Fin 2007, les COREVIH (COordination REgionale de lutte contre le Virus de l’Immunodéficience Humaine) ont remplacé les anciens CISIH (Centres d’Information et de Soins de l’Immunodéficience Humaine). Ces derniers avaient été créés en 1988 dans un contexte d’urgence épidémiologique et leur évolution était indispensable. En effet, depuis 1988, le nombre de séropositifVEs n’a cessé d’augmenter en France et l’arrivée des antirétroviraux en 1996 a certes amélioré le pronostic vital des malades, mais les effets indésirables des traitements, ainsi que les co-infections par les virus des hépatites, ont saboté notre qualité de vie et limité les espoirs de survie de certainEs d’entre nous.
En 13 ans, l’épidémie a considérablement modifié la prise en charge médicale classique, telle qu’on l’entendait avant le sida et a imposé de nouveLLESaux acteurRICEs dans les systèmes de soins et de recherche. Par ailleurs, les associations de malades sont devenues des interlocutrices incontournables des médecins, des chercheurSEs et des autorités.
Le rapport du groupe d’expertEs de 2002 coordonné par le Professeur Delfraissy dans le chapitre consacré à l’organisation de soins, avait recommandé cette évolution devant les nouveaux enjeux de la prise en charge et les nouveaux/elles acteurs/trices à intégrer et le Conseil National du Sida (CNS) avait appuyé le projet de réforme. Ainsi, outre l’extension du champ des missions et des compétences des COREVIH par rapport aux CISIH, l’importance de la réforme réside dans le lien qui est fait entre l’intérieur et l’extérieur de l’hôpital ainsi que dans la place qui est donnée, tant aux associations de malades et d’usagerEs du système de santé, qu’à celles de soutien et d’insertion.
Le COREVIH est donc un acteur à part entière de la démocratie sanitaire et tient un rôle plus qu’important dans la mise en places des politiques de lutte contre le sida.
Un acteur important dans les politiques de lutte contre le VIH
Implantés au niveau régional, selon un maillage national adapté aux contextes locaux, les COREVIH participent à la réponse qui doit être donnée aux nouveaux enjeux de la lutte contre le VIH. Qu’il s’agisse de mettre en adéquation l’organisation de la prise en charge et les besoins des patientEs ou d’améliorer leur prise en charge globale et leur qualité de vie aux différents stades de la pathologie, les COREVIH se positionnent comme un acteur important de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique de lutte contre l’épidémie de l’infection par le VIH. En effet, le décret du 15 novembre 2005 lui donne trois missions principales:
A – Favoriser la coordination des activités des acteurs/trices de la lutte contre le sida.
Il s’agit de la coordination de l’ensemble des professionnelLEs du soin, de l’expertise clinique et thérapeutique, du dépistage, de la prévention et de l’éducation pour la santé, de la recherche clinique et épidémiologique, de la formation, de l’action sociale et médico-sociale, ainsi que des associations de malades ou d’usagerEs du système de santé.
Le COREVIH représente l’ensemble des acteurs/trices de la lutte contre l’infection à VIH pour la région, sans positionnement hiérarchique d’unE ou de l’autre des acteurs/trices. Ce n’est pas un opérateur direct, c’est à dire qu’il n’a pas vocation à mener lui même des actions sur le terrain. Les missions coordonnées par le COREVIH sont réalisées par les acteurs/trices qui en ont la charge, le COREVIH étant chargé d’en améliorer la complémentarité, la cohérence et la diffusion.
B – Améliorer la qualité de la prise en charge des malades par une rencontre pluridisciplinaire et harmoniser les pratiques au sein du territoire.
Il s’agit d’un travail collectif basé sur la confrontation et les échanges de pratiques, l’évaluation de celles-ci et l’harmonisation des protocoles et procédures. A titre d’exemple, cela concerne : le dépistage, le suivi des personnes co-infectées par les virus des hépatites, les modalités de l’annonce, les stratégies de suivi des perdus de vue, le soutien et l’accompagnement …
Le COREVIH s’appuie sur les recommandations et rapports produits par les experts et différentes agences nationales telles l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites (ANRS), l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), l’Institut de veille sanitaire (InVS), l’Agence française de sécurité des produits de santé (AFSSAPS) ou la Haute autorité de santé (HAS).
