Le 12 mai, une dizaine de militantEs d’Act Up ont manifesté devant l’ambassade du Brésil à Paris pour exiger le lancement effectif par le gouvernement brésilien de la production de versions génériques de Kalétra, de Viréad et de Sustiva.
En l’absence de versions génériques brésiliennes, ces médicaments sont achetés par l’État brésilien aux firmes américaines qui en détiennent les brevets pour le Brésil (respectivement Abbott, Gilead et Merck). Alors que le Brésil reste un pays très pauvre, ces compagnies profitent de l’absence de concurrence que leur procure leur brevet pour pratiquer des prix quasiment égaux à ceux payés par les systèmes d’assurances maladies des pays riches. Si bien qu’au Brésil ces trois médicaments représentent 70 % du budget national pour les médicaments anti-sida, et mettent en danger la pérennité financière du programme d’accès aux traitements du Brésil.
Si le gouvernement a annoncé, il y a quatre ans déjà, son intention de fabriquer des versions génériques des molécules anti-sida, c’est en raison de ce danger que font courir les prix pratiqués par les laboratoires occidentaux sur la pérennité de l’accès aux traitements pour les malades brésiliens.
Jusqu’à aujourd’hui, cette annonce et les nombreuses suivantes n’ont jamais été suivies d’effet. En revanche, dans certains États du Brésil, le rationnement des antirétroviraux a commencé à s’instaurer.
Le 15 mars dernier, une nouvelle annonce de production générique a été lancée. Le Ministre brésilien de la santé, Humberto Costa, avait alors donné un ultimatum d’un mois aux fabricants des 3 médicaments concernés pour concéder d’eux-mêmes des licences sur leurs brevets, afin que l’État puisse lancer la production des génériques.
Humberto Costa s’était alors engagé, dans l’éventualité d’une fin de non-recevoir de la part des laboratoires détenteurs des brevets, à utiliser la disposition des accords de l’OMC dite de la « licence obligatoire », qui autorise les États à lever les brevets lorsque l’intérêt public l’exige. Deux mois après l’échéance de son propre ultimatum, Humberto Costa n’a toujours pas respecté son engagement.
Nous dénonçons l’inaction du gouvernement brésilien. Les tous derniers médicaments anti-VIH, comme par exemple le ténofovir, conviennent mieux aux malades que les premières générations, comme l’AZT. Ils ne nécessitent qu’une prise par jour, au lieu de deux ou trois, ils sont moins toxiques et provoquent moins de résistances. Les malades des pays du Sud, qui ne bénéficient pas d’une prise en charge globale de qualité, ont absolument besoin d’avoir accès à ces produits d’utilisation plus simple et plus sûre.
Sur le plan international – comme par exemple en avril dernier à l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle – le Brésil sait prendre la tête des pays en développement pour contrer les abus de l’Europe et des Etats-Unis, mais lorsqu’il est question d’agir au niveau national, ce pays fait montre de couardise et cède aux intimidations des industriels américains.
Humberto Costa doit respecter son engagement du 15 mars en émettant enfin les licences obligatoires promises depuis quatre ans. Il est urgent qu’il s’engage à faire bénéficier les pays pauvres ravagés par le sida de sa production de médicaments à moindre coût.
Suite à notre action du 12 mai, Maria Laura da Rocha, Ministre Conseiller, Chefe de Chancellerie de l’Ambassade du Brésil à Paris, s’est engagée auprès d’Act Up à transmettre nos revendications aux autorités de Brasilia et à nous faire parvenir une réponse écrite. Nous l’attendons toujours.