Bruxelles, le 7 février 2012 – En soutien à la semaine mondiale d’action sur l’accord de libre-échange UE-Inde, Pauline Londeix, militante d’Act Up-Paris a aujourd’hui interpellé publiquement le commissaire européen au commerce, Karel De Gucht, à l’occasion d’une réunion « de dialogue », « sur le commerce, la croissance et le développement » à la commission européenne. De Gucht quitterait demain l’Europe pour l’Inde afin de participer le 10 février au sommet entre l’UE et l’Inde. Dans le cadre de ces négociations, la commission européenne fait pression sur le gouvernement indien pour que celui-ci accepte des compromis.
Lors de cette réunion, dans sa présentation générale, De Gucht a évoqué son désir que la commission européenne (CE) défende un « commerce éthique ». Alors qu’il parlait des pays les moins avancés (PMA), De Gucht a affirmé que la CE voulait offrir aux pays les plus pauvres un libre accès au marché européen. Il a ajouté qu’il souhaitait que la CE continue de se concentrer sur les accords bilatéraux et multilatéraux. Comme accords bilatéraux, il a mentionné les accords déjà conclus (avec la Colombie, le Pérou, l’Ukraine) et les accords en cours (avec notamment l’Inde, la Malaisie, Singapour). Karel De Gucht n’a pas spécifié ce que ces pays pauvres auraient à concéder à la CE en retour. La gouvernement indien connait parfaitement ces méthodes depuis 4 ans. Les textes de négociations fuités montrent qu’en échange d’ouvrir le marché de la CE aux companies indiennes, la Commission Européenne demande à l’Inde de modifier dans sa loi sur les brevets les protections pour la santé qui permettent à l’Inde de produire et d’exporter des médicaments génériques dans le monde en développement. Plus de 80% des personnes sous traitement antirétroviral dans les pays en développement bénéficient de génériques fabriqués en Inde. Questionné sur l’impact de la politique de la CE, comme par exemple ACTA et l’accord UE-Inde sur l’accès aux médicaments, De Gucht a répondu, à nouveau que l’ALE n’aurait pas d’impact sur les médicaments. Il a ajouté que la CE ne demandait plus une extension de la durée des brevets ni le data exclusivity. Pourtant, il n’a pas répondu aux préoccupations concernant l’impact sur la mise en oeuvre de la propriété intellectuelle sur l’accès aux médicaments. Faisant référence aux mesures de mise en oeuvre de la propriété intellectuelle dans l’ALE EU-Inde et ACTA, De Gucht a déclaré que personnellement il était convaincu de leur nécessité pour contrôler des faux médicaments. Il a demandé si les activistes n’étaient pas inquiétés par ces faux médicaments qui tuent des gens. Malgré les preuves avancées par des organisations travaillant sur la santé et les analyses produites montrant que ACTA n’a rien à voir avec le problème des faux médicaments et qu’au contraire ce traité va limiter l’accès aux médicaments génériques, Karel De Gucht continue d’avancer l’idée que ACTA va répondre aux problème des faux médicaments. De Gucht a par ailleurs ajouté qu’il n’était pas « impressionné » par les campagnes contre ACTA. Sur le copyright il a dit que le besoin est de contrôler l’accès au contenu, exactement comme dans un supermarché pour prévenir les vols. En conclusion, il a dit qu’ils « essaient réellement de faire de leur mieux pour les PMA ». La réponse de Karel De Gucht à Act Up-Paris sur les mesures aux frontières dans l’accord UE-Inde et ACTA pose de nombreux problèmes. Il met en évidence le fait que la CE n’a pas pris sérieusement l’impact des nombreuses saisies de médicaments génériques par les douanes européennes, notamment des médicaments contre le sida qui provenaient d’Inde et étaient à destination de l’Afrique. La commission pousse également l’Inde pour que celle-ci accepte des mesures sur l’investissement dans l’accord UE-Inde, qui donnerait le droit aux multinationales européennes de poursuivre le gouvernement indien pour toute mesure de protection de la santé qui serait prise, comme par exemple les messages de prévention sur les paquets de cigarette, etc. « Act Up-Paris est fortement opposé à ces clauses dans l’ALE UE-Inde. L’industrie indienne du générique permet aujourd’hui à des millions de personnes de vivre dans les pays en développement – notamment dans les PMA qui M. De Gucht prétend vouloir aider », a déclaré Pauline Londeix d’Act Up-Paris. « M. De Gucht et la commission européenne semblent vouloir défendre les seuls intérêts des multinationales. La dangereuse politique de la commission doit cesser immédiatement. Trop de vies sont en jeu », a-t-elle ajouté.