Lors de notre 60ème RéPI, le 27 septembre 2006 intitulée « Diabète et VIH, les savoirs utiles » le Dr David Zucman a fait une présentation générale de ce sujet très accessible que nous retranscrivons en grande partie ici. Le compte rendu dans son intégralité est consultable sur notre site.
Avant les trithérapies, le diabète associé au VIH était trés peu courant, mais c’est depuis un problème fréquent. Quand on est séropositif, le risque d’avoir un diabète est multiplié par 4 par rapport à la population générale, c’est un risque majeur comparé au risque cardiovasculaire, qui est de 1,2 – 1,3. Au bout de trois années de trithérapies, 5 à 10 % des séropositifs sont devenus diabétiques, mais combien y en aura-t-il après 10 ou 15 ans de traitement ? On craint qu’il y ait de plus en plus de cas de diabète avec le vieillissement des personnes et avec la longueur d’exposition aux antirétroviraux.
Un peu de biologie
Dans l’abdomen, tout est dans la même région : le tube digestif, l’estomac, le duodénum et au même niveau, le pancréas et le foie. Certains signaux viennent de l’alimentation et de l’absorption proximale des aliments. Ces choses sont complètement reliées en un bloc métabolique. C’est l’alimentation qui fournit à notre organisme le sucre. L’absorption de l’alimentation, la digestion des glucides, la sécrétion de l’insuline et son action notamment au niveau du foie, participent à capter le glucose et à faire la synthèse du glycogène. Le taux de sucre dans le sang doit rester stable pour le bon fonctionnement de notre corps. Après un repas, le taux de sucre dans le sang (la glycémie) augmente, c’est l’hyperglycémie, et en réponse le pancréas sécrète de l’insuline. Rapidement, sous l’effet de l’insuline, la glycémie baisse et redevient normale, les sucres en excès quittent le sang pour être stockés dans les muscles ou le foie afin d’être disponibles en cas d’effort.
Le pancréas est une grosse glande avec deux parties, l’une qui fabrique des hormones comme l’insuline et l’autre qui produit les sucs pancréatiques servant à la digestion. Après le pancréas, le foie est le deuxième organe essentiel, car il permet le stockage et le déstockage du glucose, sous forme de glycogène. Le foie forme le glycogène et le dégrade. En troisième position dans ce circuit, les muscles sont aussi très importants, car ce sont les principaux utilisateurs de glucose. Mais tous les organes en utilisent, notamment le cerveau qui dépend uniquement du glucose pour fonctionner alors que les autres organes peuvent aussi utiliser les acides gras, qui constituent de l’énergie pour toutes les cellules de l’organisme. Seul le cerveau n’utilise que le glucose, ce qui veut dire que si le glucose baisse, le cerveau s’arrête, alors que les autres organes peuvent continuer à fonctionner grâce aux acides gras.
Quand l’insuline entre en jeu
C’est le pancréas, et plus précisément les unités fonctionnelles du pancréas, les îlots de Langerhans, qui sécrètent l’insuline dans le sang. L’insuline est une hormone polypeptidique, c’est-à-dire que, comme le T-20, elle est uniquement injectable. D’autres, sont beaucoup plus simples : les stéroïdes ou les œstrogènes, qui peuvent se prendre par la bouche. L’insuline est indispensable, car c’est la seule hormone de l’organisme capable de faire baisser le taux de sucre dans le sang. La première action de l’insuline se fait au niveau du foie pour faciliter la mise en réserve du glucose sous forme de glycogène. L’insuline est sécrétée par des cellules très particulières du pancréas.
Quand le taux de glucose dans le sang s’élève, les îlots de Langerhans fabriquent immédiatement de l’insuline pour le faire baisser. Ce mécanisme a lieu au niveau des cellules par l’intermédiaire de récepteurs. C’est un mécanisme très complexe, qui parfois peut être altéré, c’est ce qu’on appelle l’insulino-résistance. L’insuline se met à agir moins bien au niveau des cellules. On estime que l’insulino-résistance est présente chez 36 % des personnes sous trithérapie.
L’insuline est aussi une hormone anabolisante, « qui met en réserve » dans l’organisme les constituants. Cela concerne aussi bien les protéines (l’insuline sert à avoir de bons muscles), que le glucose, mais aussi le gras (si on n’a pas d’insuline, ou très peu, on maigrit, on perd non seulement ses muscles mais aussi le tissus adipeux).
L’insuline fait rentrer le sucre à l’intérieur des cellules, permet au glucose d’être mis en réserve sous forme de glycogène et permet aussi au glucose d’être oxydé pour servir d’énergie. C’est donc vraiment l’hormone qui permet de faire baisser la glycémie parce que tout le devenir du glucose est stimulé, à la fois pour sa mise en réserve et pour son oxydation.
