Le samedi 5 novembre 2011, plusieurs milliers de personnes défilaient contre les violences faites aux femmes.
Des travailleurSEs du sexe, ainsi que leurs alliéEs, venuEs revendiquer des droits furent la cible de violences de la part d’autre manifestantEs s’opposant à leur présence, illustrant une fois de plus que, pour certainEs, les violences faites aux putes ne sont pas des violences faites aux femmes.
Des pancartes arrachées, piétinées, quitte à donner un coup au passage, des huées, des insultes comme « bouffonne à pédés », « fachos », « aliénées » quand nous dénoncions la pénalisation des clients des travailleurSEs du sexe comme violence faite aux femmes et la liberté de parole pour les travailleurSEs du sexe. Des « dégagez » et des « vous êtes la honte de la manifestation » ont fusé à plusieurs reprises. La présidente du centre LGBT de Paris, Christine Le Doaré, a voulu nous empêcher d’utiliser notre mégaphone et menacé de nous faire éjecter par une batucada… ChoquéEs par une telle violence, quelques manifestantEs se sont d’ailleurs désolidariséEs de leur groupe pour venir marcher à nos côtés.
Quand les slogans invitaient à rompre le silence dont les femmes sont victimes, les putes étaient pousséEs au silence par des méthodes qui n’ont rien à envier aux machistes, qu’elles ne cessent pourtant, avec raison, de dénoncer. Il n’est pas possible d’être plus clair dans l’exclusion des putes de la catégorie des femmes.
La manifestation contre les violences faites aux femmes aurait-elle tourné en une manifestation pour les violences faites aux putes ?
La violence bien réelle n’était sans doute qu’une manière d’entériner la violence symbolique de la revendication de pénalisation des clientEs des travailleurSEs du sexe contenue dans l’appel porté par le CNDF et signé par des dizaines d’associations.
Nous avions dénoncé cette revendication car si elle aboutit, elle précarisera les travailleurSEs du sexe, les poussera dans des endroits plus dangereux et inaccessibles aux associations de prévention du VIH et des IST, elle rendra impossible l’imposition de l’usage du préservatif. Nous avions demandé aux organisations signataires de cet appel de s’en désolidariser, ce qui était le minimum quand on prétend lutter contre les violences faites aux femmes tant la pénalisation des clients des travailleurs du sexe augmenterait les violences faites aux putes. Le silence assourdissant que l’on nous a opposé illustrait déjà leur mépris à notre égard. Parmi les signataires, seul un parti, EELV, et une association, Paroles de femmes, nous ont répondu, disant qu’ils n’avaient pas encore de position déterminée sur cette revendication.
Après cet après-midi de violences subies, l’une de nous a dû être transférée aux urgences par les pompiers, victime d’un malaise. Nous redemandons aux signataires et participantEs de cette manifestation de se désolidariser du projet de pénalisation de nos clientes, et leur demandons de dénoncer les violences dont nous avons été victimes.
Act Up-Paris et le STRASS demandent encore une fois aux membres du conseil d’administration du centre LGBT de Paris la démission de sa présidente, Christine Le Doaré ; nous le ferons publiquement à chaque fois qu’elle fera preuve d’autoritarisme.
Parce que les signataires de cet appel, les manifestantEs qui nous ont violentéEs n’ont pas le monopole du féminisme, parce qu’il n’est pas possible de prétendre lutter contre les violences faites aux femmes tout en exerçant des violences à l’égard des putes, parce que la première violence réside dans le mépris de la parole des femmes travailleurSEs du sexe, nous continuerons de nous mobiliser pour porter cette parole, pour nous opposer aux féministes moralistes et paternalistes, pour toujours réaffirmer qu’une violence faite aux putes est bien une violence faite aux femmes.