Ce matin, dans une petite ville de la région de Gent en Belgique, des militantEs d’Act Up-Paris sont allés réveiller le commissaire européen au commerce, Karel De Gucht, devant sa maison. Ils ont déployé une banderole sur laquelle était écrit « De Gucht, AIDS accomplice » (« De Gucht, complice du sida »). Les militantEs ont téléphoné et demandé à Karel De Gucht de sortir. Il a refusé, même 5 minutes, refusant le dialogue avec nous. Devant son refus, les militantEs ont utilisé des cornes de brume et scandé des slogans tels que « De Gucht, hands off our medecines » (« De Gucht, ne touche pas à nos médicaments ») ou encore « De Gucht, assassin tu as du sang sur les mains » (De Gucht, killer, you have blood on your hands »).
Depuis des mois, la commission européenne négocie des accords commerciaux aux conséquences désastreuses pour les malades du sida dans les pays en développement.Alors que les gouvernements des Etats membres peinent à avoir une position claire sur le mandat donné à la commission européenne dans ces accords, le véritable décisionnaire est dans les faits le commissaire européen Karel De Gucht.
En effet, dans les accords commerciaux bilatéraux négociés avec des pays en développement, la commission européenne impose un cadre de départ maximaliste (au profit de l’Europe), comme si elle négociait avec un autre pays industrialisé. Elle propose donc systématiquement une augmentation de la durée des brevets (passage de 20 à 30 ans), une augmentation de la durée de protection des données de recherche «Data exclusivity» (également de 20 à 30 ans).
Si le projet d’accord le plus médiatisé est celui négocié avec l’Inde, premier pays producteur de médicaments génériques au monde, la commission a amorcé de nombreux projets d’accords avec la région MERCOSUR, l’ensemble des pays d’Asie du Sud-Est, et des pays africains. Dans ces derniers accords, la CE propose même aux pays d’intégrer des morceaux de l’ACTA.
L’ACTA est un autre accord qui a été négocié par la commission européenne, pendant près de trois ans, aux côtés des autres pays industrialisés et de trois pays en développement pour caution (Mexique, Maroc et Singapour). Cet accord contourne toutes les instances internationales existantes (OMC, OMS, OMPI, OMD), et risque de nuire fortement à la circulation et la fabrication de médicaments génériques à bas prix. Karel de Gucht supervise l’ensemble de ces négociations. Le commissaire européen au commerce est irresponsable. Au profit des grandes industries européennes dont il protège indéniablement les intérêts, comme Sanofi Aventis ou GlaxoSmithKline, il sacrifie la vie de millions de personnes. L’Europe multiplie ainsi les projets d’accords où seront renforcés les monopoles de ces industries, quelles qu’en soient les conséquences sanitaires dans les pays en développement. La chasse aux médicaments génériques a assez duré, il est maintenant temps que l’Union Européenne fasse preuve d’un peu moins de cynisme meurtrier et d’un peu plus de pragmatisme si elle souhaite réellement sauver des vies.