Le 8 janvier dernier, le Comité National de Lutte contre le Sida du Cameroun émettait une circulaire auprès des centres de prise en charge des malades du sida de tout le pays. La mobilisation nationale et internationale a eu raison de ce grand pas en arrière.
Le texte du CNLS, structure institutionnelle camerounaise remettait en cause la prise en charge, déjà insuffisante, d’examens sanguins (CD4, NFS, transaminases, et glycémie). Jusqu’à aujourd’hui, sur des bilans estimés à 21 000 Francs CFA (environ 32 euros), l’Etat en payait 18 000 et le reste était à la charge du malade. Trop cher, explique le CNLS, qui évoque « un grave dérapage budgétaire » pour 2007 et fixe des quotas de bilans sanguins au-delà desquels la prise en charge publique cessera. Cela signifie donc, concrètement, la multiplication par 7 du coût pour les malades de ces examens indispensables à l’élaboration de stratégies thérapeutiques. Dans un pays où 80 % des malades touchent 30 euros par mois, on leur demande donc de payer des examens routiniers 32 euros, alors même que le Cameroun s’était engagé à assurer aux séropositifVEs la gratuité de ces bilans pour 2008.
Le « dérapage budgétaire » n’est jamais justifié. Pourtant, le Cameroun, qui reçoit de l’argent du Fonds Mondial, notamment pour financer ces examens, est autorisé à consacrer une part de cette subvention à la réalisation d’un audit de son utilisation par les administrations locales. Aucune enquête de cette sorte n’a été utilisée : le gouvernement n’a qu’à s’en prendre à lui-même, et pas aux malades, s’il a été incapable d’anticiper une éventuelle explosion des dépenses, qui restent à prendre au conditionnel. De la même manière, les critères qui ont présidé à la fixation de ces quotas sont des plus flous.
La société civile, les malades en tête, se mobilise. Une manifestation a eu lieu le 20 février, notamment à l’initiative du Mouvement Camerounais Pour l’Accès aux Traitements (Mocpat), relayée par un zap d’Act Up-Paris devant l’ambassade du Cameroun en France. Finalement, le gouvernement a décidé d’annuler la circulaire du CNLS et diligente un groupe de travail, auquel participeront les malades, pour trouver des solutions de financement. Ce recul est donc une belle victoire, mais ne résout en rien le problème de fond : les activistes vont maintenant devoir obtenir de leur gouvernement la transparence totale sur l’utilisation de l’argent du Fonds Mondial, de façon à faire au mieux pour que, dans le cadre du nouveau financement, la demande du Cameroun soit adaptée aux besoins et que la subvention soit utilisée de façon transparente et efficace.