Le rapport du groupe d’expertEs publié ce matin indique qu’il convient de proposer un traitement antirétroviral à toute personne séropositive. Cela s’appuie sur des résultats d’études qui attestent du bénéfice à commencer tôt le traitement.
À l’heure où les pouvoirs publics cherchent à faire des économies, l’accès permanent et stable aux soins, y compris pour les personnes précaires économiquement ou en difficultés d’accès aux droits, devient une préoccupation croissante. Selon une étude, les recommandations du groupe d’experts sont globalement bien suivies mais la précarité des malades pousse les médecins à retarder la mise sous traitement[[Cf. présentation d’Eugenia Krastinova au séminaire de recherche 2013 de l’ANRS https://www.actupparis.org/spip.php?article5250]], qui demande une régularité de prise sans laquelle le risque d’apparition de résistance est important. La perte de revenus, d’une assurance maladie, d’un logement ou d’un titre de séjour peuvent en effet conduire à une interruption de traitement.
C’est pourquoi, si le rapport souligne l’importance du travail des associations dans le parcours des personnes vivant avec le VIH (PVVIH), il faut néanmoins développer les dispositifs en direction des précaires, et le gouvernement doit par ailleurs mener une politique globale et cohérente qui ne précarise pas les travailleurSEs du sexe, les trans ou les migrantEs, et mettre en application les lois sur l’égalité d’accès à la prévention et aux soins dans les prisons et sur la suspension de peine pour raison médicale.
Il faut donc rejeter le projet de pénalisation des clients des travailleurSEs du sexe[[Manifeste contre la pénalisation des prostituées et de leurs clients http://droitsetprostitution.fr/1/index.php/a/7-manifeste-contre-la-penalisation-des-prostituees-et-de-leurs-clients]], faciliter le changement d’état civil des trans[[Pour Najat Vallaud-Belkacem, la précarité et le sida des trans peuvent bien attendre https://www.actupparis.org/spip.php?article5263]] et mettre en place des programmes d’échange de seringue en milieu carcéral[[La MILDT condamne les prisonnierEs aux contaminations https://www.actupparis.org/spip.php?article5264]]. En parallèle de la recherche vers la guérison, il faut de plus continuer la recherche pour réduire les effets indésirables des traitements, notamment chez les femmes, et sur les comorbidités.
Malgré le décret du 5 juin 2013 autorisant l’usage thérapeutique des cannabinoïdes signé du premier ministre[[Décret n° 2013-473 du 5 juin 2013 modifiant en ce qui concerne les spécialités pharmaceutiques les dispositions de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique relatives à l’interdiction d’opérations portant sur le cannabis ou ses dérivés]], le rapport ne mentionne pas les effets bénéfiques[[Cannabis médical et VIH : je ne me drogue pas, je me soigne https://www.actupparis.org/IMG/pdf/CR_RePI_cannabis.pdf]], notamment orexigènes, des comprimés contenant des dérivés du cannabis pour les séropositifs[[http://www.fda.gov/ohrms/dockets/dockets/05n0479/05N-0479-emc0004-04.pdf]].
Sur le volet de la prévention, Act Up-Paris se félicite de voir le préservatif réaffirmé par le groupe d’expertEs comme outil de référence. En revanche, nous sommes dubitatifVEs sur le choix qui a été fait de s’exprimer en termes de réduction de risques, englobant en particulier le sérotriage et le séropositioning comme des méthodes de prévention valables. Nous regrettons également que la question de la mise en œuvre du traitement comme prévention (TasP) chez les hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes soit réduite a celle d’une différence de niveau de preuve et ne porte pas sur les spécificités des milieux homosexuels qui influent directement sur l’efficacité de cette stratégie.
Le rapport réaffirme explicitement le rôle des ARS, en matière de gouvernance de la politique de prévention. Ce sont en effet bien elles qui en portent la responsabilité directe sur leur territoire. Aussi faudra-t-il veiller à l’avenir à ce que celles-ci mettent en place des politiques conformes aux impératifs de la lutte contre le sida, par exemple en promouvant les centres de santé sexuelle. Ceci est un enjeu majeur en Île-de-France, où réside la moitié des séropositifVEs en France.