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Dans certains pays du Sud, la parité est plus qu’atteinte, elle est dépassée. Inégalité devant l’éducation et l’information, domination statutaire des hommes, disparités accrues face aux revenus et à l’emploi, la féminisation de l’épidémie se fait, plus encore au Sud qu’au Nord, sur le lit des inégalités hommes-femmes.

Depuis dix ans, des pans entiers de la recherche prennent argument de la domination des femmes : si les femmes « n’arrivent pas à imposer le préservatif », offrons leur de nouvelles technologies. Doit-on se satisfaire de l’idée que la négociation du préservatif avec les hommes a échoué ? Microbicides, prophylaxie pré-exposition, vaccin, ces chantiers de la recherche n’ont encore pas servi les femmes. Voire, ne risquent-elles pas de faire les frais des stratégies les plus récentes de la recherche ?

Au nom des femmes, la recherche sur les microbicides. Au nom de la recherche d’outils de prévention dont les femmes aient la maîtrise (qui ne demandent pas l’assentiment des hommes), des essais scientifiques ont recruté par milliers des femmes du Sud, pour la recherche d’alternatives à l’usage du préservatif. Plus de quinze candidats microbicides sont actuellement à l’étude, dont quatre en phase III, qui incluent environ 30 000 femmes, recrutées en grande majorité dans les pays d’Afrique subsaharienne. L’objectif affiché de ces essais est louable, mais les résultats restent jusqu’à présent peu convaincants : combien de femmes contaminées depuis dix ans au travers de ces protocoles, d’avoir testé des produits d’efficacité aléatoire ou été placées sous placebo ? Combien de femmes aujourd’hui malades pour avoir participé à ces essais, dans des pays où l’accès aux traitements reste rare et la pauvreté constitue une entrave majeure aux soins ?

La circoncision, un danger pour les femmes ? L’OMS et l’ONUSIDA ont recommandé d’élargir l’accès à la circoncision aux pays « connaissant une épidémie hétérosexuelle généralisée ». Ces recommandations s’appuient sur des résultats récents d’essais qui montrent que la circoncision peut réduire le risque de transmission de la femme vers l’homme. Or, si elles rappellent l’importance du préservatif, elles ne posent pas la question de leur impact sur les femmes. A cette date, pourtant, un essai a prouvé la quasi absence d’effets de la circoncision pour les femmes, et un autre a montré une hausse des risques d’infection pour les partenaires dans les semaines qui suivent l’opération. Aujourd’hui, aucune étude comportementale n’a été menée pour vérifier que la promotion de la circoncision n’encourage pas davantage à l’abandon du préservatif, et donc à exposer plus de femmes à des risques de transmission. Ainsi, sur la base de résultats scientifiques qui concernent seulement la moitié de la population mondiale, et sans attendre des données plus complètes sur les femmes, des Agences de santé s’autorisent à promouvoir une mesure qui pourrait aggraver la pandémie chez les femmes. Si la recherche de nouveaux moyens de prévention est indispensable, c’est aujourd’hui une fausse réponse aux problèmes rencontrés par les femmes.

Nous exigeons :
– Que tout soit mis en oeuvre pour que l’accès universel au traitement du sida devienne réalité dès 2010, et que l’accès des femmes y soit garanti à l’égal des hommes.
– Que les enjeux de genre soient systématiquement rappelés dans la lutte contre le sida : l’inégalité des rapports hommes-femmes, passée sous silence, limite l’efficacité de toute solution technique.
– Qu’en attendant le développement de moyens de prévention alternatifs, l’usage et la disponibilité des préservatifs soient partout développés et imposés.
– Que l’OMS et l’ONUSIDA reviennent sur leurs recommandations tant que des données plus complètes sur l’impact de la circoncision chez les femmes ne sont pas disponibles.