Entre glucose, glycogène et glycémie
La glycémie est le taux de glucose dans le sang. Le glucose est quelque chose d’essentiel. Il vient de l’alimentation, c’est ce qu’on appelle les glucides. Il y en a deux sortes : les sucres lents et les sucres rapides. Le glucose circule dans le sang et rentre ensuite dans les cellules, par le biais de transporteurs, il est ensuite métabolisé par phosphorylation : un phosphore est ajouté au milieu du glucose.
Les tissus qui utilisent le glucose sont essentiellement les muscles. 50 % du glucose est consommé par les muscles parce qu’ils ont besoin d’énergie dans leur fonctionnement. Le foie en utilise 30 % et les autres tissus 20 %.
– 1° Ce glucose peut être consommé immédiatement pour la production d’énergie, c’est ce qu’on appelle l’oxydation du glucose. Ca donne de l’énergie, de l’ATP[[ATP : Adenosine-TriPhosphate.]], l’énergie nécessaire au fonctionnement cellulaire. En présence d’oxygène, il se transforme complètement, en cas de manque d’oxygène, en cas d’exercice très intense, cela produit des lactates, bien connus dans l’infection à VIH. Par exemple, après un exercice intense, le dosage des lactates indiquent qu’ils sont élevés, car les muscles ont consommé le glucose sans l’oxyder complètement, laissant les lactates s’accumuler dans le sang.
– 2° Le deuxième destin du glucose est d’être mis en réserve. On peut mettre dans certains organes du glucose en réserve, c’est ce qu’on appelle le glycogène. C’est très important d’avoir cette réserve de glycogène, parce que un gramme/litre de glucose se consomme en quelques minutes. Le glucose sanguin peut s’épuiser très rapidement et présente un risque d’hypoglycémie. Heureusement nous avons des réserves dans deux sortes de tissus : au niveau du foie et au niveau des muscles. Le foie est la grosse réserve de glucose qui y est conservé sous forme de glycogène, afin d’être relargué selon les besoins. Ce qui fait qu’on peut rester à jeun pendant un certain temps, car le foie fabrique du glucose, le stocke et maintient le taux de glycémie à un gramme. Si on enlève le foie à quelqu’un, il mourra tout de suite d’hypoglycémie puisqu’il n’a aucun moyen de maintenir la glycémie. Le glucose va donc dans le foie où il va être stocké, mais le foie peut aussi faire du glucose à partir des acides aminés et des lactates.
La deuxième réserve de glycogène concerne les muscles. Elle permet de faire de l’exercice avec une réserve énergétique dans les muscles. Sans cette réserve, on pourrait à peine se lever de sa chaise.
La glycémie doit être réglée à un taux d’environ un gramme/litre. Ce taux est réglé très finement entre, d’une part, l’entrée et d’autre part, l’utilisation du glucose. Un gramme/litre, c’est très peu, surtout quand on sait que le glucose est le carburant énergétique nécessaire. Les variations de la glycémie peuvent être délétères. Une baisse trop importante entraîne une hypoglycémie, qui peut rapidement aboutir à un coma. Le glucose arrive par l’alimentation, mais aussi par le foie. Très souvent, les diabétiques se disent que s’ils ont trop de sucre dans le sang, c’est parce qu’ils ont trop mangé. Souvent ce n’est pas lié à un excès d’alimentation, mais à une production excessive de glucose par le foie. C’est aussi pour cela que beaucoup de maladies hépatiques et notamment l’hépatite C et toutes les cirrhoses, s’accompagnent très souvent de diabète.
Ce taux réglé à un gramme l’est sous le contrôle d’hormones, avec une régulation extrèmement précise. Si seule l’insuline diminue le glucose, par contre il existe beaucoup d’autres hormones qui au contraire augmentent la glycémie, comme le glucagon, le cortisol, les catécholamines et l’hormone de croissance. Ces hormones sont appellées hormones du stress, produites par l’organisme pour faire face à un stress infectieux ou un stress psychique, et qui ont pour conséquence de faire sortir le glucose. Tout ce qui est stress va donc augmenter la glycémie.
