Le 14 juillet 2008, le laboratoire Roche annonçait qu’il cessait ses recherches sur les médicaments contre le sida. Quelques semaines auparavant, des représentantEs de ce laboratoire suisse affirmaient le contraire auprès des malades du sida représentéEs par le TRT-5 : est-ce que les mots « mensonge », « malhonnêteté » ou « hypocrisie » vont encore nous valoir un procès ?
La mollesse du développement commercial du saquinavir (Invirase®), la difficulté du développement du T-20 (enfuvirtide, Fuzéon®), l’arrêt du soutien à Triméris en 2002, la suspension du nelfinavir (Viracept®) contaminé l’an dernier, une farouche résistance à l’évaluation du Biojector comme moyen plus confortable d’injection du T-20, tous ces éléments indiquent que le laboratoire Roche mérite bien la réputation que l’ensemble de la communauté des personnes vivant avec le VIH lui fait : le meilleur gâcheur de talent de l’industrie pharmaceutique anti-VIH. Roche n’a jamais innové dans ce domaine mais plutôt acheté des produits à de jeunes firmes pour s’empresser de gâcher leur commercialisation. Les firmes innovantes sont ailleurs aujourd’hui. A côté de cela, il est aisé de comprendre que l’image de marque désastreuse d’un an d’arrêt d’un antirétroviral en perte de vitesse pour contamination à la fabrication incite Roche à changer son fusil d’épaule et miser sur d’autres domaines thérapeutiques plus lucratifs, et dont les malades savent se montrer moins activistes. De plus, l’industrie pharmaceutique justifie la protection des brevets sur ses traitements par le risque qu’elle prend sur la recherche et le développement de nouvelles molécules. Vu que le laboratoire arrête la recherche contre le sida, Roche doit abandonner dès maintenant ses brevets sur ses antirétroviraux et permettre à chaque pays d’importer ou de produire des génériques. Le prix actuel de la dernière molécule de Roche, le T-20, est totalement exorbitant, ce qui le rend inaccessible aux malades des pays pauvres, et grève le budget des systèmes de santé des pays qui assurent le remboursement de ce médicament. Or, Roche avait justifié ce prix auprès des associations de malades, en 2003, au nom du coût de la recherche future, cette même recherche que le laboratoire interrompt aujourd’hui parce qu’elle durerait trop longtemps et ne serait pas assez rentable. Une question supplémentaire nous inquiète : que deviendront les médicaments antirétroviraux actuellement commercialisés ? Nous exigeons donc des garanties du laboratoire quant au maintien de la production de ces molécules. De plus, certaines molécules de Roche sont arrivées sur le marché il y a peu de temps. Le retrait du laboratoire dans la recherche VIH, leur évite ainsi de monter les études post-AMM qui sont pourtant essentiel dans le suivi à long terme du devenir de ces molécules. Espérons que le service de pharmaco-vigilance du laboratoire fera correctement son travail. Le laboratoire entend-il rembourser les malades et les systèmes de soins qui ont payé au prix fort des médicaments au nom d’une recherche que Roche ne mènera pas ? Cette même question peut aussi être adressée au ministère de la Santé, aux députéEs et sénateuRICEes : plutôt que de faire payer aux malades le coût de la santé par des mesures comme celles des franchises, pourquoi nos dirigeantEs n’imposent-ils/elles pas une politique de prix qui oblige l’industrie pharmaceutique à une certaine éthique qu’elle ne respecte pas actuellement ?