne sont pour l’instant que perçus par les professionnels mais portent le risque d’une dégradation des équilibres existants dans les quartiers;
– L’intervention policière dans sa mission de maintien de l’ordre a occasionné plusieurs incidents risquant d’altérer le lien de confiance entre les usagers et les structures;
– Enfin en comptabilisant l’incendie du squat de Bagnolet la semaine dernière, les 3 derniers mois ont été marqués par la mort de 8 usagers de drogues en lien direct avec leur situation de précarité.
Voilà la réalité vécue par les usagers et à laquelle se confrontent les acteurs de terrain.
Dans le cas de l’incendie de Bagnolet, la municipalité n’a même pas jugé utile de mettre en œuvre un dispositif d’urgence pour accueillir les survivants. 22 personnes qui venaient d’échapper à la mort en laissant trois de leurs compagnons dans les flammes ainsi que le peu qu’ils possédaient ont été renvoyées à la rue en plein hiver. «La toxicomanie n’est pas la grande cause nationale» a-t-on répondu à l’association PROSES qui les a recueillis dans ses locaux exigus sans la moindre possibilité de relogement. Certes, une «solution» a finalement été trouvée… un nouveau squat a été investi.
Il existe pourtant un dispositif dont personne ne conteste le bien fondé et qui est susceptible de mobiliser d’importants moyens dans l’urgence : le plan «Grand Froid». Nos associations demandent aux pouvoirs publics la mise en place immédiate, sur ce modèle, de dispositifs d’accueil adaptés à la réalité et aux besoins des usagers de drogues sans abris. Si aucun territoire ne peut accepter d’être le seul à porter une structure de ce type (comme cela fut avancé lors de la dernière évacuation), nous demandons que plusieurs sites soit installés concomitamment.
Sur la base de ce constat les associations réclament :
– que soit examiné avant Noël les capacités d’adaptation du dispositif «Grand Froid» afin de permettre l’intégration des usagers de drogues;
– que de toute urgence soient clarifiées et communiquées les modalités d’intervention policière afin de ne pas mettre le dispositif de prévention des risques dans une situation plus difficile que celle dans laquelle il se trouve, à l’approche de l’hiver, alors qu’il est le seul à offrir une alternative à l’errance dans les quartiers des usagers de drogues.