Définissons le diabète
Le diabète est une anomalie de la régulation de la glycémie. On en distincte deux type : le diabète dit insulino-dépendant et le diabète gras, non-insulino-dépendant. On dit qu’il y a diabète quand il y a trop de glucose dans le sang, c’est-à-dire quand la glycémie est trop élevée. Les définitions aujourd’hui sont très strictes. Le taux normal de la glycémie est de 5 millimol, soit 1 gramme, et on parlera de diabète quand la glycémie à jeun est supérieure à 7 millimol, c’est à dire 1,27 gramme, ce qui est vraiment un tout petit dépassement. C’est comme si on disait que 500 CD4 c’est bien, mais que 480 est anormal. Une toute petite élévation entre 5 et 7 millimol de la glycémie définit déjà le diabète. On parle aussi de glycémie post-charge : c’est un test qui consiste à absorber du glucose pur, et si la mesure après absorption indique plus de 2 grammes, le diagnostic de diabète peut être posé. Autre dosage important, la mesure de l’hémoglobine glyquée[[L’hémoglobine glyquée est le reflet des fluctuations de la glycémie pendant 4 à 6 semaines. C’est la mémoire qui informe sur l’évolution de la glycémie et notamment sur son niveau le plus haut.]]. L’hémoglobine est présente dans les globules rouges, c’est une protéine qui peut se charger en sucre en fonction du taux moyen de glycémie.
La glycémie est donc quelque chose qui évolue, fluctue tout au long de la journée, en fonction de ce qu’on mange, de l’activité physique, de l’heure. La variation est permanente, et tourne aux alentours d’un gramme (allant de 0,70 à 1,30 gramme après manger). Et la moyenne du taux de glycémie va se traduire par le dépôt de glucose sur l’hémoglobine. Plus on a une glycémie élevée en moyenne, plus il y a un dépôt de glucose sur l’hémoglobine, c’est ce qu’on appelle l’hémoglobine glyquée.
On parle de pré-diabète quand la glycémie est un peu élevée, entre 6 et 7, ou lorsque, après charge en glucose, la glycémie est un peu élevée, entre 7 – 8 et 11. On parlera aussi de résistance à l’insuline, quand on a un taux d’insuline élevé dans le sang par rapport au taux de glycémie : cela veut dire que l’insuline agit mal et que ses taux doivent être plus élevés pour maintenir une glycémie normale.
Prévention
Il est important de rappeler que les signes cliniques de l’excès du glucose dans le sang (l’hyperglycémie) sont très tardifs. Quels sont les signes quand on a plus de 2,50 grammes de sucre dans le sang ? D’abord, le sucre passe dans les urines, le diabétique élimine plus et pour compenser boit beaucoup, ça s’appelle la polyurie-polydipsie. Ces signes sont très tardifs, d’où l’importance de ne pas attendre que le diabète soit évident et de le dépister beaucoup plus tôt.
Comment essayer de prévenir tous ces diabètes ? D’abord, il faut choisir les antirétroviraux les moins toxiques et dépister tôt les anomalies. Il est évident que si on en parle très tôt, on fera plus attention. Ainsi boire deux litres de coca par jour, si on est pré-diabétique, va accélérer le devenir diabétique. Dépister tôt permet de rectifier le tir au niveau alimentaire. Il faut fuir les sucreries (qu’on appelle les sucres rapides), éviter le surpoids, faire de l’exercice etc, tout cela est très important pour prévenir le diabète. La principale mortalité associée au diabète concerne les maladies cardiovasculaires. Dans l’ensemble, il faut prendre en charge tous les facteurs de risques : les troubles lipidiques, l’hypertension, le tabagisme, etc. au même titre que le diabète.
Comment faut-il faire quand on est sous trithérapie ? Le médecin doit poser la question des antécédents familiaux de diabète, car c’est une maladie très fréquente. Il y a à peu près 2 ou 3 millions de diabétiques en France, c’est extraordinairement fréquent, 5 à 6 % de la population. C’est une maladie qu’on voit surtout chez les personnes qui prennent de l’âge, qui prennent du poids.
Ce qui est très important pour dépister le diabète c’est de mesurer la glycémie à jeun. On peut compléter par d’autres mesures, notamment l’insulinémie à jeun. Il est recommandé de le faire. On peut la mesurer aussi bien sur l’hémoglobine glyquée. Si elle est supérieure à 6 %, c’est qu’il y a déjà un diabète présent. Il y a aussi l’hyperglycémie provoquée par voie orale. Il s’agit de 75 grammes de sucre (à peu près 20 carrés de sucre), soit un grand verre de sirop hyper-sucré. Ensuite, il faut faire des prélèvements sanguins pendant deux heures, ou deux heures après la prise de ce sirop de sucre, pour voir à combien la glycémie s’élève. On ne va pas faire cela à tout le monde, mais pour quelqu’un qui a des glycémies à jeun dont le seuil est un peu limite (entre 6 et 7) il est intéressant de faire ce test pour voir s’il s’agit d’un diabète ou pas. Cela permet un dépistage plus précoce.
