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Ce mardi 24 juillet 2012 à Washington DC, des activistes du monde entier ont manifesté pour arracher aux gouvernements les moyens qui permettront de mettre fin à l’épidémie sida. Les associations du sud et du nord présentes à la 19ème conférence mondiale de lutte contre le VIH/sida ont décidé de faire de cette marche le moment fort du volet activiste de cette semaine, si importante pour la lutte contre le sida. 37 bus venus de Boston, Chicago, New York, Philadelphie ont déposé des centaines de militantEs, pour l’essentiel des personnes très malades et précaires, qui n’ont pas hésité, malgré la fragilité de leur état de santé, à faire le trajet et à manifester sous la chaleur pour interpeller les responsables politiques.
Dès 11h, les activistes s’étaient donné rendez-vous dans le Global Village, lieu réservé aux associations de lutte contre le sida et pour les droits humains. Vers midi, la manifestation s’est dirigée vers l’extérieur, pour entamer une marche dans Washington, jusqu’à la Maison Blanche.
La manifestation s’est d’abord divisée en cinq branches (droits humains, financements, prise en charge nationale, industrie pharmaceutique et taxe sur les transactions financières), prenant des Maison Blanche. Act Up-Paris a choisi de marcher dans la branche « industrie pharmaceutique » pour dénoncer les profits que les industries pharmaceutiques font sur les vies des malades. Ces profits sont assurés par les accords commerciaux actuellement en cours de négociation qui renforcent la protection des brevets et menacent par là l’accès à des médicaments génériques à bas prix. Nous avons marché en tête de manifestation avec une banderole « FTA : Death Under Patent » (Les FTA, Free Trade Agreements, sont des accords commerciaux négociés par les pays riches avec les pays en voie de développement qui menacent l’accès aux médicaments génériques dans ces pays).
Pour nous, activistes français, le climat semblait très étrange : pas de policiers durant tout le trajet, seulEs quelques unEs pour faciliter la circulation ici ou là, et encore… Le first amendment a parfois du bon, même si pour que les choses se passent ainsi, tout doit être extrêmement bien organisé en amont avec les autorités, et qu’aucun débordement n’est permis.
La manifestation s’est arrêtée deux fois. D’abord pour un die in devant les bureaux américains de Novartis, toujours engagé dans un procès contre l’Etat Indien visant à assouplir la loi indienne sur les brevets pharmaceutiques. Si Novartis gagne ce procès, la capacité de l’Inde à produire des médicaments génériques à bas prix sera gravement menacée, mettant en péril des milliers de vies (la plupart des ARVs distribués en Afrique sont des génériques produits en Inde). Cette stratégie criminelle a été dénoncée unanimement par les slogans suivants : « Fuck you Novartis, you’re not worth a rhyme », « No morals, no shame, Novartis » ou encore « Novartis disgrace, drop the case » [[« Va te faire foutre Novartis, tu ne mérites pas une rime », « Pas de morale, pas de honte, Novartis », « Honte à Novartis, retire la plainte »]].
Ensuite, les activistes se sont arrêtéEs devant les bureaux du Représentant américain au commerce Ron Kirk pour exiger de lui qu’il arrête immédiatement les négociations du TTP [[Transpacific Trade Partnership : accord commercial actuellement négocié par les Etats-Unis avec le Canada, le Mexique, l’Australie, la Nouvelle Zélande, Singapour, le Chili, le Vietnam, le Brunei, la Malaisie et le Pérou]]. dont certaines dispositions renforcent la protection des brevets pharmaceutiques et menacent par là l’accès à des médicaments génériques à bas prix. Miss Affordable a repris un standard des conférences, la chanson de Miss Pharma’s pet (alias Mademoiselle Toutou des Labos) pour décrire les liens entre cette administration et l’industrie.
Toutes les branches se sont rejointes devant la Maison Blanche. Après plusieurs prises de parole, dix militantEs se sont approchéEs des grilles de la résidence présidentielle pour y accrocher plusieurs centaines de rubans rouges noués autour de billets de un dollar ou de boîtes de médicaments, pour rappeler que tout investissement supplémentaire sauverait des vies. Dans un premier temps, ces activistes n’ont pas pu commencer leur action, non pas à cause des policiers, mais à cause de la foule de journalistes, qui les pressaient contre la grille. Assez rapidement, les forces de l’ordre ont fait reculer la foule. Au bout de vingt minutes, les activistes étaient arrêtés, et mis dans un panier à salade, en suivant une procédure très ritualisée, et assez énigmatique puisque cela offrait l’opportunité d’images embarrassantes pour Obama : voilà comment vous luttez contre le sida !