Sexe et infection à VIH – progression et différences entre femmes et hommes[[#294 sur www.retroconference.org]]
L’investigatrice présentant ses travaux rappelle d’emblée que les spécificités de l’immunité féminine et de la réponse des femmes à l’infection par le VIH sont pratiquement inconnues. L’existence de variabilités cycliques caractéristiques de la physiologie féminine peut certes compliquer les études, mais il faut bien noter que rares sont les travaux décrivant des spécificités féminines. La raison en est que, historiquement, la recherche médicale s’est désintéressée de la question des différences entre les deux sexes – en se focalisant pourtant sur les hommes, comme nous ne cessons de le rappeler au vu des faibles pourcentages de femmes recrutées dans les essais aujourd’hui, alors que l’épidémie s’est féminisée.
Le travail présenté complète donc de trop rares études antérieures en s’attachant à identifier les différences pouvant rendre compte du risque accru pour les femmes, par rapport aux hommes donc, d’entrer dans la phase sida. En comparant différents acteurs de la réponse immunitaire (cellules dendritiques, production d’interféron gamma), la réponse immune dite innée[[Celle qui est la première à combattre les éléments étrangers s’infiltrant dans notre corps, par opposition à la réponse dite acquise.]] semble avoir un rôle pivot et apparaît comme l’explication de la différence entre les deux sexes en termes d’activation immune et de progression de la pathologie.
Etude DIVA 01 – raltegravir et pénétration vaginale[[#608 sur www.retroconference.org]]
Chaque médicament a son propre profil de distribution dans l’organisme, avec des différences observées au niveau de différents tissus. Pour les antirétroviraux, une charge virale contrôlée mesurée en routine au niveau sanguin informe si le contrôle est effectif dans le sang, mais ne signifie pas nécessairement que c’est le cas partout dans l’organisme. En particulier, il est crucial de contrôler la virémie au niveau du tractus génital de la femme. Ceci permet d’éviter la transmission verticale au bébé ou une transmission sexuelle, mais aussi d’éviter l’émergence de résistance dans le compartiment génital. L’apparition de telles résistances du virus à ce niveau aurait pour conséquence de permettre à la fois la transmission d’un virus résistant d’emblée, mais aussi, parce que le virus peut circuler d’un compartiment à l’autre de l’organisme, de permettre au VIH de se retrouver sous forme résistante au niveau sanguin.
Dans le cadre d’une étude systématique de l’accessibilité des antirétroviraux au niveau des organes génitaux chez les femmes séropositives, plusieurs investigateurs d’équipes françaises ont présenté des données de pénétration de l’inhibiteur d’intégrase raltegravir dans le compartiment cervico-vaginal. L’étude DIVA 01 présente le cas du raltegravir et devrait être suivie d’études DIVA similaires pour les autres antirétroviraux.
L’étude a porté sur 14 femmes séropositives de plus de 18 ans et non enceintes avec une charge virale plasmatique contrôlée depuis au moins trois mois. De plus, au cours des deux jours précédents, elles ne devaient pas être en période de règles, avoir eu un rapport sexuel, ou effectué un traitement intra-vaginal. A moins d’une heure d’intervalle, une collecte de sang et de fluide cervico-vaginal est effectuée pour y doser les quantités de raltegravir et de VIH. Le seuil de détection avec la méthodologie utilisée était de 40 copies par millilitre pour le sang et 200 copies par millilitre pour le liquide cervico-vaginal.
Les investigateurs ont trouvé que le raltegravir se distribue plus efficacement dans le compartiment cervico-vaginal que dans le sang – le rapport est d’un facteur 2,3, avec une concentration de cet antirétroviral 16 fois supérieure à la concentration qui permet de bloquer à 95 % l’infection par le VIH-1 dans des essais en laboratoire. Toutes les femmes présentaient une charge virale contrôlée au niveau cervico-vaginal (inférieure à 200 copies/mL), malgré la présence d’une infection vaginale asymptomatique chez trois d’entre elles. La charge virale plasmatique était inférieure à 40 copies/mL, mis à part chez deux femmes (169 et 88 copies/mL), mais les investigateurs notent qu’il s’agit de blips, dans la mesure où d’autres évaluations plasmatiques entourant l’étude présentée conduisaient à l’indétectabilité. Enfin, il n’y avait pas de corrélation entre la quantité de raltegravir dans le sang et le fluide cervico-vaginal, ni entre la quantité retrouvée dans ce liquide et la durée de prise de l’antirétroviral.
Les auteurs de l’étude concluent sur l’intérêt potentiel du raltegravir en combinaison avec d’autres antirétroviraux connus pour bien pénétrer dans le tractus génital pour des stratégies de prévention de la transmission du virus ou d’émergence de résistance.