Causes et facteurs de risque
Comme c’est une maladie fréquente, le diabète peut être présent avant même l’infection à VIH, c’est dans ce cas le diabète de « monsieur tout le monde ». Dans la plupart des cas il s’agit d’un diabète iatrogène, c’est-à-dire une conséquence de la trithérapie. La responsabilité des inhibiteurs de protéase est clairement mise en cause parce qu’il est bien montré que les inhibiteurs de protéase (mise à part l’atazanavir), semblent empêcher l’action complète de l’insuline et provoquent ce qu’on appelle une insulino-résistance. Les analogues nucléosidiques (tels que le Videx®) ont aussi un rôle dans l’apparition des diabètes sous trithérapie.
Les facteurs associés au diabète sont multiples.
– La lipoatrophie : on voit beaucoup plus de diabète chez les personnes sous trithérapie qui développent une lipoatrophie périphérique, mais aussi chez celles qui ont une accumulation centrale des graisses (ou lipohypertrophie).
– Il y a évidemment des facteurs génétiques qui jouent de façon très importante et l’âge aussi. Plus les personnes vieillissent, plus elles ont de risques de développer un diabète.
– L’hépatite C est très importante en terme de rique, ainsi que la cirrhose. Quelle qu’en soit la cause, les hépatites, C, B ou alcoolique, donnent aussi du diabète.
– Un certain nombre de personnes ayant souffert d’une pancréatite alcoolique ou ayant été surdosées en Videx® sont sujettes à la pancréatite. Car, quand le pancréas est abîmé par un produit toxique (comme la pentalmidine, le pentacarinate) et qu’il est très atteint, il ne fabrique plus assez d’insuline, ce qui peut dégénérer en diabète.
– Enfin la corticothérapie et la cortisone, données après une transplantation du foie, pour une co-infection VIH-VHC par exemple, provoquent beaucoup de cas de diabète post-greffe. C’est très fréquent. On peut aussi voir apparaître des diabètes après interféron ou après utilisation d’hormones de croissance.
Prise en charge
Se soigner quand on est diabétique est très difficile. D’abord parce qu’on est obligé d’apprendre un certain nombre de choses qui sont très contraignantes, comme la diététique. Pour beaucoup de gens qui aiment manger n’importe quoi, n’importe quand, c’est dur car une fois le diabète détecté, ce n’est plus possible, ou alors conditionné à de mauvais résultats. L’exercice physique est important : il faut apprendre à en faire, acheter un chien par exemple, arrêter de prendre l’ascenseur, etc. Après, il y a des choses à faire pour mesurer son taux de glucose, connaître son diabète, connaître sa maladie. Et puis il y a plein de médicaments oraux qu’on peut prendre pour faire baisser sa glycémie, comme la metformine[[Les cas d’acidose lactique d’évolution fatale chez des diabétiques traitéEs par metformine se multiplient. C’est une complication métabolique rare mais très grave liée à l’évolution de metformine. Des signes annonciateurs existent qu’il faut connaître pour arrêter d’urgence le traitement : crampes musculaires, troubles digestifs avec douleurs abdominales, grande asthénie.]] : c’est ce qu’on appelle le glucophage. Mais il y a aussi des sulfamides, les glitazones. Et malheureusement, quand les médicaments oraux ne marchent pas, il faut recourir à l’insuline.
L’association française des diabétiques (AFD) a édité un document récapitulant les informations de base pour poser les jalons du parcours du diabétique :
– A chaque consultation : mesure du poids et de la tension artérielle, discussion autour du carnet de surveillance.
– Au moins tous les trois mois : mesure de la glycémie à jeun en laboratoire, mesure du taux d’hémoglobine A1c (HbA1c).
– Au moins une fois par an : examen du fond d’œil, examen des pieds, bilan lipidique (cholestérol et triglycérides), évaluation de la fonction rénale (créatinémie et microalbumine), électrocardiogramme.
S’il existe une anomalie, des examens plus spécialisés et/ou une surveillance plus fréquente peuvent être nécessaires.
