A la demande d’Act Up-Paris, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a
envoyé lundi 30 janvier un courrier aux chaînes diffusant des programmes à
caractère pornographique, les enjoignant à ne diffuser que des films X
tournés avec préservatif ainsi qu’à placer un spot de prévention avant
chaque film. Selon les engagements de Dominique Baudis, président du CSA,
cette proposition ferme mais non contraignante pourrait, si elle n’était pas
suivie d’effets, déboucher sur des mesures coercitives lors du
renouvellement des conventions avec l’ensemble de ces chaînes.
Lundi 16 janvier 2006, trois militantEs d’Act Up-Paris s’entretenaient avec
Dominique Baudis et Agnès Vincent-Deray, membre du Collège du CSA en charge
de la déontologie, sur la question de la prévention dans les programmes à
caractère pornographique diffusés par les chaînes de télévision.
De nombreuses chaînes proposent à l’heure actuelle ces programmes et pour
certains films, les tournages ont été réalisés sans le port du préservatif,
seul moyen de se prémunir de la transmission des IST (Infections
Sexuellement Transmissibles), dont le VIH/sida. Nous ne pouvons l’accepter :
d’une part, ces conditions de travail mettent en danger la santé des
actrices et des acteurs, d’autre part de tels films banalisent l’épidémie de
sida et la prise de risque auprès des téléspectatrices et téléspectateurs.
Nous pointons à ce titre la nécessité d’exemplarité de la pornographie,
premier vecteur d’imagerie sexuelle.
Afin d’inciter les chaînes à plus de responsabilité, D. Baudis a envoyé une
lettre aux présidents du groupe AB et des chaînes Multivision, TPS Cinéma,
Canal +, Pink TV et Ciné Cinéma Frisson, diffusant tous des programmes de
catégorie 5. Dans cette lettre, il indique : « le Conseil considère que, du
fait du caractère très particulier de ces programmes qui impliquent des
relations sexuelles réelles de la part des acteurs, et de leur impact
potentiel sur leur public en termes de banalisation de comportements
sexuels, la représentation de relations sexuelles non protégées est un enjeu
de santé publique. S’adressant aux présidents : « [le Conseil] souhaite
connaître les mesures que vous prenez à ce sujet dans le choix des
programmes que vous diffusez sur votre antenne « , puis » le Conseil vous
demande de ne pas diffuser sur vos antennes (….) de programmes à caractère
pornographique (de catégorie V, déconseillés aux moins de 18 ans) dans
lesquels les relations sexuelles ne sont pas protégées (port du
préservatif). La lettre termine par : le Conseil estimerait salutaire que
ces services diffusent régulièrement des messages de prévention tels que
ceux disponibles auprès des organismes publics chargés de la lutte contre le
sida.
Act Up Paris prend acte de cette action en faveur de la prévention et attend
maintenant des réponses et des engagements précis des chaînes concernées.
Courrier de Dominique Baudis adressé à Act Up-Paris :
Paris, le 1 février 2006
Monsieur le Président,
L’association que vous présidez a récemment appelé l’attention du CSA sur les risques liés à la diffusion de programmes à caractère pornographique comportant des relations sexuelles non protégées.
Dans un entretien auquel assistait Mme Agnès Vincent-Deray, membre du Collège en charge de la déontologie des programmes, vous avez insisté sur les risques vitaux encourues par les personnes qui tournent dans ces programmes et sur les effets que pourrait avoir une telle banalisation de comportement à risque auprès du public.
Comme je m’y étais engagé lors de cet entretien, j’ai proposé aux membres du Collège que le Conseil s’adresse à tous les présidents de chaînes dont ils assument le contrôle et qui diffusent ce type de programmes de catégorie V pour qu’ils renoncent à diffuser des films dans lesquels les relations sexuelles ne seraient pas protégées. Cette décision ayant été acceptée à l’unanimité du Collège, j’ai le plaisir de vous faire parvenir ci-joint copie de ces courriers.
Sachez que je me félicite que cette collaboration avec votre association et le CSA ait pu
aboutir à une décision importante au regard de la santé publique.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’expression de mes sentiments distingués.
Dominique Baudis
Courrier envoyé par Dominique Baudis aux présidents des chaînes :
Monsieur Claude BERDA, Président d’AB
Monsieur Emmanuel FLORENT, Président de Multivision, TPS Cinéma
Monsieur Bertrand MEHEUT, Président Directeur Général de Canal+
Monsieur Pascal HOUZELOT, Président de Pink TV
Monsieur Bruno THIBAUDEAU, Directeur Général de Ciné Cinéma Frisson
Paris, le 1 février 2006
Monsieur le Président,
L’attention du Conseil supérieur de l’audiovisuel a été appelée récemment par l’association de lutte contre le SIDA Act Up sur les risques liés à la diffusion de programmes à caractère pornographique comportant des relations sexuelles non protégées. Act Up s’inquiète des risques vitaux encourus par les personnes qui tournent dans ces programmes, ainsi que les effets de banalisation de comportements à risque auprès du public de ces programmes.
Le Conseil considère que, du fait du caractère très particulier de ces programmes qui
impliquent des relations sexuelles réelles de la part des acteurs, et de leur impact potentiel sur leur public en termes de banalisation de comportements sexuels, la représentation de relations sexuelles non protégées est un enjeu de santé publique. Il souhaite connaître les mesures que vous prenez à ce sujet dans le choix des programmes que vous diffusez sur votre antenne.
La plupart des chaînes qui diffusent des programmes à caractère pornographique se sont engagées dans leur convention avec le CSA à ne pas diffuser de programmes incitant à des comportements préjudiciables à la santé publique, ou à ne pas inciter à des pratiques ou des comportements délinquants ou inciviques (article 10 de la convention de Canal+, article 2-3-3 de la convention de Kiosque). Il apparaît que la diffusion de programmes à caractère pornographique dans lesquels des relations sexuelles entre partenaires occasionnels ne sont pas protégées comportent un risque d’incitation à des comportements préjudiciables à la santé publique ou à des comportements délinquants tendant à la mise en danger de la vie d’autrui.
C’est pourquoi le Conseil vous demande de ne pas diffuser sur vos antennes (….) de
programmes à caractère pornographique (de catégorie V, déconseillés aux moins de 18 ans) dans lesquels les relations sexuelles ne sont pas protégées (port du préservatif).
Par ailleurs, le Conseil estimerait salutaire que ces services diffusent régulièrement des
messages de prévention tels que ceux disponibles auprès des organismes publics chargés de la lutte contre le sida.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma considération distinguée.
Dominique BAUDIS