Les violences homophobes qui ont empêché la Marche des fiertés LGBT de se tenir à Moscou doivent faire l’objet de condamnations et de sanction de la part de tous les pays, à commencer par la France.
Ces violences venaient de toute part : skinheads, orthodoxes, électeurs nationalistes, etc. Mais elles sont surtout venues des pouvoirs publics. C’est le maire qui avait interdit cette marche, décision cautionnée par un tribunal ; ce sont des policiers qui ont pris fait et cause pour les homophobes, arrêtant et frappant de nombreux soutiens à la cause LGBT. C’est un député nationaliste, qui a pu dire, devant des manifestantEs arrêtéEs, et sous les applaudissements de la foule : « j’ai trouvé une solution pour eux : la Sibérie ». La déportation des homosexuelLEs dans des goulags : voilà ce que la Russie, qui va prendre la présidence du Conseil de l’Europe, peut proposer par la bouche d’un élu, sans qu’aucune autorité fédérale ou locale ne le désavoue. La France et les autres pays européens oseront-ils le cautionner ? Ces violences n’auraient jamais été possibles sans l’homophobie prégnante dans toutes les couches de la société, et contre laquelle rien n’a été fait.
L’homophobie institutionnelle russe a de graves conséquences sanitaires. L’épidémie de sida, d’hépatites virales et d’IST en Russie est une des plus dynamiques au monde. Pourtant, la transmission du virus du sida chez les gays y est totalement occultée. En Russie, le sida chez les homos n’existe pas. L’homophobie est telle qu’aucun message de prévention ciblé, aucune incitation au dépistage n’est mise en œuvre en direction de cette population. La transmission par injection représente depuis le milieu des années 1990 le vecteur principal et le plus visible de l’épidémie. Mais chez les homosexuels, elle est complètement niée, si bien qu’aujourd’hui, comme nous l’avons constaté lors de notre mission en Russie en avril 2005, personne ne s’y prépare. L’occultation des homosexuels dans l’épidémie en Russie est apparue avec éclat lors de la première conférence sur le sida en Europe de l’Est et Asie Centrale qui vient de se terminer à Moscou. Aucun représentant homosexuel n’a été invité, aucune session n’a été consacrée à cette question. La Russie n’a tiré aucune leçon des expériences passées de la lutte contre le sida : celui qui ne combat pas toute l’épidémie dans le respect des personnes atteintes, ne combat rien du tout et se fait le complice du sida.
Les responsables politiques françaisEs et européenNEs n’ont pas le choix. Elles et ils doivent condamner officiellement et sans aucune réserve les exactions commises par la Mairie de Moscou et les forces de l’ordre, ainsi que l’homophobie de l’Etat russe. Mais Dominique de Villepin, Philippe Douste-Blazy ou Jacques Chirac, qui appartiennent à un parti qui tolère en son sein l’homophobie la plus violente, auront-ils le courage politique suffisant pour faire passer le droit des gays, des lesbiennes et des trans, avant des intérêts économiques ? Les 45 autres états membres verront-ils que le Conseil de l’Europe perdra le peu de crédibilité qui lui reste à tolérer la présidence d’un pays pour qui la déportation des homosexuelLes est une possibilité ?
Nous exigeons que les gouvernements européens, le chef de l’Etat français et les ministres françaisES les plus concernéEs condamnent sans réserve les violences homophobes, et qu’ils et elles remettent en cause la présidence russe du Conseil de l’Europe, tant que la fédération de Russie n’aura pas présenté des excuses officielles.