Intitulée les savoir utiles, la RéPi s’inspirée des 13 points à connaître pour mieux gérer sa maladie. Il s’agit de connaître :
– 1. l’usage de l’autocontrôle et de la surveillance urinaire ;
– 2. les objectifs d’équilibre glycémique, avant et après le repas ;
– 3. le traitement prescrit, ses effets et ses modalités de prise ;
– 4. le risque d’hypoglycémie et la façon de le prévenir ;
– 5. les conséquences d’une affection sur l’équilibre du diabète et la conduite à tenir ;
– 6. les examens à faire et leur fréquence (bilan lipidique, pression artérielle, fond d’œil, examen des pieds, évaluation de la fonction rénale) ;
– 7. la nécessité d’une contraception adaptée et d’une préparation en vue d’une future grossesse ;
– 8. les bases diététiques de l’alimentation ;
– 9. l’importance de l’activité physique ;
– 10. la nécessité d’avoir sur soi une carte de diabétique indiquant le traitement quotidien ;
– 11. la possibilité d’avoir une aide au sevrage tabagique ;
– 12. la possibilité de bénéficier de journées d’éducation dans les services de diabétologie ;
– 13. l’importance d’une information et d’une formation de l’entourage, notamment en ce qui concerne la diététique et le risque hypoglycémique.
Complications
Le diabète s’accompagne souvent de complications dégénératives, et si on ne s’en occupe pas du tout, si on laisse une glycémie très élevée pendant 10 ans, on risque d’avoir des complications. C’est pratiquement inéluctable.
Ces complications peuvent toucher les petits vaisseaux, les petits capillaires : c’est la micro angiopathie. C’est une complication qu’on appelle spécifique du diabète. Après 10 ans de diabète qui n’a pas été bien traité, vont apparaître ces complications, et trois organes pourront être atteints : la rétine, ce qui donne la rétinopathie diabétique, le rein, c’est ce qu’on appelle la néphropathie diabétique, et les nerfs, c’est ce qu’on appelle la neuropathie diabétique.
Une rétinopathie diabétique peut apparaître après 10 ans de diabète non pris en charge, ça dépend du taux d’hémoglobine glyquée, c’est-à-dire de l’équilibre moyen du diabète. Si on soigne bien son diabète, on peut éviter ces lésions au niveau de la rétine. Mais en France, le diabète représente encore malheureusement 500 à 1 000 cas de cécité par an, c’est donc un problème fréquent. Comme souvent ces lésions sont au début sans aucun symptôme, on les dépiste par un fond d’œil qu’il faut faire tous les ans et compléter éventuellement par une angiographie, c’est-à-dire une photographie de la rétine.
L’atteinte rénale due au diabète touche les capillaires qui sont présents dans les glomérules. Le rein est un filtre, le sang y arrive dans de très petits capillaires afin d’être filtré pour former l’urine. Les petits capillaires rénaux peuvent être abîmés par le diabète au bout d’une dizaine d’années, et le signe qui traduit cela, c’est l’apparition de protéines dans les urines. La protéinurie chez les personnes vivant avec le VIH est quelque chose d’assez fréquent, et on peut craindre que les anomalies rénales chez ces personnes soient aggravées par le diabète, créant ensuite des dégâts plus graves et plus précoces. Si on laisse évoluer ces dégâts au niveau rénal, cela peut aboutir à une insuffisance rénale et même à la dialyse. Ainsi aujourd’hui, dans un centre de dialyses, 30 % des dialysés sont diabétiques, c’est une cause très fréquente d’insuffisance rénale et de dialyse. L’évolution d’une néphropathie peut être aggravée par le mauvais équilibre du diabète, l’hypertension, certains médicaments pouvant être toxiques au niveau rénal (comme Truvada® et Viréad®), des produits de contraste, ou de grosses infections urinaires.
L’atteinte des nerfs s’appelle la polynévrite diabétique, et ressemble aux effets secondaires de certains antirétroviraux comme le Videx®, l’Hivid® ou le Zérit® surtout. C’est une insensibilité, voire une perte de sensibilité qui se développe au niveau des pieds, accompagné parfois de douleurs importantes pouvant aboutir en cas extrême à des trous dans les pieds, c’est ce qu’on appelle des maux perforants.
Ces complications mettent environ 10 ans à apparaître si le diabète n’est pas bien équilibré. Il existe une autre complication : l’atteinte des gros vaisseaux (ou macro angiopathie) qui concerne les grosses artères notamment l’aorte, les coronaires, les artères des membres inférieures et les artères du cou. C’est fréquent chez les diabétiques, et là aussi aggravé par d’autres facteurs comme le tabac, l’hypertension, le cholestérol, les trithérapies et le VIH lui-même. Tout cela concourt à abîmer les artères et peut aboutir à l’infarctus, l’artérite, etc. Ces complications sont trois fois plus fréquentes chez les diabétiques que dans la population non diabétique.
Dernière complication : la fibrose hépatique ou stéato fibrose ou NASH. Elle est apparue avec l’utilisation des antirétroviraux, et peut être aggravée par le diabète.