Dès 1996, en cas de risque d’infection par le VIH, dans le cadre professionnel, un traitement prophylactique (AZT/zidovudine) était disponible pour les soignantEs afin d’éviter une contamination. Depuis 1998, et grâce au combat d’Act Up-Paris, l’accès à un traitement prophylactique est possible en cas de risque sexuel, ou d’exposition non-professionnelle.
Ainsi, en cas d’exposition accidentelle au VIH (sang, sperme), il est possible de prendre en urgence un traitement préventif, appelé Traitement Post Exposition qui a pour but d’empêcher la transmission du virus dans le sang. En aucun cas, cette possibilité ne doit faire oublier que le préservatif reste le seul moyen efficace de prévention. En effet, les TPE sont des traitements lourds dont l’efficacité n’est pas assurée à 100 %. Les traitements d’urgence sont donc indispensables en cas de prise de risque, mais ne peuvent pas justifier abandon ou relâchement dans la prévention.
Le TPE : pour qui ?
Toute personne confrontée à un risque de transmission du VIH peut disposer de ce traitement d’urgence, quelle que soit la raison de l’exposition accidentelle au VIH : le personnel soignant n’a pas à faire de distinction et doit délivrer le TPE, lorsque c’est nécessaire, sans aucune discrimination. Le traitement est accessible aux mineurEs sans accord parental. La circulaire encadrant le dispositif impose également l’accès des détenuEs aux services d’urgence pour bénéficier d’un TPE. Ces traitements doivent être systématiquement proposés aux victimes de viol.
Si vous êtes séropositifs le TPE vous concerne aussi. Il permet de proposer à votre partenaire de recevoir un traitement pour réduire le risque de transmission du VIH en cas de rupture de préservatif par exemple. Il est important que vous puissiez informer votre partenaire de son existence et de votre statut sérologique. Même s’il s’agit d’une rencontre occasionnelle, n’hésitez pas à l’accompagner aux urgences.
Le TPE : quand ?
Le traitement doit commencer le plus tôt possible, dans la limite maximum de 48 heures mais au mieux avant la 4ème heure suivant l’exposition. Concrètement, après une prise de risque, il est nécessaire de se rendre immédiatement au service d’urgence le plus proche. Après exposition de la situation au personnel soignant et un bilan sanguin, la stratégie préventive est alors envisagée. Il est recommandé de se rendre aux urgences avec son ou sa partenaire, afin que le médecin puisse avoir le maximum d’éléments qui l’aideront dans la prise de décision de mise sous traitement. Si la personne avec qui vous avez été exposéE à un risque est séropositive et sous traitements, demandez-lui, si elle accepte, de vous indiquer les médicaments qu’elle a déjà pris. Ces informations peuvent orienter le choix et l’efficacité du traitement qu’on vous donnera : le virus auquel vous avez été exposé est peut-être résistant à certains médicaments qu’il faut donc éviter. N’attendez pas avant de vous rendre aux urgences, même si l’exposition au risque a eu lieu pendant la nuit. La précocité de la mise sous traitement garantit son efficacité. Si vous ne connaissez pas le service d’urgence le plus proche de chez vous, contactez Sida Info Service (0 800 840 800) et exposez votre situation.
Rappel : « L’efficacité préventive du traitement post-exposition au VIH (TPE) est conditionnée par la précocité et l’adaptation du traitement au profil de résistance du virus du patient source. » Rapport Yéni 2006
Le TPE : où ?
En cas de prise de risque en journée, rendez-vous à l’hôpital, dans le service consacré aux maladies infectieuses, où sont suivies les personnes vivant avec le VIH. Il est possible que l’on vous oriente vers le CDAG hospitalier qui peut avoir pour mission de gérer ces situations d’urgence. La nuit ou en dehors des heures ouvrables, rendez vous aux urgence hospitalières et indiquez clairement les raisons de votre venue afin de ne pas perdre de temps. Le TPE fait partie des urgences prioritaires.
Le TPE : quoi et comment ?
Le TPE consiste en un traitement antirétroviral, couvert à 100 % par la Sécurité sociale et délivré par la pharmacie de l’hôpital. Il est d’abord prescrit pour deux ou trois jours, puis réévalué après une nouvelle visite médicale. Pour être efficace, la prise du traitement doit durer 28 jours, avec au moins deux visites de suivi pour surveiller leur tolérance. Il s’agit des mêmes médicaments que ceux pris par les personnes vivant avec le VIH. Le traitement recommandé actuellement se compose de deux analogues nucléosidiques et d’une antiprotéase. Les principales molécules prescrites sont décrites dans le « Rapport Yéni ». Les effets indésirables des traitements peuvent parfois être durs. Pendant le mois où dure le TPE, informez-vous auprès des associations de lutte contre le sida des moyens de gérer au mieux ces contraintes. Ces effets indésirables ne doivent jamais être l’argument d’un arrêt de traitement. S’ils sont trop éprouvants, contactez un médecin spécialiste du VIH.
Attention : Nous recevons régulièrement des témoignages de personnes qui ont été confrontées à des refus injustes de mise sous traitement. Cela peut tenir au fait que le médecin des urgences connaisse mal le dispositif, ou sous-évalue le risque que vous lui avez exposé. Dans la mesure du possible, faites-vous accompagner, rappelez au personnel l’existence de la circulaire de 2003 et n’hésitez pas à contacter une association de lutte contre le sida ou Sida Info Service si vous vous heurtez à un refus non motivé.
