Les personnes vivant avec une hépatite C et dont l’état de santé présente une urgence doivent pouvoir bénéficier des médicaments en cours de développement et proches de leur mise sur le marché. Pour cela, il existe en France un dispositif appelé Autorisations Temporaires d’Utilisation (ATU), susceptible de sauver des vies en permettant un accès précoce à de tels médicaments.
Le 23 juillet, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) avait accordé 96 ATU nominatives – c’est à dire basées sur l’état de santé de la personne – de sofosbuvir, une molécule développée par Gilead, à des personnes ayant bénéficié d’une greffe de foie, des personnes en attente de transplantation et des personnes cirrhotiques en impasse thérapeutique. Mais Gilead refusait de donner la molécule à la majorité d’entre eux.
Les données issues de programmes d’accès précoce (ou compassionnel) peuvent être utilisées pour déterminer les façons les plus sûres et les plus efficaces de traiter le VHC chez les personnes qui en ont le plus besoin. Par exemple, la cohorte ANRS CUPIC a fourni des informations essentielles pour comprendre quels patients cirrhotiques étaient les plus susceptibles d’aller mieux- ou moins bien – avec des traitements basés sur le boceprevir ou le telaprevir. Si Gilead refuse d’étudier le sofosbuvir « dans la vraie vie », l’occasion est perdue d’en minimiser les dommages et d’en maximiser les bénéfices.
C’est pourquoi nous demandons à Gilead de donner le sofosbuvir MAINTENANT aux personnes qui en ont le besoin le plus urgent, y compris celles avec une cirrhose avancée (Child-Pugh B ou C), parmi lesquelles certaines vivent avec le VIH ou une autre maladie. Dans cet objectif, une pétition a été lancée, qui en dix jours a recueilli plus de 400 signatures individuelles et associatives dans le monde.
Des projets d’ATU de cohorte et d’essai clinique (sofosbuvir+ledipasvir) sont en cours d’examen à l’ANSM, mais ces projets apparaissent tout aussi restrictifs et Gilead refuse de divulguer ses informations aux associations de malades. Il est ainsi fortement probable que des médecins n’ont pas demandé des ATU nominatives en espérant que leurs patients pourraient accéder au traitement dans le cadre d’une ATU de cohorte ou d’un essai, alors qu’ils en seront exclus.
En négligeant les urgences sanitaires, le renforcement des données scientifiques utiles à la prescription et la pharmacovigilance, le laboratoire Gilead, qui commercialise des médicaments vitaux, n’est pas à la hauteur de ses responsabilités éthique et sociale.