Rappelons le, depuis l’entrée en vigueur de l’arrêté du 10 mai 2001, les couples (hétérosexuels) séropositifs ou sérodifférents peuvent avoir accès à l’Assistance médicale à la procréation (AMP), afin de limiter les risques de transmission du VIH au/à la partenaire ou à l’enfant à naître. Si les techniques de l’AMP sont fiables et satisfaisantes en termes de résultats, il n’en demeure pas moins qu’il nous appartient encore aujourd’hui de veiller à ce que l’accès soit possible pour touTEs, dans un délai raisonnable, des difficultés dans la prise en charge subsistant. Avant d’aborder les différents problèmes rencontrés, un bref rappel des critères d’accès s’impose.
Les critères d’accès
Pour pouvoir accéder à l’AMP, les couples doivent remplir un certain nombre de critères qui ont été posés par l’arrêté du 10 mai 2001. Ces critères leur sont rappelés lorsqu’ils rencontrent pour la première fois l’équipe du centre qui les prendra en charge. Cette première réunion permet également de faire le point sur les solutions possibles, lorsqu’un couple ne remplit pas, d’emblée, les différents critères susmentionnés.
Ils doivent remplir les conditions réglementaires d’accès à l’AMP :
– Couple hétérosexuel stable, marié ou ayant une vie commune depuis plus de deux ans.
– Evaluation du projet d’enfant au cours d’entretiens avec les psychologues de l’équipe.
– Le couple doit par ailleurs s’engager à avoir une sexualité systématiquement protégée.
Lors de ce premier rendez-vous, on rappelle également aux couples qu’un risque résiduel de contamination (de l’enfant, de la femme) existe, même si aucun cas de contamination n’a été rapporté à jour. C’est la raison pour laquelle on leur propose des alternatives qui ne présentent aucun risque, comme l’insémination avec tiers donneur.
L’homme séropositif pour le VIH-1 doit remplir les critères suivants :
– Avoir un suivi régulier, traité ou non, sans maladie évolutive.
– Avoir des CD4 > 200/mm3 à deux reprises dans les quatre mois précédents la prise en charge.
– Avoir une charge virale plasmatique stable, et qu’elle n’ait pas augmenté de plus de 0,5 log dans les quatre mois précédents.
– La femme doit être séronégative pour VIH dans les deux mois précédant la demande et au moment de la prise en charge. Elle aura par ailleurs un suivi sérologique à deux semaines, trois et six mois de grossesse et à l’accouchement.
La femme séropositive pour le VIH-1 doit remplir les critères suivants :
– Avoir un suivi régulier, traitée ou non, sans maladie évolutive.
– Avoir des CD4 > 200/mm3 à deux reprises dans les quatre mois précédents la prise en charge.
– Avoir une charge virale plasmatique stable, et qui n’a pas augmenté de plus de 0,5 log dans les quatre mois précédents
La prise en charge de la grossesse et de l’enfant à la naissance se fera par des équipes spécialisées.
Les problèmes
Si l’arrêté du 10 mai 2001 a été incontestablement une avancée formidable pour la prise en charge médicale du désir d’enfant, des problèmes pour l’accès des couples aux techniques d’AMP demeurent.
Le premier problème que peuvent rencontrer les couples est lié à l’attitude de quelques médecins, heureusement peu nombreuxSES, qui invoquent leur clause de conscience pour refuser l’accès à l’AMP (et plus précisément aux FIV et ICSI) aux femmes séropositives qui viennent les consulter. Cette situation de discrimination dans la prise en charge, qui existe actuellement à Toulouse et à Lyon, est inacceptable dès lors qu’elle porte atteinte au principe d’égalité dans l’accès aux soins et qu’elle peut conduire ces couples à prendre des risques inconsidérés. Ensemble avec Aides, nous avons donc dénoncé cette situation, auprès de la direction de ces hôpitaux et de la Direction générale de la santé (DGS) et nous leur avons demandé de prendre les mesures nécessaires afin de rétablir l’égalité dans la prise en charge. Seule la DGS a, pour l’instant, officiellement réagi et, le 26 juillet 2005, a adressé aux différents centres un rappel de la réglementation et les a invité à prendre les mesures nécessaires pour remédier aux problèmes (circulaire DGS/DHOS/2B/E2/2005/352 du 26 juillet 2005). Si, dans un avenir proche, ces situations ne sont pas réglées, nous n’hésiterons pas à mettre les établissements hospitaliers concernés face à leur responsabilité.
La deuxième série de problèmes est davantage d’ordre matériel, financier et géographique. Le nombre de centres français qui proposent l’accès à l’AMP est encore limité et concentré dans certaines régions de France. Ceci a en particulier pour conséquence l’engorgement des centres parisiens qui ne peuvent plus faire face aux nombreuses demandes, dans un délai raisonnable. Outre l’ouverture de nouveaux centres, en particulier dans le Nord de la France, il est donc nécessaire d’augmenter les moyens financiers dont disposent ces centres, et en particulier, l’hôpital Cochin, centre précurseur dans la prise en charge des couples sérodifférents ou séropositifs. Sur interpellation des associations, il semblerait que l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) et la Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins (DHOS) soient conscientes des difficultés matérielles que rencontrent les centres et qu’il est prévu de prévoir une augmentation budgétaire en 2006 – affaire à suivre…
La troisième difficulté réside davantage dans le fait que les critères, qui ont été inscrits par l’arrêté du 10 mai 2001, sont trop stricts et apparaissent désormais inappropriés pour une prise en charge des couples sérodifférents et séropositifs. Il faudrait donc initier un processus de révision de l’arrêté, afin de réfléchir en particulier sur l’ouverture des techniques aux personnes séropositives au VIH-2 ou à celles qui ont un seuil de CD4 inférieur à 200 ou encore sur les modalités d’évaluation de l’activité qui serait réellement effectuée par les centres. Dans cette optique, nous avons sollicité, avec Aides, l’Agence de biomédecine afin qu’elle mette en place un groupe de travail et de réflexion. Et nous espérons être associé à cette réflexion, si elle devait être initiée.
Enfin, il serait souhaitable qu’une réelle campagne d’information soit mise en place : trop de couples (et de médecins) ignorent encore aujourd’hui l’existence des techniques d’AMP et des différents centres qui les proposent. Pour toute information sur les centres qui proposent actuellement l’accès à l’AMP, contactez nous.