Dans sa dernière campagne télévisée de prévention grand public, l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (Inpes) prend enfin le choix d’aborder sur le même plan homosexualité et hétérosexualité à l’égard du VIH. Alors qu’une association de lutte contre le sida comme Act Up-Paris, issue originellement de la communauté homosexuelle, aurait pu se féliciter d’un tel pas fait en direction d’une population trop souvent discriminée et censurée, cette avancée sur le plan médiatique et de la communication égalitaire ne semble que passagère et ne constitue malheureusement en rien un acquis.
Pour preuve, le Bureau de vérification de la publicité (BVP) vient de publier un avis visant à retirer une récente affichede l’Inpes présentant deux hommes allongés l’un sur l’autre. Cette décision fait écho à des plaintes formulées à l’égard d’une publicité télévisée Dolce & Gabbana diffusée récemment, exposant un couple d’hommes et un couple de femmes.
Comme pour se justifier d’avoir autorisé la diffusion au grand public d’une publicité TV vendant des montres et mettant en scène deux gays et deux lesbiennes s’embrassant entre eux, le BVP s’acharne à vouloir censurer une affiche de prévention sida exposant deux hommes nus. Or, cette campagne produite par l’Inpes, organe public dépendant du ministère de la Santé, a été le fruit d’un travail collaboratif mené par l’artiste reconnue Nan Goldin et une consultation des associations de lutte contre le sida, dont Act Up-Paris fait partie.
Dès lors, au nom de quoi une association de professionnelLEs de la pub qu’est le BVP viendrait à demander le retrait d’un tel message de prévention ? Au nom d’une fausse « doctrine déontologique » venant dénoncer dans ce cas l’exposition de personnages ouvertement homosexuels dont les postures « hyper-sexualisées » et les propos seraient « choquants pour le grand public ».
Or, cette affiche de l’ Inpes a fait l’objet d’une campagne ciblée et destinée à une communication dans le quartier parisien du Marais et la presse gay. Et quand bien même aurait-elle fait l’objet d’une diffusion beaucoup plus généralisée auprès du grand public, elle n’adopte aucune posture « hyper-sexualisée », et ne présente même pas l’once d’une partie intime.
Incontestablement, le BVP adopte encore une fois une position homophobe, à l’instar de celle qu’il avait pu avoir lors de l’histoire des affiches du métro parisien pour le salon LGBT « Rainbow attitude ». Il y a peu, cet organe de contrôle avait aussi fermé les yeux sur un spot de pub transphobe, dont Act Up-Paris a pourtant obtenu le retrait.
Act Up-Paris dénonce cette sempiternelle homophobie des organes de contrôle des médias. De même que l’irresponsabilité criminelle de ces organes qui font preuve, outre d’une pudibonderie déplacée, d’une rare incompétence puisqu’ils mettent sur le même pied des publicités commerciales et des messages publics de prévention. C’est d’autant plus inadmissible que, 25 ans après le début de l’épidémie en France, nous ne pouvons plus nous contenter de messages de prévention hétéro-normés et empreints de mièvrerie.
Act Up-Paris exige :
– que cette affiche continue à être diffusée auprès de la population gay et du grand public
– que les messages de prévention fassent l’objet de campagnes grand public ciblées, multipliées et explicites
– que l’Inpes et le ministère de la Santé condamnent la position de censure du BVP sur ces message de prévention.
-que le BVP reçoive les organisations de lutte contre le sida afin d’être enfin informée des réalités de l’épidémie et du caractère absurde de ses positions en la matière.