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Et si les réticences de Nicolas Sarkozy à tenir ses promesses financières pour un accès universel aux traitements contre le VIH n’étaient pas que d’ordre économique ? Si sa vision de l’aide au développement, raciste et néo-coloniale, s’accommodait mal d’un outil multilatéral comme le Fonds mondial, et des exigences des sociétés civiles africaines à décider par elles-mêmes de leurs propres priorités ?

Le 26 juillet 2007, à l’université de Dakar, Nicolas Sarkozy prononçait un discours posant sa vision des relations entre l’Afrique et l’Europe. Alors que la France entame la présidence du G20 où l’aide au développement sera un des thèmes majeurs, il faut se rappeler le contenu de cette allocution. Sarkozy y solde l’héritage désastreux de siècles d’esclavage et de colonisation, et nous décrit « l’homme noir » comme incapable du moindre progrès.

Car « le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. Le paysan africain, (…) ne connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès.».

Donc, par exemple, si l’Afrique crève à ce point du sida, ce n’est pas parce que les pays riches l’ont abandonnée après l’avoir spoliée des siècles durant, c’est juste parce que le soleil se couche chaque jour à l’Ouest, que les nègres n’ont pas de montre et qu’ils ne peuvent sortir d’une conception cyclique du temps.

Une fois qu’on a fini de vomir, on comprend que l’aide au développement, qui inclut le financement de la lutte contre le sida en Afrique, ne serait pas un devoir des états riches envers les pays dont ils ont pillé les ressources humaines et les richesses naturelles, mais un outil pour imposer une nouvelle fois la vision européenne du progrès à de braves nègres incapables de se lancer dans « l’aventure humaine ».

Du coup, on comprend aussi les réticences d’un Sarkozy à augmenter la contribution française à un outil multilatéral comme le Fonds mondial qui cherche, au moins sur le papier, à faire en sorte que les états et les sociétés civiles des pays bénéficiaires décident par eux-mêmes des programmes à financer. Entre cette vision du développement, et celle du président de la République, il y a la même différence qu’entre un discours d’Aimé Césaire et Tintin au Congo.