Alors que le délai d’application de l’accord ADPIC accordé aux Pays les moins avancés (PMA) expire dans moins de trente-cinq jours, les pays riches font pression pour limiter les possibilités de prolongation et obliger les pays les plus pauvres à appliquer au plus vite des règles commerciales qui mineront leur développement.
En raison de leur faible développement technologique et industriel, les pays les moins avancés bénéficient depuis 1995 d’une exemption d’appliquer l’accord ADPIC qui fixe les standards internationaux en matière de « propriété intellectuelle ». Leur situation n’ayant pas vraiment changé, les PMA ont déposé en novembre dernier une demande de prorogation de ce délai jusqu’à ce que leur stade de développement les fasse sortir de la catégorie des moins avancés.
Or, bien que l’ADPIC précise qu’une demande de prolongation doit être satisfaite, les pays riches (au premier rang desquels la Suisse, les États-Unis et l’Union européenne) tentent d’en limiter la durée et la portée. « En voulant restreindre à quelques années le délai d’exemption, les pays riches font peser une Épée de Damoclès sur les PMA pour les forcer à accélérer l’adoption des règles relatives à la propriété intellectuelle » analyse Céline Grillon, responsable du plaidoyer international à Act Up-Paris.
Un risque pour le bon développement et la santé dans les PMA
Ces règles, qui protègent principalement les intérêts des grandes industries occidentales, risquent pourtant d’entraver le bon développement technologique et industriel des PMA. Concernant les produits pharmaceutiques (pour lesquels l’exemption court jusqu’au 1er janvier 2016), demander aux pays pauvres d’appliquer les brevets conduirait à une catastrophe sanitaire (cf. https://www.actupparis.org/spip.php?article5119). La directrice générale de l’OMS Margaret Chan, tout comme l’ONUSIDA et le PNUD, a d’ailleurs appelé le Conseil des ADPIC à accepter la demande des PMA.
Un bras de fer engagé à huis clos
La décision finale sera prise par le Conseil des ADPIC en juin. D’ici là, des négociations informelles sont le cadre de fortes pression sur les PMA pour qu’ils revoient leur demande à la baisse. En sont exclus les pays en développement tels que l’Inde ou le Brésil qui soutiennent les PMA et dont le poids politique pourrait faire pencher la balance. C’est un bras de fer profondément inégalitaire entre pays les plus riches et pays les plus pauvres de la planète qui s’est engagé à l’OMC, institution qui se targue pourtant de transparence et de démocratie.