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Le projet de loi interministériel sur l’immigration qui vient d’être rendu public par les associations, dont Act Up-Paris (voir le communiqué de presse «Projet gouvernemental pour une immigration jetable» ), annonce une nouvelle étape dans la guerre aux étrangèrEs menée par le gouvernement. Les malades étrangèrEs y sont particulièrement viséEs puisque le principe même de la régularisation pour soins est explicitement remis en cause et que les autorisations de séjours seront désormais dépourvues d’autorisation de travail. Renvoyer des malades à une mort certaine ou les confiner dans la précarité la plus absolue, c’est sans doute ce que le gouvernement appelle une politique «ferme mais juste». Au tournant de l’année 2005 «sida, grande cause nationale» et de l’année 2006 décrétée de «l’égalité des chances», le gouvernement illustre à nouveau son cynisme meurtrier.

D’après ce projet de loi interministériel contre l’immigration, le droit au séjour pour raison médicale prévu de l’article L313-11 11° du CESEDA[[CESEDA : Code de l’entrée et du séjour de l’étranger et du droit d’asile.]] devrait être abrogé et le nouvel article L313-14 censé le remplacer se révèle être une mascarade (pour les changements legislatif voir texte joint) :
Les critères médicaux seront restreints : le nouvel article ne concernera plus que les malades nécessitant des soins urgents et vitaux, et exclura ainsi les malades séropositifVEs qui ne sont pas encore sous traitement. De même, au lieu de statuer sur la possibilité pour l’intéresséE de bénéficier effectivement d’un traitement approprié dans son pays d’origine, le projet de loi n’entend s’intéresser qu’à la disponibilité matérielle des moyens sanitaires adéquats. Peu importe si ceux-ci existent en réalité à des prix si élevés et dans des quantités si dérisoires que les malades ne peuvent de fait y avoir accès. C’est en fonction d’une logique identique que le médecin chef de la Préfecture de Police de Paris a refusé début 2005 le séjour à plus de 70 séropositifVEs ou malades du sida avant d’être rappelé à la loi par le ministère de la Santé sous la pression des associations.
La notion de «plein droit» disparaîtra : les malades n’auront plus le droit au séjour, mais seulement le droit de demander le séjour : le préfet aura dorénavant un pouvoir discrétionnaire absolu sur ce sujet. Compte tenu des «objectifs chiffrés» imposés par le ministre de l’Intérieur, il est facile d’imaginer les conséquences d’une telle disposition. À nouveau, des tests de cette mesure ont été effectués par la préfecture du Rhône. Au printemps dernier, elle a refusé le séjour à plusieurs séropositifVEs en dépit de l’avis favorable du médecin inspecteur et, bien entendu, cette décision était en totale contradiction avec la loi actuellement en vigueur.
Enfin la carte de séjour délivrée n’autorisera pas à travailler. Ainsi les rares personnes qui obtiendront un titre de séjour pour raisons médicales seront laissées sans aucune ressource et dans une précarité mettant leur vie en danger.
– Dans sa version actuelle, le projet de loi ne semble pas remettre en cause l’inexpulsabilité des malades étrangers (prévue aux articles L521-3 5° et L511-4 10° du CESEDA). Mais celles et ceux qui sont excluEs des nouvelles dispositions sur le séjour soit du fait des restrictions des critères médicaux, soit du fait d’un refus arbitraire du préfet se trouveront repoussés dans la zone de non droit des personnes «ni expulsables, ni régularisables».

Nous connaissons et déjà les conséquences de telles dispositions sur nos vies qui, hier, relevaient de pratiques illégales des préfectures, mais, qui demain, avec ce projet de réforme seront inscrites dans la loi, donc systématiques et définitives. Nous savons que, sans droits et sans ressources, trouver un hébergement et se nourrir devient un combat quotidien. Nous connaissons les dispositifs d’urgences insalubres, inadaptés et saturés du 115. Nous avons déjà fait l’expérience de devoir suivre un traitement lourd et contraignant avec comme seul revenu moins de cinq tickets services de 3,80 euros par semaine délivrés par des associations humanitaires.

Ce projet de loi raciste ne doit pas passer, ce sont nos vies qui sont en dangers.

Les nouvelles dispositions concernant le séjour des malades étrangerEs.

Dispositions actuelles

Article L.313-11 – Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale» est délivrée de plein droit :

[…]

11° A l’étranger résidant habituellement en France dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne puisse effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer une carte de séjour est prise par l’autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l’intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d’Etat.

Dispositions prévues par le projet de loi sur l’immigration

Article L.313-14 – La carte de séjour temporaire délivrée à l’étranger qui justifie de sa résidence habituelle en France d’au moins un an, dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité des soins urgents dont l’absence mettrait en jeu le pronostic vital, sous réserve qu’il ne puisse effectivement bénéficier, en raison de l’absence des moyens sanitaires adéquats, d’un traitement approprié à son état dans le pays dont il est originaire ou dans tout autre pays dans lequel il est légalement admissible porte la mention «vie privée et familiale».

La décision de délivrer une cette carte de séjour temporaire est prise par l’autorité administrative, après avis circonstancié du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l’intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur, le médecin chef ou l’autorité administrative peut saisir, en tant que de besoin, une commission médicale régionale dont la composition et le mode de fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d’Etat.

[ La carte délivrée au titre du présent article donne droit à l’exercice d’une activité professionnelle. ]