C – Analyser l’ensemble des données médico-épidémiologiques.
C’est à partir des données recueillies sur le territoire, analysées et discutées que chaque COREVIH se questionne et établit un diagnostic partagé de la situation locale, afin de réfléchir et de proposer les réponses les plus adaptées.
Une base de données spécifiques, appelée communément le DMI2, permet de disposer d’informations médico-économiques, mais connaît des limites (recueil non exhaustif, délai de disponibilité des résultats …).D’autres informations épidémiologiques existent également, en particulier sur l’incidence des nouvelles contaminations par le VIH et du sida (maladies à déclaration obligatoire) ou sur l’activité des structures de dépistage et des associations.
L’analyse de l’ensemble de ces données permettra au COREVIH de contribuer à l’élaboration d’un diagnostic partagé.
Ces missions placent le COREVIH comme interlocuteur privilégié des services décentralisés dans leur mission d’élaboration et de mise en œuvre de la politique de lutte contre l’infection à VIH, en particulier dans le cadre du Schéma Régional d’Organisation des Soins (SROS III) et du Plan Régional de Santé Publique (PRSP).
Par ailleurs, chaque établissement de santé qui prend en charge des patientEs est rattaché à un COREVIH et l’ensemble des acteurs/trices de la lutte contre le sida sont ou peuvent être associéEs aux COREVIH, soit en étant représentantE de leur catégorie comme membre du COREVIH soit en participant aux activités d’un de ses groupes de travail, soit en étant informéE des activités du Comité.
C’est donc bien l’ensemble de la lutte contre le sida au niveau régional qui se trouve coordonné par le COREVIH. Cette activité de coordination est par ailleurs assurée selon un fonctionnement particulièrement démocratique.
Une instance de démocratie sanitaire
L’originalité des COREVIH réside notamment dans son caractère démocratique qui se retrouve tant dans sa composition que dans ses modalités de fonctionnement.
A – La composition du COREVIH.
Le COREVIH constitue un vrai tour de tables des acteurs/trices de la lutte contre le sida, touTEs y sont représentéEs sans exeption.
Ainsi, le COREVIH est composé de 30 membres titulaires au plus, pour un mandat de 4 ans, qui se répartissent en 4 collèges :
– Collège 1 : représentantEs des établissements de santé, sociaux et médico sociaux
– Collège 2 : professionnelLEs de santé et de l’action sociale
– Collège 3 : des représentantEs des malades et des usagerEs du système de santé
– Collège 4 : des personnalités qualifiées
Le collége 3 doit représenter au minimum 20 % des membres du COREVIH : il s’agit d’une reconnaissance du travail réalisé, depuis le début de l’épidémie, par les militantEs associatifVEs dans tous les domaines de la lutte ontre le sida.
Désormais, c’est au niveau régional, au plus près du terrain, via les COREVIH, que notre contre-expertise permet de franchir une nouvelle étape dans notre partenariat avec les soignantEs en vue d’améliorer la prise en charge médicale et sociale des malades !
B- La nomination des membres.
La nomination des représentantEs au sein des COREVIH fait l’objet d’une large concertation. Une place prépondérante est donnée à la démocratie.
Celle des représentantEs des malades et des usagerEs est spécifique. En effet, la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, prévoit que les associations peuvent représenter les usagerEs du système de santé dans les instances hospitalières ou de santé publique. Afin de garantir une certaine sécurité et de s’assurer de la légitimité des associations à être représentante des malades et des usagerEs, a été instauré un mécanisme d’agrément des associations au niveau national et au niveau régional. La mise en place des COREVIH, en tant qu’instance de santé publique, n’a pu déroger à ses principes et les représentantEs des malades et des usagerEs ont été désignés parmi les candidatEs proposéEs par les associations agrées.