Initialement le 100 % concernant le TPE portait sur l’ensemble des actes. Aujourd’hui, selon les hôpitaux, il est possible que le ticket modérateur des examens et des consultations soit à votre charge. Si vous n’avez pas de mutuelle, vous pouvez prendre contact avec une assistante sociale de l’hôpital pour obtenir l’annulation de ces frais. Si vous êtes mineurEs et que vous ne souhaitez pas que vos parents soient informés, signalez-le au médecin qui pourra faire prendre en charge par l’hôpital les frais afférents.
Et après ?
Le TPE n’étant pas efficace à 100 % il est nécessaire d’effectuer des tests pour s’assurer de son statut sérologique, et d’avoir un suivi sur 3 mois après l’arrêt du traitement. Un test de dépistage est possible 10 à 15 jours après la prise de risque, mais le résultat n’indique pas nécessairement que vous n’avez pas été contaminé. Il doit être renouvelé 4 mois après l’accident pour être certain d’être séronégatif. En cas de séropositivité, il est important de consulter un médecin spécialiste. Vous pouvez aussi contacter les associations de lutte contre le sida qui peuvent vous informer et vous aider.
L’usage du préservatif est particulièrement recommandé après une exposition au risque. Si vous êtes en couple et que vous n’utilisez pas de préservatif avec votre partenaire, il est donc important de pouvoir en parler avec lui. Ne sachant pas si vous avez été contaminé pendant cette période de 4 mois, vous devez systématiquement utiliser le préservatif et ne pas faire de don du sang.
Est-ce que ça marche ?
Des études prospectives ont montré a posteriori que ce traitement pouvait être efficace. Mais il existe peu d’éléments scientifiques et peu de données cliniques permettant de valider les recommandations produites. Ce qui a pu être constaté, c’est que la zidovudine (AZT) avait un effet protecteur réduisant le risque de séroconversion pour le VIH d’environ 80 %. Cependant, des cas de transmission ont été rapportés malgré la mise en place rapide d’un TPE. Deux cas de séroconversion bien documentés, malgré une trithérapie adaptée et débutée dans les quatre heures après l’exposition, illustrent l’efficacité incomplète de cette stratégie.
Aux États-Unis, une équipe de San Francisco a suivi pendant douze semaines 702 personnes ayant reçu une prophylaxie après une exposition au VIH, hors cadre des professions de santé. Elle a observé une séroconversion chez 1 % d’entre elles (prises de risque multiples après le TPE, mauvaise observance, initiation tardive du TPE). Bref, s’il ne faut pas négliger les limites ou les risques des TPE, leur intérêt reste évident. Cependant Il n’est pas fiable à 100 %, il est lourd et contraignant.
MAIS EN AUCUN CAS CE DISPOSITIF NE DOIT ETRE COMPRIS COMME UN SUBSTITUT A LA CAPOTE.
Pour les soignantEs
Il est recommandé au personnel de santé un accompagnement des personnes exposées et la prévention des accidents ultérieurs. La demande de prise en charge procède d’une démarche positive qui justifie les actions suivantes :
– fournir un accueil de qualité, non jugeant et non stigmatisant de la personne consultant dans le cadre du dispositif, comportant une information précise sur le dispositif et son déroulement ;
– être attentif à l’état émotionnel et psychique de la personne exposée et, éventuellement, lui proposer une consultation psychologique ou psychiatrique si nécessaire ;
– mettre en place, dans les services d’accueil, un dispositif d’éducation thérapeutique (consultation de soutien et d’accompagnement, counseling, etc.) dès l’initiation du traitement ;
– donner précisément, dès la première consultation, les rendez-vous de suivi en s’adaptant au mode de vie de la personne ;
– informer sur les relais extrahospitaliers disponibles pouvant soutenir et accompagner la personne exposée (dont Sida Info Service) et sur les lieux donnant accès aux outils de prévention (préservatif féminin, masculin, gel lubrifiant, stéribox, kitsniff…) ;
– prévoir le même accompagnement dans le dispositif pour les autres risques à prendre en compte (hépatites, IST, grossesse…) ;
– au cours de la prise en charge de la personne exposée, ne pas oublier de faire le point sur ses pratiques à risque d’afin d’améliorer ses stratégies de prévention.
Le groupe d’expertEs recommande :
– de limiter la prescription d’antirétroviraux dans le cadre du TPE aux situations où le risque est patent ;
– de rechercher activement le statut sérologique VIH de la personne source, à l’aide des tests rapides anti-VIH ;
– de disposer de trousses d’antirétroviraux au sein des services d’urgence afin de favoriser un traitement le plus précoce possible ;
– de faire réévaluer l’indication du traitement et le schéma prescrit, après 72 à 96 heures, par un médecin spécialiste du VIH ;
– de traiter par une trithérapie comportant deux INTI et un IP/r, pour une durée totale de 28 jours. Un test génotypique de résistance sera réalisé en urgence, si la personne source est en échec thérapeutique, afin de pouvoir adapter le traitement initialement prescrit à la personne exposée ;
– de poursuivre le suivi sérologique VIH jusqu’à 4 mois en cas de traitement et jusqu’à 3 mois en l’absence de traitement. La prise en compte des autres risques viraux, VHB et VHC, et des autres IST ne doit pas être négligée ;
– aux COREVIH, d’organiser la mise en place et l’évaluation du dispositif de prévention et de prise en charge des accidents d’exposition.