D’ici fin 2006, les COREVIH remplaceront les actuels CISIH. Les COREVIH sont des instances de coordination de lutte contre le sida à l’échelle des régions. Ce qui les différencie des CISIH réside dans l’association de ses membres : des acteurs de la recherche et des soins, de la prévention et du dépistage, qu’ils travaillent au sein des hôpitaux ou à l’extérieur, des membres d’associations de malades et d’usagers du système de santé qui représenteront au moins 20 % des membres.
La reconnaissance de notre contre-expertise fait suite au travail réalisé, depuis le début de l’épidémie, par les militants associatifs dans tous les domaines de la lutte contre le sida. Par exemple, plusieurs membres du TRT-5 participent aux groupes de travail de l’ANRS qui animent la recherche, d’autres collaborent à l’élaboration des recommandations de prise en charge des personnes infectées par le VIH. Cette participation plus large des associations de malades s’inscrit également dans la mise en place, depuis 2002, de la loi dite du droit des malades. C’est ce qu’on appelle la démocratie sanitaire, qui permet la représentation des malades dans les instances de santé. Désormais, c’est donc au niveau régional, au plus près du terrain, via les COREVIH, que notre contre-expertise permettra de franchir une nouvelle étape dans notre partenariat avec les soignants en vue d’améliorer la prise en charge médicale et sociale des malades.
Nos représentants dans les COREVIH seront désignés par le préfet de région parmi une liste interassociative élaborée entre nous ou, à défaut, établie par les DRASS. Pour relever les défis posés par les COREVIH, notre mobilisation associative devra être forte et, si possible, coordonnée, afin d’investir au maximum les places qui nous seront offertes. Toutefois, toutes les associations présentes sur le territoire de référence d’un COREVIH n’auront pas obligatoirement un membre pour les y représenter. Les associatifs présents ne doivent pas perdre de vue qu’ils seront inscrits dans un réseau interassociatif, régional et national, qui a pour rôle de soutenir et d’informer, de conseiller et d’appuyer sur tous les enjeux de la lutte. La dimension collective de l’implication de nos représentants dans ces nouvelles instances nous demande : d’apprendre à travailler ensemble et à construire des consensus, de choisir des modalités de travail permettant de définir des priorités et des stratégies collectives, tout en acceptant nos différences.
Principes de base
Pour que cette dynamique fonctionne, nous devrons adhérer aux principes suivants, selon lesquels les représentants associatifs participeront aux COREVIH :
– au nom de toutes les personnes séropositives, usagerEs ou non des associations, quels que soient le mode de transmission, l’âge, le sexe, le genre, l’orientation sexuelle, l’origine géographique ;
– en tant que personnes affectées ;
– au nom de toutes les associations, même celles qui ne sont pas représentées.
Les COREVIH vont confronter nos représentants associatifs à la nécessité de travailler sur un pied d’égalité avec de nouveaux partenaires : soignants (hospitaliers ou en ville), chercheurs, travailleurs sociaux, personnel médical intervenant en prison, mais aussi l’Administration de la santé et des responsables politiques. Les syndicats du personnel hospitalier, par exemple, pourront être de très bons partenaires du fait de leur connaissance de l’hôpital et de son fonctionnement (information sur les conséquences de la réforme hospitalière (T2A), des restrictions budgétaires et du personnel, etc.).
Confrontation des mondes
Il reste une donnée sur laquelle nous n’avons pas prise : comment les médecins et les chercheurs vont-ils accepter ce nouveau partenariat ? Eux aussi doivent s’impliquer dans ces nouvelles instances, comme c’était le cas dans les CISIH, tout en acceptant de partager leur pouvoir. S’ils reconnaissent l’expertise des associations en matière de prévention et d’éducation à la santé, ils ont parfois du mal à accepter la pertinence de notre point de vue ou notre légitimité en matière de prise en charge des malades, de traitements ou de recherche, quand bien même elles sont reconnues au niveau national par l’ANRS ou l’AFSSaPS.
Notre participation active aux COREVIH nous demandera un fort investissement en termes de travail, dans un contexte où les associations sont affaiblies par une baisse du nombre de militants et par des restrictions budgétaires dues à la baisse des subventions de l’État et du secteur privé. La présence des associations de malades au sein des COREVIH est une reconnaissance de l’importance de notre travail, mais l’absence presque totale de moyens consacrés à la démocratie sanitaire risque toutefois de ne pas permettre aux COREVIH de jouer pleinement leur rôle.
Si, pour l’instant, le pouvoir et l’efficacité des COREVIH restent « flous », nous devons nous en saisir et y participer activement. Il existe trop peu de lieux où nous pouvons faire entendre notre voix sans avoir à la prendre de force : les COREVIH sont parmi ces lieux. Ils seront ce que nous en ferons. Tentons l’expérience !