MilitantEs d’associations de lutte contre le sida, d’Act Up-Paris, d’ARCAT et de l’UNALS, nous sommes présentes aujourd’hui afin de soutenir les prostituéEs et tous les travailleurSES du sexe qui sont criminaliséEs, considéréEs comme des délinquantEs et des inadaptéEs sociaux-LES.
Depuis l’application de l’article 225-10-1 de la Loi pour la Sécurité Intérieure du 18 mars 2003, qui pénalise les racolages actif et passif, les conditions de vie, de travail, d’accès aux soins et aux droits des travailleurSES du sexe se sont dégradées.
D’abord, la loi LSI leur a imposé la mobilité. Cette loi qui pénalise le racolage oblige les prostituéEs à s’éloigner des lieux traditionnels de prostitution pour s’enfoncer dans des zones de non-droit où ils et elles subissent des violences de plus en plus importantes. Contre ces violences, les prostituéEs ne peuvent pas porter plainte. Pour échapper à la répression policière, les prostituéEs doivent régulièrement changer de quartier, de ville et parfois même de pays. Elles doivent aussi travailler de plus en plus via internet.
Parce qu’elles doivent être plus mobiles, les prostituEs sont de plus en plus précaires et nous savons que la précarité fait le jeu de l’épidémie de sida et des IST. Aujourd’hui, la première préoccupation des prostituéEs est d’assurer leurs besoins les plus élémentaires : se nourrir et se loger. Ces besoins passent avant la prévention et le soin. Quand les prostituéEs en situation de précarité n’ont pas pu gagner 30 euros pour payer leur chambre d’hôtel, ils et elles peuvent être amenéEs à accepter une passe sans préservatif, souvent mieux payée qu’avec préservatif.
Depuis 2003 les associations de prévention constatent une augmentation du nombre d’IST chez les prostituées les plus précaires. Il faut le dire, la pénalisation du racolage accroît les risques d’infections au VIH/sida et autres IST (Infections Sexuellement Transmissibles). Et du fait de la mobilité, les associations de prévention ont de grandes difficultés à assurer un suivi satisfaisant. De même, le parcours thérapeutique des prostituéEs séropositifVes est de plus en plus chaotique.Du côté de la prévention, de l’accès aux soins et aux droits, les associations de santé communautaires sont de plus en plus fragiles. Les financements sont insuffisants pour couvrir l’élargissement de leurs terrains d’intervention.
Cette situation est incompatible avec les exigences de santé en matière de prévention du VIH et des IST. Nous dénonçons la schizophrénie d’un État qui, d’un côté, finance des actions de prévention et, de l’autre, rend impossible leur mise en place efficace. Quand, par exemple, des préservatifs peuvent servir à prouver un délit de racolage ou être confisqués par les forces de l’ordre. C’est tout le travail de prévention VIH/sida de ces dernières années qui est mis en péril par l’application de cet article.
Nous, associations de lutte contre le SIDA,
– dénonçons les répressions subies par les prostituéEs,
– dénonçons les conséquences de la pénalisation du racolage,
– alertons sur les conséquences sanitaires et sociales catastrophiques qu’entraînerait une pénalisation les clients.
Avant même le vote de la LSI, nous avions alerté les pouvoirs publics de ses futures conséquences désastreuses en termes de santé.
Nous avions raison.
Aujourd’hui nous dénonçons aussi les velléités d’une pénalisation des clients qui ne ferait qu’augmenter la précarité des prostituéEs et les rendrait encore plus vulnérables face au VIH/sida.
La politique actuelle de l’Etat concernant la prostitution ne protège pas les personnes, au contraire, elle les place dans une situation de précarité. Les prostituéEs ne sont pas nécessairement vulnérables, c’est le statut de délinquantEs dans lequel l’État les maintient qui les rend vulnérables.
Il est maintenant temps que l’État cesse de détruire par la répression ce que nous tentons de construire en terme de prévention. Nous exigeons la suppression du délit de racolage ainsi que toutes les mesures réprimant un libre exercice de la prostitution.