Chenai (Inde) – L’organe d’appel de la propriété intellectuelle a rejeté aujourd’hui la demande du laboratoire Bayer qui souhaitait faire arrêter la production et la vente de versions génériques de la molécule anticancéreuse sorafenib tosylate.
La firme pharmaceutique allemande avait en effet fait appel de la première licence obligatoire indienne autorisant le génériqueur Natco pharma LtD à produire du sorafenib tosylate 97% moins cher que la version commercialisée par Bayer. Les licences obligatoires permettent aux gouvernements de passer outre un brevet pharmaceutique en autorisant la production ou l’importation de versions génériques d’un médicament, notamment lorsque son prix de commercialisation par le détenteur du brevet le rend inaccessible pour la population, comme c’était le cas pour le sorafenib tosylate de Bayer. Le recours aux licences obligatoires est garanti par la déclaration de Doha signée en novembre 2001 par l’ensemble des États de l’OMC. Cette décision est un soulagement et une très bonne nouvelle pour l’ensemble des malades de la planète. “De plus en plus de malades développent des résistances aux médicaments anti-VIH de première ligne et nécessitent des molécules de deuxième et troisième ligne. Or ces molécules, moins concurrencées par les génériques, coûtent beaucoup plus cher. Nous comptons sur l’Inde pour continuer à émettre des licences obligatoires afin de permettre aux malades d’avoir accès aux traitements qui sauveront leurs vies” déclare Céline Grillon, chargée du plaidoyer international à Act Up-Paris. Ce n’est pourtant pas la première fois qu’une industrie pharmaceutique s’en prend à l’Inde dont la production de médicaments génériques alimente en grande partie les pays du Sud. Depuis 2006, Novartis poursuit le gouvernement indien devant ses tribunaux pour tenter d’assouplir la loi anti-evergreening [[Il s’agit d’une pratique courante de l’industrie pharmaceutique qui consiste à prolonger la durée d’un monopole en déposant un nouveau brevet sur une forme très légèrement différente d’une molécule dont le brevet est arrivé à expiration. L’Inde dispose d’une législation qui interdit cette pratique : l`article 3d de sa loi sur les brevets exige une avancée thérapeutique significative pour qu’un brevet soit déposé sur une molécule déjà existante.]] favorable aux génériques. Après avoir été débouté en première instance et en appel, Novartis poursuit l’affaire devant la Cour suprême indienne, la décision finale est attendue sous peu. Act Up-Paris se réjouit de cette décision qui permettra à plus de malades d’être soignéEs. Nous demandons à l’Inde de résister à Big Pharma et de continuer à recourir aux flexibilités des accords ADPIC pour permettre l’accès à des médicaments génériques à bas prix.