C – La représentation qui est confiée aux membres du collège 3.
Toutes les associations présentes sur le territoire de référence d’un COREVIH n’ont pas obligatoirement unE membre pour les y représenter. Les associatifVEs présentEs sont inscritEs dans un réseau inter-associatif, régional et national, qui a pour rôle de soutenir et d’informer, de conseiller et d’appuyer sur tous les enjeux de la lutte.
Ainsi, les représentantEs associatifVEs participent aux COREVIH : au nom de toutes les personnes séropositives, usagerEs ou non des associations, quels que soient le mode de transmission, l’âge, le sexe, le genre, l’orientation sexuelle, l’origine géographique ; en tant que personnes affectées ; au nom de toutes les associations, même celles qui ne sont pas représentées.
Il est incontestable que la démocratie est un fondement du COREVIH. Par ailleurs, la réforme l’a doté de moyens celui-ci est un acteur à part entière
Un acteur à part entière
Le COREVIH est un acteur autonome qui reste cependant en lien avec son environnement.
A – Des moyens qui lui sont propre.
Les moyens dont il s’agit ici sont ceux spécifiquement dédiés à la réalisation des missions propres aux COREVIH et ne sont pas à confondre avec les moyens de la prise en charge des malades.
La réforme s’est effectuée dans le cadre de l’enveloppe MIGAC (Mission d’intérêt général et d’aide à la contractualisation). Des moyens existaient déjà, sous la forme d’enveloppes fléchées antérieurement attribuées aux CISIH. Les moyens mis en œuvre sont, pour chaque COREVIH, au minimum, un local identifié, un temps de secrétariat, un temps administratif et/ou médical de coordination, du temps de technicienNE d’études cliniques (TEC).
A ces moyens existants, il a été nécessaire, parfois, d’ajouter de nouveaux moyens pour répondre aux nouvelles missions des COREVIH : un travail plus important de coordination en raison du plus grand nombre d’acteurs/trices, une plus grande activité d’information, l’animation d’un site internet…
La Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins (DHOS) a proposé un modèle afin d’évaluer les moyens nécessaires au fonctionnement de chaque COREVIH.
A partir de cette base, une augmentation des moyens a été calculée en fonction de l’importance de la file active suivie par le COREVIH. Ainsi, au titre d’exemple, une file active de 3 250 personnes s’est vue attribuer 5 emplois de TEC supplémentaires
B – Un fonctionnement qui lui est propre.
Le COREVIH installe un bureau élu « pluriel » composé au maximum de neuf membres, dont unE présidentE et unE vice présidentE. Le bureau comprend au moins unE membre des trois premières catégories citées ci-dessus.
Il tient au moins 3 réunions plénières par an dont au moins une en présence des DDASS, DRASS et ARH. Il choisit librement le nombre et les thèmes des réunions supplémentaires. Il dispose d’un circuit d’information efficace : internet, liste de diffusion… Chaque COREVIH est tenu de se doter d’un règlement intérrieur er de publier un rapport annuel d’activité.
En Île de France, un accord de principe a été obtenu pour la création d’un « inter COREVIH » pour travailler sur des sujets transversaux comme les soins de suite, la précarité…
C – Lien avec son environnement.
Le COREVIH est autonome, mais reste en lien avec son environnement : services décentralisés, conseils généraux, assurance maladie, Centres Régionaux d’Information et de Prévention du sida (CRIPS), réseau des Comités Départementaux d’Education pour la Santé (CODES).
Les services de l’Etat ne sont pas membres des COREVIH mais ont un rôle dans leur installation et la nomination de leurs membres. Une fois lconstitués, ils participent à leur animation et sont nécessairement présents à l’une des trois réunions annuelles du COREVIH. Ils veillent à l’articulation des activités des COREVIH avec les politiques régionales de santé et d’hospitalisation – Schéma Régional d’Organisation des Soins (SROS) et Plan Régional Santé Publique (PRSP). Ils seront également à leur écoute, les COREVIH faisant remonter les expériences du terrain, les besoins et les questions.