Après l’essai sur le SCH-D de Schering-Plough, c’est au tour du laboratoire Pfizer, lancé dans la même course, de présenter un essai sur le UK 427, autre candidat d’une nouvelle classe de molécule, les anti-CCR5. Une fois de plus, nous dénonçons les modalités de cet essai clinique qui bafouent les droits des malades à être correctement pris en charge dans toute recherche thérapeutique.
Une nouvelle classe
Les nouvelles molécules anti-CCR5 ne pénètrent pas dans les cellules infectées par le VIH, n’agissent pas sur le virus lui même, mais a pour cible le système immunitaire. Ces inhibiteurs d’entrée du VIH, pourrait induire des effets secondaires différents des autres classes d’antirétroviraux, sans doute moindre mais qui restent à étudier sur le long terme . Plusieurs candidats inhibant les récepteurs des chimiokines (CCR5 ou CXCR4) sont actuellement en développement. En dehors de l’infection au VIH, ces récepteurs permettent une communication entre le système immunitaire et la différenciation cellulaire. C’est une piste intéressante, qui mérite une recherche de qualité. Cela ne nous semble pas être le cas actuellement, et les risques que les futurEs participantEs pourraient prendre nous inquiètent fortement.
L’anti-CCR5 de Pfizer devrait faire l’objet de deux essais de phase II/III en janvier, aux Etats-Unis et en Europe. Une cinquantaine de françaisEs devraient être concernéEs. Le premier protocole prévoit de tester ce produit auprès de 120 personnes séropositives naïves de traitement, ayant une charge virale supérieure à 2 000 copies, sans prendre en compte le taux de CD4 et comme pour l’essai de Schering-Plough de comparer un traitement par zidovudine + lamivudine (Combivir®) et efavirenz (Sustiva®), versus cette même combinaison associée au UK 427. Le deuxième protocole porte sur des personnes en échec thérapeutique et compare un traitement optimisé et un placebo à un traitement optimisé associé à l’anti-CCR5 , UK 427. Deux doses de ce produit seront testées.
Un laboratoire sans aucune classe
Les critères d’inclusion retenus par Pfizer dans l’essai proposé aux personnes naïves ne sont pas acceptables. Cette stratégie met en jeu la santé des personnes incluses, ayant des CD4 bas et une charge virale élevée, la dose optimale du UK 427, son efficacité et sa tolérance n’étant pas connus. Avec de tels paramètres biologiques, ces personnes doivent impérativement recevoir un traitement d’efficacité prouvée. Pourtant, à travers le choix des critères d’inclusion, Pfizer envisage d’exposer les participantEs, se trouvant dans cette situation clinique, à des risques inutiles. L’accès au UK 427 ne constitue pas, au vu de la gamme étendue de traitements validés et disponibles, une urgence pour les personnes naïves de traitement et rien ne saurait justifier de prendre des libertés avec les règles de sécurité. Il nous semble que tout cela relève du bon sens, il est dangereux d’accélérer le développement d’une molécule. C’est prendre des risques inutiles pour les personnes naïves et celles en échappement.
Seule une révision des critères d’inclusion, notamment sur le taux de CD4 plus élevé, nous permettra de le conseiller dans les pages de ce journal ou lors des appels que nous serons amenés à recevoir. Car a priori nous ne sommes pas contre, toute nouvelle piste thérapeutique pour lutter contre le VIH, au contraire. Mais ces recherches doivent respecter la santé de ceux et celles qui y participent.
Des discussions ont lieu actuellement sur la question des critères d’inclusion des personnes naïves dans les essais de nouvelles molécules, tant dans les différentes agences de santé, comme l’AFSSaPS ou l’ANRS, qu’avec le laboratoire qui persiste à traîner la patte.